Dans l’opinion publique aussi bien congolaise qu’internationale, le rapport de l’Inspection générale des finances sur la Gécamines continue à alimenter la chronique. Si, pour la seule période de 2012 à 2020, les inspecteurs de l’IGF sont arrivés à la conclusion d’un important plan de prédation développé au plus haut niveau de l’Etat pour déposséder la Gécamines de son patrimoine minier, un nom revient sur toutes les bouches. C’est celui de l’emblématique Albert Yuma, président du Conseil d’administration de la Gécamines entre 2010 et 2021. C’est en décembre 2021 que le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, a réussi, enfin, à démettre Albert Yuma de ses fonctions de PCA de la Gécamines. Mais, avant c’est sous son règne que la Gécamines a été saignée à blanc, comme le démontre le dernier rapport de l’IGF.
Le dernier rapport de l’IGF (Inspection générale des finances) sur la Gécamines contient de graves révélations qui démontrent combien cette entreprise du Portefeuille de l’Etat a été démantelée par la signature de divers partenariats qui l’ont finalement dépouillé de son important patrimoine minier.
Selon l’IGF, avec des réserves aussi importantes en cuivre qu’en cobalt en 2000, la Gécamines a été réduite en 2021 à une portion congrue qui ne représente plus rien. En réalité, tout son patrimoine minier a été dilapidé, fondu dans divers contrats de joint-venture qui n’ont nullement profité à l’entreprise.
Pour illustration, l’IGF rapporte qu’entre 2012 et 2021, les nombreux partenaires de la Gécamines qui jouissent allégrement de son patrimoine ont réalisé des chiffres d’affaires de près de 35 milliards de dollars américains, dans lesquels la Gécamines ne s’est contentée que de 564 millions USD.
Quant aux royalties, censées être reversées à la Gécamines, l’IGF n’en a trouvé que de traces minimes. Et si, par moment, des royalties étaient allouées à la Gécamines, ce sont de modiques sommes qui sont tombées dans ses caisses.
Qu’est-ce qui s’est passé ? Comment en est-on arrivé là ?
Evidemment, dans ses conclusions, l’IGF a formulé une série de recommandations au ministre d’Etat du Portefeuille pour permettre à la Gécamines de rentrer dans ses droits. L’IGF reconnaît qu’il ne sera pas facile pour la Gécamines de récupérer tout ce qu’elle a perdu, pendant toutes ces années, elle pense cependant que l’Etat congolais, seul propriétaire de cette entreprise, a la possibilité de l’aider dans cette rude bataille.
Quid d’Albert Yuma ?
Président du Conseil d’administration (PCA) de la Gécamines entre 2010 et 2021, un record de longévité à ce poste jamais égalé, Albert Yuma n’est pas étranger à toutes les irrégularités que l’IGF a reprises dans son rapport.
De 2010 à 2021, Albert Yuma était le tout puissant PCA de la Gécamines. À ce poste, il a été longtemps critiqué pour ne pas avoir assuré la relance promise de l’entreprise. Il a été, maintes fois, été assimilé au «clan des Katangais» qui a organisé et entretenu le démantèlement de la Gécamines, jadis fleuron de l’industrie minière congolaise.
En décembre 2021, Albert Yuma a été finalement évincé de la présidence du Conseil d’administration de la Gécamines, tout en laissant des cadavres dans le placard, comme le reprend le rapport de l’IGF.
C’est dire que dans les graves indices de prédation répertoriés par l’IGF, Albert Yuma n’y est pas étranger. On attend voir les autorités politiques de la RDC explorer cette piste pour donner, enfin, un sens au travail remarquable de l’IGF.
Hugo Tamusa