Plusieurs compatriotes sont privés des moyens d’accéder à des preuves sur des affirmations des uns et des autres quant à la vie nationale, à cause des prises de positions qui relèvent plus de l’abstraction logique que du domaine du réel. Il convient de rappeler que dans ce domaine théorique, les preuves sont absolues, elles emportent la conviction de tous, elles sont les fruits de raisonnements. Cette attitude de la preuve absolue est désormais usitée en politique nationale.
Au lieu de s’inspirer du réel, de se laisser convaincre par des faits et des faits seuls, les politiciens congolais, certains politiciens congolais jugent de tout sur base d’axiomes prédéfinis. Par exemple, ils ont décidé que la gratuité de l’école primaire doit être un échec, que les voyages du Chef de l’Etat n’ont rien apporté au pays, que rien de concret n’a été fait en RD Congo depuis trois ans. Ce sont des postures politiques qui obéissent à la logique formelle, et qui permettent la construction d’un statut à visibilité. C’est un rôle facile à tenir car on est impénétrable à l’argument du terrain, on refuse de se laisser instruire par les faits objectifs et on garde avec ténacité ses positions propres qui sont le résultat d’un choix politique. Il est dans ces conditions difficile, même d’organiser des débats contradictoires sur des bases aussi différentes.
Et pourtant, il s’agira de faire justice à l’histoire et de peindre de manière correcte la période en cours, en lui donnant des proportions exactes. Il s’agit de faire face au domaine réel, car dans celui-ci, un raisonnement juste appliqué à des données ne conduit pas nécessairement à une conclusion exacte, et l’ignorance de cette vérité, qui est malheureusement contre intuitive conduit à des très graves erreurs.
Le pragmatisme
Michel Yves, un auteur contemporain, estime que pour être sûr d’obtenir une conclusion exacte, il faudrait pouvoir appliquer un raisonnement juste à la totalité des données ou paramètres intervenant dans le problème. Or dans le monde réel, la réalité ne nous est jamais entièrement connue, de ce fait, nous ne possédons jamais toutes les données. Et quand bien même nous les connaitrions, cette masse serait souvent beaucoup trop grande pour pouvoir être prise en compte. Par conséquent, dans le domaine réel, les preuves absolues n’existent pas. Il n’existe que des preuves des forces variables, forces déterminées par la catégorie dont elles sont issues. Sans prétention d’épuiser ce dossier il nous est un devoir moral de montrer parmi tous les angles de perception différents sur la réalité congolaise, de faire justice aussi aux actions menées dans la simplicité et la discrétion. Ce sont des actions en profondeur qui croissent comme les racines d’une plante loin des témoins et parfois dans l’indifférence générale mais dont l’importance est vitale.
Il nous a paru opportun d’extirper de la confusion générale entretenue à cause de la course au pouvoir, les faits importants survenus dans l’écosystème national, faits qui sont le fruit d’une volonté politique assumée. L’action publique menée au nom du peuple par le gouvernement est certes entichée d’une dose partisane, c’est de bonne guerre car les actions positives sont frappées de la force du boomerang, c’est à dire d’une capacité de tirer des dividendes pour le groupe qui a posé des actes signalés. Mais au-delà des familles politiques, il y a la République qui est une valeur commune et qui demande une approche objective. A côté des valeurs républicaines, il y a l’Etat, ce cadre de puissance et de l’alimentation de la mémoire collective historique. L’Etat doit être géré de façon exemplaire.
Le chien aboie, la caravane passe
Depuis le début de cette législature et l’avènement du Premier ministre Sama Lukonde, plusieurs choses ont été dites sur lui, des choses qui sont en fait le résidu d’une gouvernance populiste ou le chef du gouvernement était jugé à l’aune de sa capacité à mobiliser des foules, car ainsi il marquait sa popularité et il pouvait jouer sur cela pour les négociations électorales. Cette méthode a montré ses limites car elle fut l’une des causes des coulages des recettes et des détournements des fonds publics. Au nom d’une certaine base à entretenir, plusieurs premiers ministres ont ainsi suivi des sentiers dangereux qui se sont révélé des impasses. Il est demandé au Premier Ministre d’agir sur la réalité politico sociale du pays par des mesures correctives des inégalités et de promotion de la prospérité partagée. Certes il vient du peuple mais son rôle est dans l’action publique et non dans la mobilisation populaire.
De la mobilisation des masses à la mobilisation des recettes, Sama Lukonde a fait son choix. Cet énarque d’une quarantaine d’années, ingénieur à la base, formé à la rationalité, mais surtout à la résolution des vrais problèmes, a décidé de se concentrer sur l’essentiel de son mandat et de la mission lui confiée par le Chef de l’Etat. L’Etat peut avoir le meilleur des intentions pour les populations, mais sans moyens, la parole devient de la démagogie. Ayant compris cela, Sama Lukonde a mis en place avec son équipe et ce dans un silence total, un mécanisme de mobilisation des recettes pour permettre au Gouvernement d’avoir les moyens de ses ambitions d’autant plus que le Chef de l’Etat, apôtre de la social-démocratie ne pensant qu’au social du peuple.
Travaillant sur les mécanismes internes des coulages de recettes et usant de rigueur et de discipline dans la gestion de la qualité de la dépense, le gouvernement de l’intérieur a réussi à une stabilité institutionnelle en réglant les dysfonctionnements existant. S’adressant à des journalistes étrangers qui avaient perçu ce changement sous terre, il reconnaitra que les efforts du Gouvernement ont été focalisés sur la mobilisation des ressources internes, en vue de la poursuite de la mise en œuvre des politiques publiques qui ont été déclinées dans le programme d’ actions adossé au plan national stratégique de développement 2019-2023. Cette gestion planifiée, pas à pas et surtout loin de la spéculation politicienne a permis à Sama Lukonde de travailler en profondeur pour rétablir la dignité de l’ Etat en lui accordant des moyens supplémentaires de son action. L’Etat est d’abord un service et pour que ce statut soit accompli, il est attendu de celui-ci de fournir des services de qualité en commençant à prendre en compte les citoyens les plus fragiles comme les enfants, les femmes et les personnes de troisième âge, de prendre en charge les forces de la défense et de la sécurité avec leurs familles de manière à couvrir le pays d’une chape de protection face aux menaces multiples qui pèsent sur l’intégrité et la souveraineté de la nation congolaise.
L’avoir compris et surtout l’avoir mis dans son action quotidienne est un indicateur de lucidité politique.
Budget 2023 : le projet de tous les records
L’audace d’oser voir grand avec un budget de 14 milliards de dollars pour 2023, Sama Lukonde bat le record historique, avec un taux d’accroissement de 32 %. Aux dernières nouvelles, le gouvernement s’apprête à déposer un projet de budget ambitieux avec un chiffre jamais accompli dans l’histoire financière du pays, près de 15 milliards USD, c’est un bond prodigieux qui mérite que l’on analyse les articulations de la mécanique qui a été mise en place pour y arriver. Ce projet qui sera présenté dans le délai constitutionnel se présente en équilibre selon des documents consultés au ministère du budget. En francs congolais, c’est 29.511,1 milliards, soit un accroissement de 32,6 % par rapport à la loi des finances de l’exercice 2022 qui était chiffrée à 22.253 milliards. Les commentateurs et analystes économiques se sont demandé comment cette prouesse pouvait être possible sans mettre en lumière les éléments objectifs qui soutenaient ce niveau inédit ?
Dans le cadre de cette réflexion, nous avons compris que ce projet repose sur des indicateurs et sur des agrégats macroéconomiques précis à savoir un taux de croissance du PIB de 6,7 %, un taux déflateur du PIB de 9,8 %, un taux d’inflation moyen de 8,9 %, un taux d’inflation fin période 6,8 %, un taux de change moyen de 2.021,9 FC/USD, un taux de change de fin période 2.034,87 FC/USD et un PIB nominal de 151.553,43. Il est vrai qu’il va falloir des efforts intenses au Premier ministre Sama Lukonde pour mobiliser ces moyens et on a appris dans les couloirs du ministère des finances qu’il est sérieusement envisagé de relever la pression fiscale vers la moyenne africaine qui est située à 17,6 %.
On voit que le focus économique fut un choix stratégique important qui a permis au Fond monétaire International et à la Banque Mondiale de décider des appuis budgétaires car convaincues qu’elles étaient en présence d’un gouvernement capable de mener à bon escient les reformes nécessaires pour l’assainissement des finances et la mise en place des équilibres fondamentaux. Conscient que le pays se trouve dans une croisée des chemins, le Chef de l’Etat a instruit son gouvernement d’insister sur la satisfaction des besoins sociaux, notamment la santé, l’éducation et les infrastructures, permettant l’intégration nationale.
Préserver les acquis à l’abri de la mauvaise foi et fixer dans l’airain le bénéfice du leadership de Tshisekedi
Comme nous l’avons dit dans l’avant-propos de cette réflexion, il existe des personnes qui ont comme fonction négative de détruire tout ce qui s’est fait sans elles, elles développent une résistance aux arguments de terrain pour s’enfoncer dans un nihilisme sans pareille. Il est vrai que des décennies d’incurie ont laissé le pays au bord de la route avec un désespoir criant dans la population. Mais l’avènement de Félix Tshisekedi a soulevé une montagne des besoins face à une colline des moyens et le mérite de Son Premier Ministre fut de réduire la montagne et de faire grandir la colline. Il est parvenu à se situer dans l’optique de la vision exprimée par le chemin de l’Etat pour s’attaquer aux organes malades de l’Etat et de garantir d’abord l’accroissement des recettes par la lutte contre la corruption et une affectation judicieuse des ressources disponibles. Ce travail devant se faire hors portée de la malfaisance politique et le culte de la personnalité, Sama Lukonde se fait discret, étant devenu un homme des dossiers, créant même de la nostalgie au sein de ceux qui sont accros aux politiques de terrain, spécialistes des harangues. Mais il a tenu bon et aujourd’hui, le budget de 14 milliards USD est la meilleure récompense pour cette politique de discrétion et d’efficacité.
Le Président Félix Tshisekedi a aujourd’hui un bilan et un discours à présenter au peuple du Congo et peut légitimement alimenter son ambition de rempiler car son équipe gouvernementale a bien travaillé dans cette période faite malgré tout de crise et d’absence de consensus au sein de la classe politique. On peut dire que le Premier ministre Sama Lukonde préfigure un type des dirigeants d’un nouveau type, vrillé sur le travail et évoluant loin des oripeaux de la démagogie et ayant du respect pour le peuple. Il est aujourd’hui une réalité indispensable et nécessaire à la configuration finale du leadership de Félix Tshisekedi.
Il est simplement demandé à ceux qui feront l’histoire de cette période de ne pas oublier l’exemple de ce gouvernement qui a respecté les délais constitutionnels pour le dépôt de la loi des finances, pratique qui témoigne de l’orthodoxie dans la gestion et qui a inauguré les budgets de puissance qui correspondent à l’image même de ce pays. Sama Lukonde, loin des paillettes de l’actualité mondaine comme un soldat, s’est mis au service d’un idéal, celui incarné par Félix Tshisekedi, « Le peuple d’abord ».
(*) Le titre et les inter-titres sont de la rédaction
Abraham Moïse Tshinkola
Analyste politique, maître des Conférences