Sommet UE-Afrique : Félix Tshisekedi décline l’invitation de Bruxelles

Le Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, ne fera pas le déplacement de Bruxelles, capitale du royaume de Belgique, où s’ouvre ce mercredi le sommet Union européenne (UE) – Afrique. Des sources gouvernementales rapportent que le Président de la République devait se faire représenter par le Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge. Quant aux raisons de son absence dans la capitale de l’Europe, on n’en sait pas grand’chose. Mais, on croit savoir que les dossiers chauds de l’actualité, notamment l’interpellation de son conseiller spécial en matière de sécurité, François Beya, sont, entre autres, l’une des motivations qui ont poussé Tshisekedi à décliner l’invitation de Bruxelles. Bien plus, président sortant de l’Union africaine, Félix Tshisekedi a, d’une certaine manière, évité de faire ombrage au Sénégalais Macky Sall qui vient de prendre la présidence tournante de l’UA.  A Bruxelles, Félix Tshisekedi sera le grand absent d’un forum censé jeter les nouvelles bases d’une coopération entre l’UE et l’Afrique.

L’Union européenne et l’Afrique se sont donné rendez-vous, les 17 et 18 février 2022, à Bruxelles. C’est une rencontre de grands enjeux, alors qu’un vent d’émancipation souffle dans les anciennes colonies françaises de l’Afrique de l’Ouest. A Bruxelles, où se tient le sommet, l’Afrique se fixe l’ambition d’entrer dans une nouvelle ère de coopération avec l’Union européenne. Une révision qui se fera sans le Président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshisekedi, qui a décidé de se faire représenter par son Premier ministre, Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge.

Après avoir assumé en 2021 la présidence tournante de l’Union africaine, Félix Tshisekedi a décliné l’invitation de Bruxelles. Dans la ville haute, la chronique est bien servie; chacun cherchant à comprendre les raisons cachées de cette absence du Chef de l’Etat.

Bruxelles accueille ces 17 et 18 février le sixième sommet des chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne (UE) et de l’Union africaine (UA). Un rendez-vous plusieurs fois reporté à cause de la situation sanitaire ces derniers mois. Un rendez-vous qui, selon le président français Emmanuel Macron, qui préside actuellement le conseil de l’Union, doit « réviser complètement » la relation entre l’Union et le continent africain.

Et les enjeux de ce sommet sont nombreux comme l’a expliqué le Président sénégalais Macky Sall qui vient de prendre la présidence tournante de l’Union africaine, avec « l’accès aux financements, aux vaccins contre le Covid-19, l’investissement dans les infrastructures, le soutien au secteur privé, la paix et la gouvernance ».

Réunions à tout-va

Dans ce contexte, la tension est palpable dans nombre de capitales après les coups d’Etat au Mali, au Burkina Faso, en Guinée et la tentative de putsch avortée en Guinée Bissau.

A la veille de ce sommet, un « séminaire anti-putsch » a d’ailleurs été organisé à Oyo, la ville natale du président de la République du Congo Denis Sassou Nguesso, conseillé par un de ses vieux amis français installé au pays de longue date. Objectif de ce « séminaire », organisé par un homme au pouvoir depuis 1977 (avec une interruption entre 1992 et 1997) : s’interroger sur les changements expéditifs sur le continent.

Pour cette première prise de langue, le Congolais avait invité ses amis, l’Ougandais Museveni, le Congolais Tshisekedi, le Togolais Gnassingbé et le Bissau-guinéen Embalo (qui a échappé à un coup d’Etat au début de ce mois de février).  Vu la tension dans son pays, ce dernier a décliné l’invitation.

Peu d’informations ont filtré de ce sommet qui doit amener les dirigeants présents à se revoir très rapidement au Togo avant une rencontre avec le président sénégalais Macky Sall pour tenter d’évoquer des pistes pour tenter d’éviter que la contagion ne se poursuive.

Le dilemme ouest-africain

Le temps presse tant la situation paraît instable en Afrique de l’Ouest qui doit faire face à une avancée permanente des islamistes. L’avenir du déploiement français Barkhane au Mali sera sur la table d’un sommet France-Afrique, à la veille du sommet bruxellois.

Tous sont d’accord sur un point, ce retrait français, s’il s’accompagne de la fin de la mission européenne Takuba, fera les affaires des djihadistes déjà présents dans la région, «sans oublier que si les Occidentaux se retirent, cela fera l’affaire des Russes et des mercenaires de Wagner», poursuit un diplomate.

Le Bénin a essuyé des premières offensives djihadistes. La France avec ses drones et l’intervention de ses Mirages aurait fait une quarantaine de morts dans les rangs djihadistes fin de la semaine dernière à la frontière du Bénin, du Burkina Faso et du Niger. «Mais la situation du Togo est aussi très inquiétante », expliquait à La Libre Belgique un ancien ministre africain des Affaires étrangères.

Et en RDC ?

Géographiquement, entre ces deux blocs, il y a aussi la question de la stabilité de la RDC. L’absence du président Tshisekedi à Bruxelles serait justifiée par la situation sécuritaire dans son pays confronté depuis un quart de siècle à un cycle de violences dans l’est. Une situation encore compliquée depuis le 5 février et l’arrestation du conseiller en matière de sécurité François Beya (qui serait toujours détenu dans les bureaux des services de renseignement). Cette arrestation pose toujours autant de questions. La piste d’une tentative de déstabilisation du pouvoir est régulièrement évoquée, mais jusqu’ici aucun élément tangible ne permet de la confirmer. Aucune arrestation n’a été menée. Ce samedi 12 février, 5000 hommes de la garde républicaine ont été mobilisés dans les rues de Kinshasa pour une marche d’endurance qui a traversé la capitale dans le but de tenter d’apaiser les esprits et de montrer qu’il n’y avait pas de tension entre le pouvoir et l’armée.

Le court voyage de Tshisekedi chez son voisin du Congo-Brazzaville a rajouté un peu plus de questions autour de cette arrestation de François Beya que certains voient surtout comme un règlement de comptes entre les clans du premier cercle de pouvoir et plus particulièrement entre François Beya, alias Fantomas, et le conseiller privé Fortunat Biselele, alias « Bifort ». Ce dernier était en effet ostensiblement visible à Oyo, notamment sur les clichés diffusés par la Présidence de la République, lors de la rencontre entre Museveni et Félix Tshisekedi.

Hugo Tamusa avec La Libre Belgique