Le secret a été bien gardé. Dans une ville où tout se sait avec une immédiateté à couper le souffle, où la rumeur se propage à la vitesse de la lumière, que le contenu de la correspondance de la Commission de discipline de l’UDPS adressée au Secrétaire général du parti présidentiel, pourtant datée du 27 juillet, soit resté à l’abri relève du miracle. Il aura fallu sans doute d’une fuite pour que l’affaire soit enfin ébruitée.
Du coup, dans les couloirs de la présidence de la République, des ministères et entreprises publiques, la lettre signée par Joseph…
Lokuli Lokokaki fait l’effet d’une bombe à fragmentation. Elle demande en effet qu’il soit transmis à la Commission de discipline les noms, postnoms, et fonctions occupées à la Présidence de la République, y compris le montant des appointements mensuels des membres du personnel placés là sur la recommandation de Jean-Marc Kabund, président intérimaire du parti aujourd’hui déchu et embastillé. L’action, peut-on lire, va dans le sens de permettre à l’UDPS « de récupérer son du ».
Aux yeux du profane, la démarche allait de soi. Leur protecteur s’étant auto-exclu (selon la phraséologie légendaire de l’UDPS) en déclarant la guerre à la constellation Fatshi, ses disciples auraient dû s’autodéterminer et aider leur gourou à porter sa croix. En clair, ils auraient dû démissionner de leurs fonctions respectives de conseillers à la présidence, de ministres et vice-ministres, de PDG et autres PCA, sans compter des centaines de petites mains placées jusqu’en provinces pour raisons humanitaires. Mais au Congo-Zaïre, la démission ne procède pas d’une culture bien ancrée dans les mœurs politiques. N’est pas Lunda Bululu qui veut.
Dès lors, l’heure est venue de rendre à César ce qui est à César. Ou de carrément tourner casaque pour les plus finauds des Kabundistes qui ne reculeraient devant aucune félonie pour continuer à occuper leur place à la table du festin.
Organisée ou pas, la fuite de la lettre-couperet de Joseph Lokuli ouvre la voie au réaménagement du gouvernement annoncé depuis quelques semaines déjà. C’est par ailleurs l’étape ultime de la déchéance d’un Jean-Marc Kabund dont l’arrivée-surprise à la tête des instances dirigeantes de l’UDPS par la grâce d’Etienne Tshisekedi sur ses derniers jours est longtemps resté en travers de la gorge des tenants d’un tshisekedisme radical porté par une ethnicité à toute épreuve.