Quatre ans pile, après ce qui fut appelé alors une « alternance pacifique et civilisée », marquant l’épilogue de deux décennies du règne cumulé des Kabila père et fils, l’espoir du changement tant vanté s’est rapidement émoussé.
L’opposition, arrivée au pouvoir en ce 24 janvier 2019 dans des conditions troubles – Jean-Yves Le Drian, alors ministre français des Affaires étrangères parlant même de «petits arrangements à l’africaine» – semble, à la longue, le disputer avec frénésie avec les caciques de l’ancien régime sur le terrain de la prédation… et de l’enrichissement rapide. A bien des égards, l’élève a surpassé le maître.
Le «Changement»’ s’ingénie même à manger ses propres enfants. A la veille de la présidentielle, ils chutent de leurs piédestaux au terme de féroces luttes dans une guerre de palais permanente, vite remplacés par de nouveaux arrivants tout aussi pressés de s’engraisser, avec à la bouche la rengaine hypocrite d’œuvrer pour le bonheur d’un peuple qui ne s’en laisse plus conter désormais. Si bien qu’à l’approche de l’heure fatidique du bilan du premier quinquennat de Félix Tshisekedi – qui en brigue un second, la société congolaise est scindée en trois catégories entre lesquelles il n’existe plus aucune passerelle. La cohésion nationale étant reléguée au plan de simple slogan démagogique.
La première est constituée de cercles concentriques qui gravitent autour du sommet de l’Etat. Outre l’armée des conseillers présidentiels omnipotents, des parlementaires qui trouvent du plaisir à dormir en pleins débats, eux-mêmes hautement soporifiques, des ministres convertis en directeurs de campagne, ou encore de la génération spontanée d’affairistes accourus de la «diaspora», tous ont un point commun : une opulence ostentatoire au mépris de la légalité.
La seconde catégorie est celle des laissés-pour-compte. C’est le plus grand nombre, de ceux qui tentent de survivre tant bien que mal dans des cités-dortoirs des villes insalubres, abrutis par le chômage, la drogue et le sexe, privés d’eau et d’électricité.
Enfin, la dernière catégorie est celle des compatriotes jetés sur les routes d’un exil permanent, massacrés, dans l’indifférence générale, ou presque. Si bien qu’ils en viennent à douter de leur appartenance à ce pays qui fut celui de leurs parents.
Comme on le voit, entre le discours officiel volontairement lénifiant et la réalité, il y a un fossé que la classe politique feint de ne pas voir, jusqu’à ce que le couvercle de la marmite de la colère explose. Et dans ce cas, Dieu garde la RDC.