L’heure de vérité a sonné avec l’ouverture, ce lundi 4 novembre 2024 à la Cour de cassation, du procès mettant en cause l’entrepreneur Mike Kasenga et l’ancien Ministre d’Etat en charge du Développement rural, François Rubota. Pour l’instant, une seule personnalité sera absente dans le box des accusés : l’ancien argentier national, Nicolas Kazadi, celui-là même qui a signé la sortie en procédure d’urgence des millions de dollars américains en faveur d’un projet qui s’est avéré finalement être un mort-né.
Le procès du dossier très médiatisé des « Forages» s’ouvre ce lundi 4 novembre 2024 devant la Cour de cassation à Kinshasa. L’affaire, qui mêle des accusations de détournement de fonds publics et de corruption, met en cause deux figures emblématiques de la scène politique et économique du pays : l’entrepreneur Mike Kasenga, promoteur du projet, et François Rubota, ancien Ministre d’État en charge du Développement rural. Ce procès, attendu depuis plusieurs mois, suscite une attention particulière dans l’opinion publique, avide de vérité sur l’usage des deniers publics.
Le projet des « Forages » avait été annoncé il y a plusieurs années comme une initiative d’envergure nationale, destinée à apporter de l’eau potable dans plusieurs zones rurales du pays, souvent négligées et privées d’infrastructures de base. Pour sa réalisation, des millions de dollars US avaient été débloqués en procédure d’urgence, avec l’espoir de transformer le quotidien de millions de Congolais. Cependant, les infrastructures promises n’ont jamais vu le jour. Aucune installation n’a été construite, et les fonds investis semblent s’être volatilisés. Ce fiasco a été rapidement qualifié de «projet mort-né» par la société civile, qui a multiplié les appels à une enquête approfondie.
LES ACTEURS CLES DANS LE BOX DES ACCUSES… OU PRESQUE
À la barre de la Cour de cassation, Mike Kasenga, l’entrepreneur chargé de l’exécution du projet, et François Rubota, ancien Ministre en charge du Développement rural, se retrouvent accusés de détournement de fonds publics, de corruption et de mauvaise gestion. La Cour devra déterminer si ces personnalités ont sciemment organisé ou participé à un système de fraude pour s’enrichir au détriment des populations vulnérables. Les deux accusés se disent cependant victimes de facteurs externes et d’un manque de soutien institutionnel, rejetant toute responsabilité dans l’échec du projet.
Toutefois, un acteur clé manque dans le box des accusés, et son absence suscite de vives réactions. Nicolas Kazadi, l’ancien Ministre des Finances, ne comparaîtra pas dans cette affaire malgré son rôle déterminant. C’est en effet lui qui avait signé la libération en procédure d’urgence des millions de dollars US nécessaires au démarrage du projet. Sa décision d’autoriser ces décaissements exceptionnels, sans garanties suffisantes ni contrôles de suivi, reste l’un des points les plus controversés du dossier. La justice n’a cependant pas retenu de charges directes contre lui pour le moment, un choix qui soulève des questions quant à l’impartialité de l’enquête.
LES ENJEUX D’UN PROCES HISTORIQUE
L’ouverture de ce procès est un moment charnière pour la République Démocratique du Congo, où la corruption et le détournement de fonds publics sont régulièrement pointés du doigt. L’affaire des «Forages» a eu un retentissement particulier en raison de son impact direct sur les populations rurales, qui continuent à souffrir du manque d’accès à l’eau potable. Les défenseurs des droits humains et les représentants de la société civile espèrent que ce procès marquera le début d’une nouvelle ère de transparence et de responsabilité pour les dirigeants et acteurs économiques du pays.
Les avocats de la défense tentent quant à eux de démontrer que Mike Kasenga et François Rubota ont agi dans l’intérêt du pays. Selon eux, leurs clients sont les boucs émissaires d’un système plus vaste de défaillances administratives et institutionnelles. Kasenga affirme que les fonds reçus ont été investis dans les études préliminaires et les équipements nécessaires, mais que des obstacles imprévus ont empêché la concrétisation du projet. Rubota, de son côté, assure que les décisions prises pendant son mandat visaient uniquement à répondre aux besoins pressants des populations, et non à servir des intérêts personnels.
Ce procès est une épreuve pour la justice congolaise, qui est souvent critiquée pour son manque de fermeté face aux affaires de corruption impliquant des personnalités influentes. Les défenseurs de la transparence espèrent qu’un verdict exemplaire pourra restaurer la confiance des citoyens dans les institutions et rappeler aux hauts fonctionnaires l’importance de la responsabilité et de l’intégrité. «Ce procès est une opportunité historique pour prouver que personne n’est au-dessus des lois», a déclaré un activiste de la Société civile, insistant sur la nécessité de briser l’impunité.
VERS UN DENOUEMENT INCERTAIN
Les premiers témoignages, qui sont attendus dans les jours à venir, pourraient apporter des révélations supplémentaires sur l’usage des fonds et les décisions prises en coulisses. Le procès des «Forages» est également l’occasion de poser des questions sur le fonctionnement des institutions et sur les mécanismes de contrôle des fonds publics. Que le verdict de la Cour de cassation soit en faveur ou non des accusés, ce procès laissera une empreinte durable dans la mémoire collective et influencera sans doute la manière dont seront gérés les futurs projets de développement en République Démocratique du Congo.
La suite de l’audience pourrait donc réserver bien des surprises, et les Congolais, témoins attentifs de cette affaire, attendent de la justice qu’elle fasse toute la lumière sur ce scandale qui n’a laissé dans le pays que des promesses non tenues et des espoirs brisés.
Econews
Soyez le premier à commenter