Langage des sourds

Dans la région tourmentée des Grands Lacs, l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) continue de s’engluer dans une crise interminable, à la fois humanitaire et sécuritaire. Les espoirs d’une accalmie durable, portés par l’adhésion expéditive de la RDC à la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC), ont été cruellement douchés. Le processus de Nairobi, censé constituer une plateforme de dialogue et de solutions au conflit, s’est effondré sous le poids des divergences, des calculs stratégiques et des désillusions.

Dans ce contexte, tous les regards se tournent vers Luanda, où le président angolais João Lourenço tente, dans une médiation au bord de l’épuisement, de rapprocher Kinshasa et Kigali. Mais l’optimisme n’est pas de mise : les postures rigides et les discours antagonistes des deux capitales ont transformé ce dialogue en une sorte de langage des sourds. La RDC accuse le Rwanda de soutenir le mouvement rebelle M23, et refuse énergiquement toute négociation directe. De son côté, Kigali exige une reconnaissance de sa version des faits et un dialogue que Kinshasa juge impensable.

Cette dynamique stérile renforce le désordre dans une région où la violence armée, les déplacements massifs de populations et les souffrances humanitaires continuent de prospérer. La communauté internationale semble fatiguée et divisée face à un conflit qui, pour beaucoup, relève autant de la tragédie locale que des luttes d’influence régionales et internationales.

Dans ce chaos, on ne peut que s’interroger : la paix est-elle encore possible dans l’Est de la RDC ? Ou sommes-nous condamnés à assister à une perpétuation du cercle vicieux de violences et de méfiances ?
L’absence d’un véritable leadership collectif dans la région et l’incapacité à transcender les égos nationaux laissent peu de place à l’espoir. Les peuples de la région Est de la RDC, eux, continuent de payer le prix le plus lourd dans un silence qui, lui, ne fait que s’amplifier.

Pour que les processus de paix, à Nairobi comme à Luanda, puissent enfin produire des résultats concrets, il est urgent de changer de paradigme. Cela passe par une volonté politique réelle, un appui international renouvelé et, surtout, une priorisation des souffrances humaines au-dessus des intérêts étatiques. Sinon, le trou noir qui engloutit l’Est de la RDC risque de s’étendre encore, emportant avec lui le peu d’espoir qu’il reste.

Econews

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