Présent récemment au 23e sommet du Marché commun de l’Afrique orientale et australe (COMESA) à Bujumbura, le Président de la République Démocratique du Congo, Félix Tshisekedi, a appelé l’Afrique à exploiter ses ressources pour se développer, encourageant le continent à se libérer de la dépendance aux exportations de matières premières non transformées.
«Pour prospérer, nos économies devraient briser le cycle de dépendance à l’exportation brute de matières premières et s’appliquer à bâtir des chaînes de valeur avec vocation de transformer et enrichir nos ressources ici même, en Afrique. […] C’est cela la clé qui ouvre inéluctablement la voie à la création d’emplois et surtout donne à notre jeunesse les moyens de façonner l’avenir de notre beau et grand continent ».
Cet appel prend sens dans un contexte où les puissances mondiales se disputent les ressources stratégiques africaines. États-Unis, Chine, France et Corée du Sud notamment rivalisent pour sécuriser l’approvisionnement en minéraux clés comme le cobalt, le cuivre ou le manganèse. La transition énergétique, vitale pour la planète, a des exigences auxquelles l’Afrique est en mesure de répondre, à condition de passer de spectatrice à actrice des chaînes de valeur mondiales.
Des accords se multiplient avec les pays africains, mais pour le président congolais, la réponse ne devrait pas venir seulement de partenariats internationaux : elle doit naître d’une dynamique locale et régionale. Le monde a soif de lithium, de cuivre, de minerais rares pour alimenter ses batteries et accélérer la transition vers une économie verte. Des ressources qu’héberge en abondance le continent.
Un rapport du réseau PWYP (Publish What You Pay) estime ainsi que l’Afrique pourrait générer 24 milliards USD supplémentaires par an et 2,3 millions d’emplois en intégrant des segments plus avancés des chaînes de valeur liées aux énergies renouvelables. Perçue comme un des moteurs économiques de l’Afrique en la matière, la RD Congo (60% des réserves de cobalt et 2e producteur de cuivre au monde), se place comme porte-étendard de la volonté de transformation locale des ressources.
Pour concrétiser cette ambition, le pays a déjà signé des accords de partenariat avec l’Union européenne et les USA entre autres. Mais Tshisekedi mise aussi sur une plus grande collaboration africaine : «Voyons l’Afrique comme un réseau de partenaires capables de se protéger mutuellement face aux chocs du marché mondial. Cela nous oblige à revoir notre gestion des ressources, dans un contexte de course effrénée aux matières premières, tout en gardant à l’esprit que le réchauffement climatique reste une menace cruciale à surmonter» Et d’ajouter : «Face aux défis du continent, la République Démocratique du Congo considère l’intégration non seulement comme une priorité, mais aussi comme une des voies essentielles pour sécuriser notre avenir. Notre participation au COMESA repose en effet sur cette vision de solidarité et de coopération».
Avec ses 640 millions d’habitants et un PIB cumulé de plus de 1000 milliards USD, le COMESA représente une force capable de hisser l’Afrique au rang de véritable acteur de la chaîne de valeur mondiale de l’énergie. Les ressources de pays comme la RDC et le Zimbabwe, associées au dynamisme industriel d’économies comme le Kenya et le Rwanda, posent les bases d’une chaîne de valeur régionale.
Mais le défi du financement demeure. Les pays africains restent largement dépendants des bailleurs de fonds étrangers, dont les politiques d’aide au développement s’accompagnent souvent d’agendas économiques différents. Malgré ces obstacles, l’Afrique peut encore revendiquer une place clé dans les révolutions énergétiques et numériques en cours.
À condition de réaffirmer sa souveraineté et de redéfinir ses partenariats, elle pourrait offrir à sa jeunesse les moyens de bâtir un avenir plus prospère, en accord avec les aspirations de tout un continent.
Avec Agence Ecofin