Agression de la RDC : forte pression de Washington sur Kigali

Disposant d’un avantage considérable sur le terrain militaire face aux rebelles du M23, armés et soutenus par le Rwanda – c’est un secret de polichinelle – Kinshasa mène une grande offensive sur le front diplomatique. Après son plaidoyer au Conseil de sécurité des Nations Unies, le chef de la diplomatie congolaise, Christophe Lutundula, a échangé mercredi avec le secrétaire d’Etat américain, Anthony Blinken. A Washington, la voix de Kinshasa est entendue – de plus belle manière d’ailleurs. Devant les preuves évidentes présentées par la délégation congolaise, Washington a reconnu la main noire du Rwanda dans l’aventure militaire du M23, branche rebelle dont se sert Kigali pour déstabiliser la RDC. Dos au mur, Kigali subit désormais une forte pression des Etats-Unis. Visiblement, dans la région des Grands Lacs, la peur a changé de camp. Le président rwandais Paul Kagame est mis à nu et passe pour un frein pour la stabilité de la région.

Kinshasa continue son offensive diplomatique dans le pays de l’Oncle Sam. Après une prestation réussie au Conseil de sécurité des Nations Unies, le chef de la diplomatie congolaise, Christophe Lutundula, s’est entretenu mercredi avec le secrétaire d’Etat américain, Anthony Blinken. C’était l’occasion pour le vice-Premier ministre, ministre des Affaires étrangères de démonter les mensonges et la ruse du Rwanda derrière la rébellion qu’il entretient avec le M23.

Devant Anthony Blinken, Christophe Lutundula est revenu, comme au Conseil de sécurité, sur le drame qui s’abat depuis une vingtaine d’années sur la partie Est de la RDC à cause des penchants belliqueux de ses voisins, principalement le Rwanda, qui continue à bâtir son semblant de stabilité en mettant en place une vaste entreprise de déstabilisation de la RDC.

Pour Christophe Lutundula, il est temps que les Etats-Unis choisissent le bon côté pour permettre à la RDC de rentrer finalement dans un nouveau cycle de la paix. Ce qui, pense-t-il, profitera à la stabilité de toute la région des Grands Lacs.

Fort de la pertinence des arguments présentés par Kinshasa, le secrétaire d’Etat américain s’est montré « très attentif », rapporte-t-on, au plaidoyer des émissaires du Président Félix Tshisekedi.

Kigali dos au mur

Le secrétaire d’Etat Antony Blinken a plaidé pour une solution diplomatique aux tensions croissantes entre le Rwanda et la RDC, accentuant la pression sur Kigali, principalement mis en cause dans l’aventure militaire du M23.

Les Etats-Unis veulent soutenir «la paix et la sécurité et la stabilité dans l’est de la RDC, qui est confrontée à certains défis », a-t-il déclaré à l’ouverture de cette réunion avec son homologue congolais Christophe Lutundula. «Nous voulons vraiment soutenir les importants efforts africains en cours», a-t-il ajouté.

Il a notamment salué les discussions qui se sont tenues en avril entre le gouvernement congolais et des groupes rebelles à Nairobi, au Kenya, dans le cadre d’une nouvelle initiative pour tenter de mettre fin à plus d’un quart de siècle de violence.

Luanda prépare un tête-à-tête Tshisekedi-Kagame

Le président angolais João Lourenço joue aussi les médiateurs, et a affirmé mardi que Kinshasa avait accepté de libérer deux soldats rwandais accusés par l’armée congolaise d’être entrés sur le sol congolais.

Après le dernier passage du Président Tshisekedi à Luanda, suivi des échanges téléphoniques entre João Lourenço et le président Paul Kagame du Rwanda, Luanda s’active déjà pour un tête-à-tête entre les deux présidents en conflit.

Preuve de sa bonne foi, Félix Tshisekedi a accédé à la demande de l’Angola de libérer les militaires rwandais capturés sur le champ opérationnel de l’Est.

Pendant ce temps, à Kinshasa et dans d’autres villes de la RDC, des centaines de personnes continuent à manifester contre le Rwanda, réclamant la rupture des relations avec Kigali.

Offensive de Lutundula au Conseil de sécurité

Christophe Lutundula, qui a remercié le gouvernement américain pour ses efforts, avait participé mardi à une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU lors de laquelle Washington avait exhorté à mieux protéger les civils et à rechercher «une solution diplomatique».

Profitant de la tribune de l’organe de décision des Nations unies, il a rappelé que l’insécurité, les massacres, les pillages systématiques des richesses nationales et les violations des droits de l’homme dans l’est de son pays durent depuis près de 30 ans.  Pendant toutes ces années, l’ONU a été aux côtés de la RDC, son action au cours des 20 dernières années ayant été salutaire et décisive pour éviter le pire et engager le pays sur la voie des réformes institutionnelles. Le ministre a également rappelé que l’ONU a été la garante de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba pour la paix et la coopération de 2013, et qu’elle demeure un partenaire stratégique important pour la restauration de la paix et de la sécurité ainsi que pour le développement.

Le VPM Lutundula a ensuite tenu à informer le Conseil des efforts en cours menés par la RDC pour restaurer la paix et la sécurité dans le pays et dans la région des Grands Lacs. Il a notamment mis l’accent sur l’adhésion de son pays, le 8 avril dernier, à la Communauté d’Afrique de l’Est, afin d’y apporter sa contribution à la lutte commune contre l’insécurité et l’instabilité dans la sous-région. À cet égard, il a indiqué que, le 21 avril, les chefs d’États en conclave à Nairobi ont convenu d’un plan de résolution de la crise sécuritaire à l’Est de la RDC.

Ce plan implique l’Union européenne, l’ONU, la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, ainsi que les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, en tant qu’observateurs. Il a précisé que le processus de paix convenu «tend la main aux groupes armés », tout en s’appuyant fermement sur les principes et la vision du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (PDDRCS). Il a aussi précisé que le désarmement n’est pas optionnel. De ce fait, les groupes armés doivent le faire volontairement ou alors ils seront obligés de le faire sous la contrainte.

Il a affirmé que le volet politique du processus de paix a connu d’importants progrès, marqués notamment par l’organisation de premières consultations en avril à Nairobi avec des représentants de groupes armés et de communautés de l’est de la RDC. Dans les semaines à venir, a-t-il ajouté, ces consultations seront élargies à la société civile, aux organisations de femmes notamment, et elles s’appuieront sur l’expertise des ONG congolaises spécialisées dans la consolidation de la paix. Il a dit qu’en juillet, ces consultations devraient être assorties d’un plan d’action pour l’accompagnement politique et institutionnel du PDDRCS. 

Le VPM Lutundula s’est demandé qui arme le M23 et mobilise des hommes aguerris pour attaquer les troupes onusiennes? Qui soutient cette force négative avec des armes lourdes au moment où le processus de Nairobi prend son envol et que le peuple congolais attend la visite du Pape? Pourquoi, à chaque fois, le Rwanda apparaît-il quand il est question des M23?  Pour le ministre, le M23 et ses parrains ne visent qu’à maintenir la RDC dans l’instabilité et à torpiller les efforts de paix de la Communauté d’Afrique de l’Est. Or, a-t-il martelé, le Chef de l’État et le Gouvernement ainsi que tous les Congolais sont déterminés à défendre l’intégrité territoriale et la souveraineté de leur pays. 

S’adressant à la présidente du Conseil, Christophe Lutundula a exhorté l’organe onusien à assumer ses responsabilités en matière de maintien de la paix, en agissant «vite et efficacement avant qu’il ne soit trop tard». Il a exigé que le M23 dépose les armes et se retire de toutes les localités qu’ils occupent grâce à des soutiens extérieurs. Il a en outre demandé au Conseil de s’impliquer dans la facilitation d’un dialogue «sincère » avec le Rwanda. 

À ce propos, il a souligné que « le dialogue est comme le tango, qu’il ne peut que se danser à deux ». 

Econews