Il y a cinquante ans jour pour jour, le 30 octobre 1974, avait lieu à Kinshasa le Combat du Siècle (Rumble in the jungle, en anglais) au stade du 20 Mai -actuel Tata Raphaël de la Kethule). Face au truculent Mohammed Ali, dansant sur le rythme d' »Ali boma yé », le taciturne George Foreman. Ce dernier n’ira pas au-delà du 8ème round, terrassé d’un KO par l’objecteur de conscience Ali qui avait refusé d’aller combattre au Vietnam, perdant du coup ses titres antérieurs.
La télévision publique zaïroise en était encore à ses balbutiements et la Mondovision elle-même faisait ses premiers pas. Il n’empêche que des milliers de militants du Mouvement populaire de la Révolution (MPR), le parti unique créé sept ans plus tôt, bravèrent la fraîcheur du petit matin, le combat étant diffusé peu avant l’aube, en raison du décalage horaire qui eût permis aux Américains de suivre la confrontation historique, décalage horaire oblige.
Décalé d’un mois pour cause de la blessure de Foreman à l’arcade sourcilière, l’événement connut un mois palpitant avec d’inoubliables prestations d’artistes qui égayèrent les Zaïrois dont les sexagénaires, septuagénaires et octogénaires d’aujourd’hui se souviennent avec une mélancolie vivace. Myriam Makeba, James Brown, BB King, Johnny Pacheco et Celia Cruz marquèrent les esprits et influencèrent durablement la rumba congolaise.Sa
ns conteste, l’organisation remarquable de l’événement, au-delà d’une dimension politique qui fit connaître le pays du Maréchal Mobutu jusqu’aux confins les plus reculés de la planète, ne sera jamais égalée au cours des décennies postérieures.
Jamais un événement de portée africaine ou mondiale organisé au Zaïre (redevenu plus tard la République Démocratique du Congo) n’a atteint la dimension du Combat du Siècle. Avec le recul, c’est à croire qu’à l’époque, la corruption était encore inconnue des dirigeants zaïrois. Aucune rumeur de détournement de fonds alloués à l’organisation ne fut portée à la connaissance du public. Il n’y eut jamais d’empoignades autour de qui aurait la responsabilité de l’hébergement ou la restauration des invités de marque dont presque tous découvraient l’immense pays au cœur de l’Afrique.
Deux générations plus tard, il est difficile d’imaginer que leurs descendants se signaleraient par une gabegie effrénée et un train de vie ostentatoire. Pas la moindre manifestation n’est exempte de scandales de détournements et autres malversations souvent couvertes par leurs bienfaiteurs.
Mobutu Sese Seko était certainement un dictateur, mais il était sorti immensément grandi par la parfaite organisation du «Rumble in the Jungle». Qu’on lui rende au moins cette justice.
Econews
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