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Après sa réunion d’urgence de dimanche, le CS de l’ONU face au défi des paroles sans actes

L’intensification des combats entre l’armée congolaise et le groupe rebelle M23, soutenu par le Rwanda, plonge l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) dans une crise qui inquiète la communauté internationale. Ce dimanche 26 janvier, le Conseil de sécurité des Nations Unies s’est réuni en urgence pour discuter de la situation alarmante, tandis que le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, appelle fermement les forces rwandaises à se retirer du territoire congolais et à cesser leur soutien au M23. Dans un communiqué publié par son porte-parole, Antonio Guterres s’est dit « profondément préoccupé par l’escalade de la violence », condamnant avec une clarté sans précédent le rôle joué par Kigali dans ce conflit. Ses déclarations s’appuient notamment sur un rapport d’experts de l’ONU, qui établit des liens explicites entre le gouvernement rwandais et le M23, une milice responsable de nombreuses exactions et d’une instabilité chronique dans la région.

Dans l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC), le week-end a été marqué par des affrontements d’une intensité exceptionnelle. Samedi, treize soldats sud-africains, malawites et uruguayens, membres des forces régionales et onusiennes en soutien à l’armée congolaise, ont perdu la vie lors d’un accrochage avec les rebelles. Ces pertes humaines, confirmées par des sources onusiennes, soulignent la gravité de la situation sur le terrain, où les forces de maintien de la paix peinent à contenir la menace.

Les populations civiles, premières victimes de cette guerre par procuration, continuent de fuir les zones de combat, exacerbant une crise humanitaire déjà catastrophique. Les organisations internationales alertent sur un risque d’embrasement régional, alors que les tensions entre la RDC et le Rwanda menacent de dégénérer en un conflit ouvert entre États.

C’est dans ces conditions que la réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU, prévue lundi sur les combats dans l’Est de la RDC, a été avancée à dimanche en raison de l’escalade des hostilités, ont confirmé des sources diplomatiques.

La réunion réclamée par Kinshasa, une demande relayée par la France, a eu finalement lieu dimanche, avec l’intervention de la cheffe de la Mission de maintien de la paix de l’ONU en RDC (Monusco), Bintou Keita, et d’autres représentants des pays membres du Conseil de sécurité.

Comme toujours, le Conseil de sécurité s’est rabattu sur ce qu’il affectionne le mieux, alignant des condamnations sans lendemain. France, Etats-Unis, deux membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU avec droit de veto, ont sommé le Rwanda à retirer ses troupes de la RDC. Une vieille rhétorique bien connue de Kinshasa, du reste répercuté dimanche par Antonio Guterres, secrétaire général des Nations Unies.

A noter que Kinshasa avait annoncé samedi rappeler ses diplomates à Kigali après l’intensification des combats dans l’Est de la RDC entre l’armée congolaise et le M23, groupe terroriste soutenu par le Rwanda et son armée.

Après l’échec d’une médiation RDC-Rwanda sous l’égide de l’Angola, le M23 et 3.000 à 4.000 soldats rwandais, selon l’ONU, ont rapidement gagné du terrain ces dernières semaines. Ils encerclent désormais presque complètement la capitale de la province du Nord-Kivu, Goma, qui compte un million d’habitants et au moins autant de déplacés.

Dans une lettre envoyée par le ministère congolais des Affaires étrangères à l’ambassade du Rwanda à Kinshasa, datée de vendredi et transmise samedi soir à la presse par la Présidence de la République, la RDC informait «du rappel des diplomates de l’ambassade de la République Démocratique du Congo à Kigali avec effet immédiat », sans plus de précisions.

Plus tôt dans la journée, l’Union africaine (UA) a exhorté à la «cessation immédiate» des combats et réclamé «la stricte observation du cessez-le-feu convenu entre les parties ».

Dans l’Est de la RDC riche en ressources naturelles, les conflits s’enchaînent depuis plus de trente ans. Une demi-douzaine de cessez-le-feu et trêves ont déjà été décrétés puis rompus dans la région. Le dernier cessez-le-feu avait été signé fin juillet.

L’Union européenne a également appelé le M23 à «arrêter son avancée» et le Rwanda à « se retirer immédiatement» dans une déclaration signée par les 27 pays membres. L’ONU relocalise temporairement son personnel non essentiel de Goma (Nord-Kivu) sans interrompre ses opérations

LA MONUSCO REDUIT SON EFFECTIF A GOMA

Pendant ce temps, sur le terrain des opérations, l’Organisation des Nations Unies a relocalisé temporairement son personnel non essentiel de Goma tels que le personnel administratif et d’autres qui peuvent continuer à accomplir leurs tâches depuis un autre lieu, en réponse à la détérioration de la situation sécuritaire au Nord-Kivu. Cette mesure vise à garantir la sécurité du personnel, tout en maintenant les opérations essentielles de l’ONU dans la province.

«Cette relocalisation n’affecte en rien l’engagement indéfectible des Nations Unies à fournir une aide humanitaire et à protéger les civils au Nord-Kivu. Le personnel essentiel reste sur le terrain pour assurer la continuité des opérations critiques, telles que la distribution de l’aide alimentaire, l’assistance médicale, l’hébergement et la protection des communautés vulnérables», précise un communiqué de la Monusco.

Le communique rappelle que «l’ONU collabore étroitement avec ses partenaires humanitaires et les autorités nationales pour garantir que l’aide vitale parvienne à ceux qui en ont le plus besoin et prévenir toute menace contre les civils. Ainsi, la relocalisation temporaire du personnel sera réévaluée en fonction de l’évolution de la situation sécuritaire, dans l’objectif de restaurer pleinement la présence dès que les conditions le permettront», soulignant, par ailleurs, que «les Nations Unies réaffirment leur engagement profond envers les populations du Nord-Kivu et de la République Démocratique du Congo, renouvelant leur soutien à la paix, à la stabilité et au développement dans la région».

Jeudi, le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, s’était dit «alarmé » par ce regain de violences qui pourraient aggraver « le risque d’une guerre régionale ».

Une communauté internationale naïve face à la crise de l’Est ?

Le langage prudemment calibré du Conseil de sécurité des Nations Unies illustre, pour certains observateurs, une naïveté persistante de la communauté internationale face à l’interminable crise qui déchire l’Est de la RDC. Depuis des décennies, cette région, riche en ressources naturelles mais en proie à des violences constantes, semble abandonnée à des jeux de pouvoir complexes et des intérêts géopolitiques opaques.

Selon une analyse critique, le Rwanda, souvent désigné comme acteur clé dans le soutien au groupe terroriste M23, ne serait en réalité qu’un exécutant au service de puissances plus influentes. Ces «tireurs de ficelles» opéreraient depuis les centres névralgiques du pouvoir mondial : l’ONU à New York, Washington, Bruxelles, Paris ou encore Londres. L’inaction, voire la complicité tacite, de ces grandes capitales alimente les soupçons d’une exploitation délibérée du chaos en RDC, où le contrôle des ressources minières joue un rôle central.

Face à ce tableau sombre, l’avenir de la RDC repose plus que jamais sur la mobilisation de son peuple. « La survie de la RDC comme nation libre et indépendante dépend de sa capacité à revendiquer sa souveraineté et à préserver son intégrité territoriale », estiment certains leaders d’opinion. Pour eux, seule une union sacrée des Congolais, transcendant les divisions ethniques, politiques et sociales, pourra faire barrage aux ingérences étrangères et restaurer une paix durable.

En attendant une véritable prise de conscience internationale, les Congolais sont appelés à prendre leur destin en main, conscients que leur unité constitue le principal rempart contre la désintégration de leur nation.

Hugo Tamusa

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