La réunion du présidium de l’Union sacrée de la Nation (USN) qui était prévue ce mardi 12 novembre n’avait pas rendu publiques ses conclusions à l’heure où nous mettions sous presse. Il devait être la résultante de l’ultimatum lancé à ses alliés au sein de l’Union sacrée de la Nation par Félix Tshisekedi. Ce dernier aurait pressé Kamerhe, Bahati et Bemba à se prononcer en faveur du changement de la Constitution, sous peine de subir les conséquences de leur refus. Des conséquences qui déboucheraient à leur éjection de la plateforme présidentielle et la perte de leurs fonctions assorties de leur versement dans l’opposition. L’on n’en est pas encore là, mais il y a des signes qui ne trompent pas. Le silence absolu des uns et des autres, hormis Christophe Mboso, a fini par installer une gêne croissante entre alliés au pouvoir. Une posture qui contraste ouvertement avec l’activisme de l’UDPS mené par son secrétaire général Augustin Kabuya à sa tête, qui mobilise déjà et exige concomitamment avec la campagne en faveur du changement de la Constitution, la démission, voire la révocation des récalcitrants devenus encombrants.
Dix mois à peine après sa prestation de serment, Félix Tshisekedi affiche déjà une obsession pour l’échéance de 2028. La décision du Chef de l’Etat annoncée il y a quelques semaines à Kisangani de modifier la Constitution est de nature à conduire à un bouleversement notable au sein de la coalition présidentielle. À l’intérieur de l’Union sacrée de la Nation, les principaux leaders demeurent silencieux. Tous ont conscience que la révision constitutionnelle, si elle venait à être concrétisée, elle compromettrait leurs ambitions d’accéder à la magistrature suprême. Une probabilité aux allures de secret de polichinelle.
Des indiscrétions nous parvenues de la présidence de la République ne se gênent guère pour affirmer que la Constitution de la IVe République projetée viendrait mettre fin à la limitation des mandats présidentiels. Un proche du Directeur de cabinet du Chef de l’Etat déclare avec aplomb : «Désormais, c’est le leader du premier parti issu des élections législatives qui accédera à la fonction de Chef de l’État. Nous nous sommes inspirés des modes de scrutin pratiqués en Afrique du Sud et en Angola».
Sous le sceau de l’anonymat, notre source ajoute qu’l est aussi vrai que les autres dispositions à modifier par rapport à la Loi fondamentale actuelle sont d’ordre secondaire, voire cosmétique, hormis la fin de l’exclusivité de la nationalité congolaise et la nomination des gouverneurs de province.
UN LOURD SILENCE EMBARRASSÉ
Les réactions parmi les alliés restent prudentes. À ce jour, ni l’UNC de Vital Kamerhe, ni l’AFDC de Modeste Bahati, ni encore le MLC de Jean-Pierre Bemba ne se sont exprimés officiellement sur la question. Chacun semble hésiter, préférant attendre la dernière minute avant de quitter le navire de la coalition.
Seul Christophe Mboso, deuxième vice-président de l’Assemblée nationale après avoir dirigé la chambre basse du parlement au cours de la législature précédente s’est clairement exprimé en faveur de la démarche de l’UDPS. C’est le vice-ministre de la Justice, Samuel Mbemba (avec lequel il entretiendrait des liens familiaux), qui l’a officiellement annoncé au cours d’un rassemblement politique au Camp Luka dans la commune de Ngaliema.
La pression reste forte sur les « tièdes », d’autant plus que des sources crédibles sont convaincues que le texte de la nouvelle constitution est déjà fin prêt, rédigé dans le plus grand secret. Félix Tshisekedi devrait en clarifier la nature lors du Discours sur l’état d la Nation le 13 décembre prochain.
Par la suite, selon le calendrier établi par la Présidence de la République, une commission constitutionnelle sera mise en place d’ici la fin de l’année. Celle-ci devrait soumettre le projet au gouvernement d’ici février, afin qu’il soit présenté au Bureau de l’Assemblée nationale et inscrit à l’ordre du jour de la session de mars 2025.
DES OBSTACLES DE TAILLE EN VUE
Pour atteindre son objectif, Tshisekedi devrait enjamber deux obstacles de taille. Le premier concerne la loyauté des membres de l’actuelle majorité. Au cas où l’opinion congolaise exprimerait des réticences vis-à-vis du changement, Félix Tshisekedi souhaite s’assurer que les 3/5 des deux chambres voteront en faveur du texte. D’où la nécessité de conserver Kamerhe et Bahati à bord de la barque. Le second obstacle se rapporte à la présidence de l’Assemblée nationale, où Vital Kamerhe constitue un véritable épouvantail pour le projet présidentiel, un authentique caillou dans la chaussure de Tshisekedi.
Le débat interne aux institutions concernant une révision constitutionnelle rappelle des événements similaires survenus il y a une dizaine d’années, lorsque la famille politique au pouvoir de l’époque avait également tenté de modifier la Constitution. À cette époque, Joseph Kabila n’avait pas hésité à écarter des figures telles que Pierre Lumbi et Olivier Kamitatu, ainsi que d’autres membres de sa majorité qui s’opposaient au changement constitutionnel.
Dans les couloirs de la présidence de la République, les opinions sont mitigées sur la manière de traiter le cas des alliés de l’Union sacrée. Un des conseillers affirme qu’«on ne veut pas d’une crise brutale. La sanction au cas où Kamerhe et Bahati refuseraient de se prononcer et de suivre le Chef de l’Etat sera graduelle». Il poursuit : «On doit d’éviter un divorce immédiat». Les conseillers de Félix Tshisekedi examinent actuellement les mesures de pression qui pourraient être mises en place.
L’OPPOSTION S’ORGANISE
Rangée sous la bannière du «Non au changement de la Constitution», une coalition est en voie de prendre forme, réunissant les forces d’opposition qui siègent dans les institutions, dirigées par Moïse Katumbi, et l’opposition non institutionnelle, comprenant le FCC de Joseph Kabila, Lamuka de Martin Fayulu, ainsi que d’autres figures d’opposition de renom telles que Delly Sesanga, Claudel Lubaya, Franck Diongo, Jean-Claude Vuemba et Tokwaulu Aena.
Un meeting est d’ailleurs prévu sur la matière à la mi-décembre à Kinshasa.
Econews
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