La Banque centrale chinoise a abaissé son principal taux directeur de 2% à 1,9%, ce mardi. Par cette action, la Chine espère pouvoir relancer sa croissance qui marque le pas au deuxième trimestre à cause du ralentissement de la consommation mondiale.
La banque centrale chinoise a réduit mardi à la surprise des analystes son taux d’intérêt directeur à court terme, une mesure destinée à soutenir l’activité dans un contexte d’essoufflement de la reprise post-Covid dans la deuxième économie mondiale.
La Chine ne fait pas comme tout le monde. Alors que la plupart des pays tentent de freiner l’inflation débordante en augmentant leurs taux directeurs pour mettre un coup de frein à l’investissement et la consommation, la banque centrale a annoncé, ce mardi, qu’elle allait baisser le taux auquel elle fournit des liquidités à court terme aux banques commerciales (le taux de mise en pension à sept jours) de 2% à 1,9%. Selon un communiqué de l’institut d’émission, la mesure est à effet immédiat. Pour rappel, la dernière baisse de ce taux remontait à août 2022.
Un essoufflement de la reprise inquiétant
Cette décision «traduit l’inquiétude croissante des décideurs politiques quant à la santé de la reprise» en Chine, estime l’analyste Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics. La reprise post-Covid tant espérée après la levée des restrictions sanitaires fin 2022 tend ces dernières semaines à s’essouffler, tandis qu’elle peine à se concrétiser dans certains secteurs.
La Chine a ainsi dévoilé ces derniers jours des indicateurs économiques décevants. L’inflation dans le pays était ainsi quasi nulle en mai, alors que les prix en sortie d’usine connaissaient leur plus fort repli depuis 2016, signe d’une demande atone et d’un environnement compliqué pour les entreprises, selon des chiffres officiels publiés vendredi. Et l’activité manufacturière a connu un repli pour le deuxième mois consécutif. Débarrassée des restrictions sanitaires, la Chine a enregistré au premier trimestre une nette accélération de sa croissance (+4,5% sur un an). Mais la reprise s’essouffle : l’activité manufacturière a ainsi connu en mai un repli pour le deuxième mois consécutif. Le gouvernement chinois a fixé pour cette année un objectif de croissance d’environ 5%, l’un des plus faibles depuis des décennies. D’autant qu’il ne sera «pas facile» à atteindre, de l’aveu même du Premier ministre Li Qiang.
Des exportations ralenties par une faible demande mondiale
Les exportations du géant asiatique, historiquement un levier de croissance pour le pays, se sont pour leur part contractées le mois dernier de 7,5% sur un an après un bref rebond à 8,5% en avril et en mars. D’une manière générale, les exportations chinoises ont été constamment dans le rouge depuis octobre 2022 au moment où la politique dite du «zéro Covid» pénalisait lourdement l’économie du pays.
«La Chine est en partie dépendante de la santé des industries européenne et américaine qui réalisent l’assemblage de leurs produits en Chine», souligne Guillaume Dejean, analyste macro et change pour le groupe financier Convera. «Or l’inflation élevée et la remontée des taux d’intérêt dans ces régions ont sérieusement pénalisé la demande», relevait-il fin mai dans une note.
D’autres incitations à consommer
Pour stimuler l’activité en décourageant l’épargne, les principales banques publiques chinoises ont déjà abaissé la semaine dernière les taux d’une série de produits de dépôt. Des banques commerciales ont depuis suivi le mouvement. Dans ce contexte, certains analystes s’attendent à une baisse jeudi du taux du mécanisme de prêt à moyen terme (MLF) de la banque centrale, très suivi par les marchés.
«Reste à savoir si l’augmentation de l’offre de crédits suffira à stimuler les prêts », prévient Julian Evans-Pritchard, peu optimiste. Selon lui, à défaut d’un plan de relance solide, «l’assouplissement monétaire se traduira par un soutien modeste […] à l’activité économique».
L’Europe continue de monter ses taux
A l’opposé de la Chine, l’occident monte ses taux d’intérêts pour freiner l’activité économique et l’inflation. Au cours des neuf derniers mois, la BCE a procédé à sept hausses de ses taux d’intérêts, soit une hausse cumulée de 3,75 points de pourcentage. Les premiers résultats de cette politique économique sont visibles : reflux du crédit, tassement de la demande. En revanche, la lutte contre l’inflation n’est pas terminée. Alors qu’elle atteignait 10,6% en octobre dernier, l’inflation est redescendue à 6,1% au mois de mai, selon les données d’Eurostat. Toutefois, ces chiffres sont encore supérieurs à l’objectif de 2% de la BCE.
Deux hausses «de plus et de chacune 25 points de base (en juin et en juillet)» devraient donc intervenir «avant de les maintenir inchangés», avance Salomon Fiedler, analyste chez Berenberg. Selon ses dernières prévisions, l’institut datant du mois de mars, la BCE prévoit un retour aux 2% d’inflation «avant le second semestre 2025», soit après 4 ans de forte augmentation des prix.
Avec latribune.fr