Après la dénonciation faite par la République Démocratique du Congo (RDC) qui a récusé officiellement la co-facilitation du Rwanda dans les mécanismes de financement et de préservation de la biodiversité, à la 15ème Conférence des Parties sur la biodiversité (COP 15) qui se tient à Montréal, au Canada, le Rwanda serait exclu de la co-facilitation, selon plusieurs sources.
La position de la RDC face à cette prédation et destruction du voisin aurait poussé les grands décideurs de la communauté internationale à redéfinir leurs relations et diplomatie dans ce cadre envers ce pays destructeur.
En ce temps fort de concertation entre l’Argentine, le Brésil, l’Indonésie, l’Inde et la RDC pour donner un avis commun sur le texte final de la Cop 15 sur la biodiversité, le Rwanda y est exclu.
«Il n’est pas question de négocier sur les mécanismes de financement de la biodiversité avec le Rwanda comme co-facilitateur, étant donné que ce pays détruit la biodiversité en RDC par son agression avérée, à travers le soutien à un mouvement terroriste qui est le M23 », avait déclaré séance tenante la vice-Première ministre congolaise, ministre de l’Environnement et du Développement durable, Eve Bazaïba Masudi, au segment ministériel de cette COP 15.
« La RDC est classée 5ème nation de par sa biodiversité et contribue à l’équilibre climatique mondial par ses services écosystèmiques. Le pays mérite une attention particulière de tous les partenaires au développement », a relevé Mme Bazaïba, avant de fustiger le silence de la communauté internationale face aux agissements du Rwanda.
«De ce fait, il est inconcevable pour la RDC de prendre part à ces négociations en présence du Rwanda», avait-elle soutenu.
Bishop Mfundu (CP)
Biodiversité : la COP15 s’achève sur un accord surprise
La Conférence internationale sur la biodiversité (COP15) a débouché, dans la nuit du dimanche 18 au lundi 19 décembre à Montréal, sur un accord inattendu, jugé relativement ambitieux malgré quelques points décevants. Après un report de deux ans en raison de la pandémie et une délocalisation au Canada, le dernier round des négociations avait pris énormément de retard ces dix derniers jours, avec des centaines de points de désaccord restants.
La présidence chinoise a pris les délégations de court en jouant dimanche le tout pour le tout, posant un premier projet de texte sur la table le matin, puis un second le soir, sur lequel les négociateurs ont été priés de se prononcer sans rouvrir tous les points de débat. La manœuvre était minutieusement préparée.
À l’issue de longues heures de négociations nocturnes, l’accord de Kunming-Montréal (Kunming étant la ville chinoise qui aurait dû accueillir la COP15) a été approuvé par les 195 pays réunis, plus l’Union européenne. « Il n’y a pas de formule magique qui nous permettrait à tous d’être pleinement heureux », a expliqué, un peu après 3 heures du matin, le président de la COP15, le ministre chinois de l’Environnement, Huang Runqiu.
La République démocratique du Congo a réservé un coup d’éclat à la Chine : son refus de l’accord, en pleine séance plénière. Après plusieurs minutes de pause, le ministre chinois est revenu à la tribune et a fait adopter en une poignée de secondes l’ensemble des textes soumis au vote. Le Cameroun a dénoncé un «passage en force», comme d’autres délégués. Il n’en est pas moins que, légalement, en l’absence d’objection formelle, l’accord a été adopté, ce qui a été confirmé quelques minutes plus tard par le secrétariat de la Convention sur la diversité biologique de l’ONU. Les textes contiennent trois grandes décisions, qui sont accompagnées de clauses dynamiques prévoyant des points d’étape réguliers, une première dans ce domaine. Ils sont jugés «historiques » par le ministre français de l’Environnement, Christophe Béchu, ainsi que par son homologue canadien, Steven Guilbeault.
Protéger 30 % de la planète avec 30 milliards par an
Tout d’abord, les signataires s’engagent à protéger 30 % de la planète d’ici à 2030, c’est le fameux objectif « 30 x 30 ». Au cours des négociations, sous la pression de pays craignant de ne pas pouvoir financer l’objectif, l’abaissement à 20 % avait été évoqué, et le maintien d’un objectif à 30 % reste une victoire. Actuellement, 17 % des terres et 8 % des mers sont protégées à divers degrés de contrainte. L’Union européenne, dont la présidence tchèque a négocié avec le soutien d’une dizaine de ministres des États membres présents, a tenu bon sur ce point qu’elle jugeait crucial.
Deuxièmement, les États se sont accordés pour atteindre 30 milliards de dollars par an de flux des pays riches vers les pays du Sud, pour les soutenir dans la protection et la restauration de la biodiversité d’ici à 2030, avec un premier palier à 20 milliards d’ici à 2025, contre un peu moins de 10 milliards en 2022. Ce triplement à terme reste toutefois en deçà des 100 milliards que réclamaient les pays du Sud, premières victimes de la perte de biodiversité causée par l’activité humaine. Mais il dépasse largement les concessions que les pays riches étaient prêts à faire au début des négociations, le 7 décembre. Ces derniers ont été pris de court par le projet déposé par la présidence chinoise. «C’est très bien joué de la part d’un pays émergent», nous confiait un négociateur européen dimanche soir. La mobilisation générale de fonds pour la biodiversité, toutes sources et toutes destinations confondues, doit par ailleurs atteindre 200 milliards par an d’ici 2030.
Stopper les financements néfastes
Troisièmement, les délégations ont réussi à débrouiller en partie le très complexe sujet des rétributions que devront payer les utilisateurs des ressources liées à la biodiversité. Avec ce mécanisme, les laboratoires pharmaceutiques, par exemple, devront abonder un fonds international dédié à la préservation et à la restauration des espaces naturels et des espèces qui y vivent.
Parmi les autres points positifs, les États se sont accordés sur la nécessité d’identifier d’ici à 2025 au moins 500 milliards de dollars par an de financements néfastes à la biodiversité et de les faire cesser par des réformes d’ici à 2030. «La vraie question est là : combien le monde continue-t-il à investir contre la biodiversité? Si l’on ne fait pas cesser ces investissements néfastes, on aura beau mettre des milliards sur la table, cela ne servira à rien », nous confiait un ministre européen dimanche soir.
Les pesticides et l’agroécologie cités
Point cher à la France, le texte mentionne expressément la nécessaire réduction de moitié de l’usage de pesticides, définis non par leur quantité mais par l’évaluation du risque qu’ils présentent, ce qui permet d’accorder une importance plus grande à la lutte contre les néonicotinoïdes. Les États-Unis ont, par exemple, réduit de 40 % la quantité de pesticides utilisés ces dernières années mais ont multiplié par quatre le risque pour la biodiversité en utilisant des produits plus concentrés et plus toxiques, dont les néonicotinoïdes. Le texte est donc armé contre ce type d’astuce.
L’accord contient aussi le terme agro-écologie, concept que la France a défendu face à de grandes nations agricoles, ce qui renforce le message envoyé par ce texte aux acteurs de la production alimentaire pour qu’ils adaptent leurs pratiques.
Des défauts non négligeables
Parmi les déceptions, l’absence de chiffrage des objectifs de préservation des espèces menacées, qui figuraient pourtant dans de premières préversions du texte. De même, la mention explicite que les objectifs devaient être atteints « dans les limites des capacités planétaires », ce qui semble être un élément de bon sens, a été retirée durant les dernières tractations. Les peuples autochtones, excellents défenseurs de la nature sur leurs territoires, se voient confier de modestes pouvoirs et moyens de lutte contre la perte de biodiversité, mais le Canada et d’autres pays ont bloqué des mesures plus ambitieuses afin d’éviter que leur souveraineté puisse être discutée.
L’issue de cette COP15 est une surprise. La plupart des délégations étaient très pessimistes jusqu’à jeudi 15 décembre, jour de l’arrivée des ministres de l’Environnement de nombreux pays et du début des négociations à haut niveau. Jugée défaillante dans les premiers jours d’échanges au point que le pays hôte, le Canada, doive prendre le relais dans de nombreux échanges, la présidence chinoise a dès vendredi imposé son rythme, y compris aux délégations occidentales pourtant rompues aux négociations internationales.
La Chine sort la
tête haute
Dimanche soir, un négociateur européen nous confiait sa surprise d’avoir été ainsi « pris de court », tout en saluant un accord qui « donne des choses à tout le monde », alors que Pékin aurait pu favoriser plus strictement ses propres positions. Symbole du flou qui a régné sur le Palais des congrès, dimanche en fin d’après-midi, un ministre européen nous confiait qu’il espérait encore «faire bouger les lignes» jusqu’à lundi alors que l’accord était presque totalement verrouillé.
Les négociateurs européens redoutaient la journée de lundi, car de nombreux ministres devaient repartir vers Bruxelles, l’UE ayant refusé de décaler le Conseil européen de l’énergie lundi et celui de l’environnement mardi malgré la COP15. Ils n’auront finalement pas eu le loisir de poursuivre les négociations lundi… Grâce au travail acharné des équipes canadiennes et de ses propres négociateurs, la présidence chinoise sort la tête haute de ce rendez-vous international. La COP16 sur la biodiversité doit se tenir en 2024 en Turquie, elle devra identifier et combler les éventuelles failles de la COP15.
Avec Le Point Afrique