En France, tous les indicateurs économiques sont dans le rouge vif. Inflation parmi les plus élevées d’Europe, déficit record… Marc Touati, président d’ACDEFI et chroniqueur pour Capital, prédit le pire pour la France, qui fonce droit vers la récession.
Les statistiques d’activité, d’inflation et de déficit public viennent de sortir en France et la sanction est claire : l’économie hexagonale est proche de la stagnation, voire de la récession, l’inflation y est l’une des plus fortes de la zone euro et le déficit de l’Etat a atteint un nouveau record historique. Certes, comme nous le pressentions, en dépit de l’effondrement de tous ses indicateurs avancés qui laissaient anticiper une baisse d’environ 0,4% du PIB français au troisième trimestre 2023, ce dernier a finalement augmenté de 0,1%.
Une évolution qui n’est évidemment pas mirobolante mais qui tranche avec la réalité intrinsèque de l’économie nationale. Et pour cause : les indices des directeurs d’achat sont en récession depuis cinq mois, l’indice Insee du climat des affaires a fortement régressé depuis trois mois et est aussi dernièrement tombé en zone de récession, l’indice Insee de confiance des ménages est proche de ses planchers historiques, les faillites d’entreprises ont explosé, le chômage augmente…
Mais rien n’y fait, l’Insee continue d’annoncer une hausse du PIB. Encore plus fort, alors que l’indice Insee d’opportunités d’achat est quasiment sur ses plus bas historiques, la consommation des ménages aurait augmenté de 0,7% au troisième trimestre 2023. Etonnant non ? Cependant, comme tout bon tour de magie, celui de l’Insee s’explique très bien par un petit commentaire du même institut qui nous annonce tout simplement que sa méthodologie de mesure de la consommation a été modifiée et que «ce changement conduit à réviser signifi-cativement à la hausse la consommation de produits alimentaires». Magnifique !
Pour autant, on ne peut éviter l’inévitable et tous les artifices de ces derniers trimestres portent en eux les stigmates d’une forte baisse du PIB français qui finira par arriver certainement au cours du quatrième trimestre 2023.
En attendant, les statistiques beaucoup moins «mani-pulables» du déficit de l’Etat français viennent également d’être publiées et la douche est particulièrement glacée. En effet, sur les neuf premiers mois de l’année 2023, celui-ci a atteint un record historique de 186,12 milliards d’euros, soit 39,5 milliards d’euros de plus qu’il y a un an et 11 milliards de plus que le précédent record de 2021 qui intégrait notamment les mesures pharaoniques du «quoi qu’il en coûte» de la pandémie de coronavirus. En outre, n’oublions pas que les comptes de l’Etat de 2023 ont bénéficié d’un «effet inflation» qui a artificiellement gonflé les recettes fiscales, notamment de TVA. C’est dire l’ampleur de l’augmentation des dépenses…
Enfin, pour couronner le tout, les chiffres de l’inflation harmonisée aux normes européennes d’octobre de la zone euro et de l’ensemble de ses membres ont aussi été publiés. Et, sans surprise, la France a conforté sa place de pays de l’Union économique et monétaire affichant la plus forte inflation. Avec une inflation de 4,5%, elle est ainsi devenue numéro 6, loin devant les 3,0% de l’Allemagne, les 2,9% de l’ensemble de la zone euro ou encore le 1,9% de l’Italie, sans parler du -1,7% de la Belgique ou du -1% des Pays-Bas.
Depuis janvier 2022, les prix à la consommation ont augmenté de 11% en France en dépit des boucliers tarifaires, contre 10,4% en Espagne et 8,7% en Belgique, c’est-à-dire des pays qui n’ont pas utilisé de bouclier tarifaire et ont même fortement réduit leur déficit public.
De quoi confirmer, une fois encore, que l’utilisation excessive des dépenses budgétaires et l’explosion de la dette publique ne sont en rien des garanties contre les mauvaises performances économiques. Mais, chut ! Puisqu’on vous dit que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, rendormez-vous !
Marc Touati
Economiste, président du cabinet ACDEFI.