Défis sécuritaires et mise en place des institutions : l’ECC invite Tshisekedi à un dialogue national

Face aux défis politique, sécuritaire, humanitaire et diplomatique qui s’imposent à la République Démocratique du Congo dans un contexte de mise en place de nouvelles instititions issues des élections générales du 20 décembre 2023, l’Eglise Catholique au Congo (ECC) invite le Président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, a initié un «dialogue national» en vue de résoudre les questions de paix, de sécurité et de la gouvernance étatique. C’est ce qui ressort du compte rendu des travaux de la 62ème session ordinaire du Comité exécutif national de l’Eglise du Christ au Congo (ECC), lu lors d’un culte à la Cathédrale du Centenaire.  Intégralité de la déclaration.

Déclaration de la 62e session ordinaire du Comité exécutif national de l’ECC tenu à Kinshasa du 25 au 29 février 2024

Thème : Persévérance et solidarité (Actes 2 : 42 et Apocalypse 3 : 10)

Peuple de Dieu et chers compatriotes,

Nous, Membres du Comité Exécutif National de l’Eglise du Christ au Congo, réunis en 62e Session Ordinaire, à Kinshasa au Centre Mgr Dr SHAUMBA, du 25 au 29 février 2024, conformément aux dispositions des articles 17, 18 et 19 de la Constitution de l’Eglise du Christ au Congo, sous le thème «Persévérance et solidarité», en vue d’examiner la marche de l’Eglise du Christ au Congo ainsi que la situation sociopolitique et sécuritaire du Pays;

– Vu la Constitution du 18 février 2006, telle que modifiée et complétée à ce jour, spécialement les articles 5 et 63;

– Confessant notre Foi chrétienne protestante basée sur l’Autorité des Saintes Ecritures (2 Timothée 1, 7) ;

– Défendant l’indissolubilité de l’Eglise du Christ au Congo dans la proclamation de notre devise «l’Unité dans la diversité» ;

– Considérant la Mission prophétique de l’Eglise du Christ au Congo à la lumière d’Ezéchiel 33, 1-7 ;

– Préoccupés par la recrudescence du cycle des violences et des crimes observés dans les Provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu, de l’Ituri, du Kwango et du Maï-Ndombe;

– Interpellés par la montée des tensions intercommunautaires dans le grand Katanga ainsi que dans l’espace du grand Kasaï;

– Engagés à contribuer à mettre en place des mécanismes de cohésion nationale au terme des élections du 20 décembre 2023;

– Conscients de notre responsabilité éthique à sauvegarder l’immense don divin des forêts et tout l’écosystème congolais ;

– Décidés de lutter contre toute exploitation illicite des ressources naturelles à la base du blanchiment des capitaux, de l’instabilité de la sous-région des Grands-Lacs ainsi que de la commission des crimes de masse dans notre Pays;

Déclarons notre engagement de :

I. De la situation politique, sécuritaire, humanitaire et diplomatique

1) Demander au Chef de l’Etat de s’en tenir à son engagement pris lors de la cérémonie d’investiture du 20 janvier 2024, celui de corriger les erreurs du passé.

2) Demander au Chef de l’Etat d’ouvrir un dialogue national entre fils et filles du Pays en vue de reconstruire la cohésion nationale autour de la cause commune que sont la paix, la sécurité et la gouvernance de notre Pays.

3) Réitérer la demande au Chef de l’Etat de finaliser la procédure de la mise en place des mécanismes de Justice transitionnelle en vue de poursuivre les auteurs nationaux et internationaux des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre ainsi que des crimes économiques commis en RDC.

4) Conscientiser les leaders politiques à dépasser les différends qui lesa opposent entre eux pour permettre à la Nation de survivre face au complot ourdi contre elle et qui pèse sur notre devenir commun.

5) Mobiliser les fidèles protestants et l’ensemble de la population congolaise à s’approprier la lutte contre la balkanisation de notre Pays, et ce, jusqu’au sacrifice suprême.

6) Demander au Conseil de sécurité des Nations Unies de prendre, outre les différentes déclarations d’intention de cessation des hostilités, des mesures coercitives à l’endroit des Pays agresseurs de la RDC.

7) Fustiger avec fermeté l’accord sur les chaînes de valeur durables pour les matières premières conclu entre l’Union Européenne et le Rwanda, dans un contexte où plusieurs rapports internationaux précisent l’implication directe de ce Pays voisin dans le pillage systématique des matières premières au prix des crimes contre l’humanité en RDC.

8) Demander au Gouvernement et aux organismes internationaux de se pencher sur la situation humanitaire des populations déplacées.

9) Réitérer notre soutien moral et spirituel à nos vaillantes Forces Armées de la République Démocratique du Congo.

10) Solliciter de la hiérarchie militaire une stricte application du principe d’un commandement unique dans les zones opérationnelles.

11) Prier et exprimer notre solidarité en faveur de toutes les familles de nos frères et sœurs victimes des atrocités dans les zones de combat.

II. Du processus électoral en cours

1) Saluer le travail professionnel réalisé par la Mission d’Observation Electorale ECC-CENCO, «MOE ECC-CENCO», en sigle, avec l’accompagnement de tous les partenaires techniques et financiers.

2) Exhorter la Cour Constitutionnelle à dire le droit en toute responsabilité dans le traitement des contentieux des élections législatives en vue de proclamer les députés réellement élus par le peuple.

3) Demander aux députés provinciaux d’élire en toute responsabilité les gouverneurs qui apporteront une nouvelle dynamique de développement dans nos provinces. Aussi, le choix des sénateurs doit tenir compte des enjeux géopolitiques et géostratégiques de l’heure.

4) Inviter les élus députés nationaux et provinciaux ainsi que les sénateurs protestants à s’enregistrer auprès de notre Bureau de liaison avec le Parlement et les Assemblées provinciales en vue d’aider la Commission Justice, Paix et Sauvegarde de la Création de l’Eglise du Christ au Congo à réaliser son plan de suivi et évaluation de la production législative, horizon 2024-2029.

III. De la mise en place des institutions et de la situation sociale de la population

1) Exhorter le Chef de l’Etat à nommer un Premier Ministre d’une bonne réputation en matière de leadership managérial à la tête du Gouvernement.

2) Exhorter le Chef de l’Etat à nommer les mandataires des entreprises et services publics en tenant compte de leur probité morale ainsi que de leur expertise particulière en vue de renforcer les capacités organisationnelles et techniques de ces derniers.

3) Demander au Gouvernement de la nouvelle législature de se pencher sur la stabilité du Franc congolais face à la devise étrangère aux fins d’améliorer la vie socio-économique des populations.

4) Demander au Gouvernement de la nouvelle législature de poursuivre les projets à impact visible et d’améliorer les conditions du partenariat avec l’Eglise dans la réalisation desdits projets.

5) Inviter les structures de la Société Civile qui travaillent dans le programme du suivi et évaluation du budget national, de la politique de passation de marchés publics ainsi que de la lutte contre la corruption, à mutualiser les efforts autour du plan opérationnel de l’agenda « contrôle citoyen » qui sera proposé par l’Eglise du Christ au Congo.

6) Demander au Gouvernement de la nouvelle législature de veiller à la mise en œuvre du partenariat avec les organisations de la société civile crédibles, conformément à l’article 37 de la Constitution du 18 février 2006.

7) Encourager le Gouvernement de la nouvelle législature à veiller sur l’applicabilité de la politique de la gratuité de l’enseignement ainsi que celle de la gratuité de la maternité pour éviter des frustrations au sein de la population.

8) Interpeller l’appareil judiciaire à rationaliser l’administration de la justice aux fins d’éviter les différentes sortes de violation des procédures observées depuis quelque temps. De ce fait, nous demandons au Chef de l’Etat, en bon père de famille, de s’impliquer personnellement pour obtenir la libération de certains compatriotes dont l’objet de leur détention ou condamnation revêt un caractère politique.

IV. De la sauvegarde de la création 

1) Réaffirmer notre engagement de Co-présider l’Initiative interreligieuse pour la protection des forêts du bassin du Congo, (IRI-RDC).

2) Appeler tous les pasteurs protestants à intégrer la théologie de la création dans leurs catéchèses et enseignements en vue de sensibiliser la population sur les enjeux climatiques.

3) Demander à toutes les Communautés membres et organismes associés de l’ECC d’identifier le patrimoine forestier auprès de la Commission Justice, Paix et Sauvegarde de la Création en vue de nous permettre de lancer des projets liés à l’environnement.

4) Demander aux institutions de veiller aux intérêts des peuples autochtones lors des attributions des concessions aux investisseurs.

5) Interpeller le Gouvernement de la nouvelle législature à amorcer les travaux de réhabilitation des routes en état de délabrement très avancé. Aussi, qu’elles mettent en place un plan précis de salubrité et d’aménagement du territoire en vue de prévenir des catastrophes naturelles auxquelles la population est constamment exposée.

6) Demander au Gouvernement et autres bailleurs d’appuyer les efforts de l’Eglise du Christ au Congo dans la lutte contre le réchauffement climatique.

7) Demander aux institutions d’enseignement supérieur et universitaire de l’Eglise du Christ au Congo de mettre en place des facultés modernes de sciences de l’environnement.

8) Puisse l’Eternel bénir la République Démocratique du Congo, puisse l’Eternel bénir l’unité de l’Eglise du Christ au Congo.

Fait à Kinshasa, le 3 mars 2024

Rév. Dr André-Gédéon BOKUNDOA- bo-LIKABE

Président National

Rév. Dr Evelyne ABOMFANGA TATA

Modératrice Nationale