Même le parlementaire parmi les plus anonymes a vite fait d’intérioriser, dès son entrée à l’Assemblée nationale, ce sacro-saint principe : «Si vous voulez cacher une vérité au peuple, créez une commission d’enquête». Ceci vaut aussi bien pour les détournements de deniers publics, d’assassinats ciblés d’adversaires politiques, de cas flagrants de népotisme, de vraies-fausses bavures policières ou de massacres de masse par les forces de l’ordre au cours de «manife-stations pacifiques».
D’ordinaire annoncées avec force battage dans tous les médias d’Etat, la multitude de commissions…
d’enquête, de missions d’évaluation de dégâts humains causés par les catastrophes naturelles à répétition et des sites où s’entassent des milliers de familles de déplacés internes chassés de leurs foyers par les razzias des groupes armés, sont rapidement ravalées au second rang par l’opportune survenue de nouvelles affaires qui accaparent toute l’attention et relèguent dans les oubliettes les victimes.
Pendant que l’opinion nationale est encore sous le choc après les événements tragiques de Goma du 30 août, au cours desquels une cinquantaine d’adeptes d’une secte mystico-religieuse sont tombés sous les balles des forces de l’ordre, et alors qu’une délégation gouvernementale s’est transportée sur les lieux, voici qu’est exhumée une affaire de l’empiètement d’une emprise de la chaussée dans l’agrandissement irrégulier d’une propriété appartenant supposément à l’ancien chef de l’Etat Joseph Kabila. Comme de coutume, l’affaire est dès lors montée en épingle, inondant les réseaux sociaux d’informations aussi contradictoires qu’invraisemblables.
Telles des poupées russes, les «affaires» en RD Congo se suivent et s’emboîtent les unes dans les autres jusqu’à former un nœud gordien que les dirigeants se gardent bien de dénouer. Sauf que l’on aurait tort de croire que le peuple dans son ensemble a la mémoire courte.
Des frustrations longtemps accumulées, jointes à une sorte d’indifférence des pouvoirs publics enclins à mettre sur le compte des pertes et profits les tragédies constituent le terreau parfait sur lequel germe et prospère le sentiment de rejet des régimes qui, tôt ou tard, en payent le prix dans les urnes.
La succession des «affaires», les unes aussi sanglantes que d’autres, est de mauvais augure à quatre mois des élections de décembre. Le peuple au nom duquel les candidats prétendent parler conserve dans sa mémoire collective les appels et les cris non entendus par les dirigeants d’hier. Le moment venu, il s’en souviendra.
Econews