Si Kinshasa ne ferme pas la porte à la diplomatie dans l’agression dont il est victime de la part du Rwanda, il n’attend nullement céder au chantage des terroristes du M23. Jeudi soir devant la presse conviée à l’habituel briefing avec le porte-parole du Gouvernement, Patrick Muyaya, le chef de la diplomatie congolaise, le VPM Christophe Lutundula, a indiqué que Kinshasa ne transigera pas sur un point : «Il n’y aura ni brassage, ni mixage, encore moins partage de pouvoir » dans les initiatives de désescalade avec le Rwanda.
Après la tripartite qui a réuni à Luanda, autour du Président angolais, le Congolais Félix Tshisekedi et le Rwandais Paul Kagame, à Kinshasa, l’heure était jeudi à la restitution des travaux devant la presse. Christophe Lutundula Apala, vice-Premier ministre en charge des Affaires étrangères, et Patrick Muyaya, porte-parole du Gouvernement, se sont pliés à cet exercice de redévabilité.
On se rappelle qu’au terme de ce mini-sommet, une feuille de route a été adoptée, avec l’objectif de cessation immédiate de la guerre et le retrait du M23 sur le sol congolais.
«Nous étions en Angola où chacune de deux parties devrait présenter son cahier des charges, ses récriminations, sa vision de la fin de la crise », a indiqué, à ce propos, Christophe Lutundula.
Selon lui, cette feuille de route énumère les objectifs à atteindre, les actions et activités et le délai accordé aux acteurs pour mettre en application les recommandations finales de cette feuille de route.
«Parmi les objectifs poursuivis dans cette feuille de route, il y a la question de réchauffer les relations diplomatiques entre la RDC et le Rwanda, l’instauration d’un climat de confiance entre les Etats de la région et la création de conditions optimales du dialogue, la concertation politique pour résoudre la crise actuelle dans l’Est de la RDC, et la prévention de violations territoriales et la garantie du respect des engagements pris par les États de la CIGRL et la vérification des accusations réciproques de la RDC et du Rwanda », note le chef de la diplomatie congolaise.
La ligne rouge
Alors que la diplomatie s’active, tant bien que mal, à ramener le calme entre Kinshasa et Kigali, le VPM Christophe Lutundula pense que «la confiance est un élément essentiel dans les relations entre États, mais pour le moment, tant que le gouvernement congolais n’est pas convaincu de l’évolution positive des choses, il faut mettre une croix sur la coopération Rwanda-RDC ». Il est d’avis que qu’on devait, pour moins de suspicions de part et d’autre, « créer les conditions nécessaires pour les réfugiés qui sont en Ouganda et au Rwanda. Le Rwanda devrait accepter le retour les éléments de FDLR qui sont en RDC ».
Sur la vérification des accusations réciproques de la RDC et du Rwanda, au terme des discussions de Luanda, les deux gouvernements ont convenu de créer un mécanisme de vérification ad hoc différent des autres mécanismes qui sera dirigé par un officier de la République d’Angola. C’est aussi pour mettre fin à ce jeu de cache-cache.
Rappelons que cette tripartite, supervisée par l’Angola, a permis aux deux parties de baliser la voie pour une solution à la crise qui ronge la partie Est de la RDC.
Au sortir de cette tripartite, le Président de la RDC, Félix-Antoine Tshisekedi, a salué l’intention manifeste d’avancer et de mettre fin à cette crise. Il s’agit, pense-t-il, de rétablir la confiance entre les deux pays et les deux peuples. «Une confiance qui a été rompue alors que tout allait bien dans la voie de la normalisation entre les deux pays », regrette-t-il.
Cette feuille de route ne prévoit pas «une levé de mesure de suspension des accords entre la RDC et le Rwanda », a conclu le VPM à l’Intérieur.
Contrairement aux revendications des terroristes du M23, Christophe Lutundula a indiqué que Kinshasa s’est d’ores et déjà fixé une ligne rouge à ne jamais franchir. «Il n’y aura ni brassage, ni mixage, encore moins partage de pouvoir », a-t-il rassuré. A Patrick Muyaya de faire remarquer que «la négociation n’est ni une faiblesse encore moins une naïveté », promettant que Kinshasa est prêt à toute éventualité pour défendre sa souveraineté.
Tighana Masiala