Elections : mais avec quels projets de société ?

Le mot «Elections» devient un refrain sur toutes les lèvres et les parties en présence sont sur leurs dents. Du moins, à quelques encablures des joutes électorales 2023 en République Démocratique du Congo, que d’aucuns veulent voir naturellement libres, démocratiques et transparentes, décembre 2023 n’étant plus loin.
Plus qu’une demande, c’est plutôt une exigence, laquelle se trouve sous-tendue par une idée, exprimée sous forme de critères que le peuple congolais se fait des dirigeants qu’il lui faudra demain. Après décembre 2023.
Parmi ces critères, quatre taraudent mon esprit, à savoir l’éthique, le professionnalisme, la vision et le nationalisme.
«Chat échaudé craint l’eau froide», dit-on.
En effet, à chaque fois qu’il s’exprime sur son avenir immédiat, le peuple congolais dit avoir marre des dirigeants indélicats, contrebandiers, flibustiers et affameurs du peuple qui pirouettent les pavillons de la politique congolaise. Bref, des personnages dont l’éthique est presqu’inexistante, si pas reléguée au dernier plan.
Sur ce volet, le constat est amer : dans l’arène politique congolaise, les valeurs morales susceptibles de constituer une base éthique sont très rares.
Loin de nous l’idée de remuer notre coutelât dans la plaie, bien d’acteurs politiques, économiques et sociaux congolais ont été surpris affichant des comportements qui frisent la légèreté, l’indécence, la bassesse d’esprit et l’affairisme. Que de dénonciations ou de plaintes qui moisissent dans les placards !
Pourtant, les Congolais ont besoin de voir des dirigeants de demain se servir de l’éthique comme leur boussole qui les guide dans leurs actions politiques et leurs décisions instantanées, en veillant à ce qu’ils traitent le peuple qui les a portés au perchoir dignement et avec respect.
Suit en second lieu le professionnalisme parce qu’il faut définitivement mettre fin à l’amateurisme dans les différentes et multiples articulations de l’Etat. Comme dit encore ce même peuple, le pays se trouvant dans un état de gâchis tel que la plupart de domaines de la vie nationale sont à recommencer, il doit être piloté notamment par des professionnels éprouvés, et non par ceux affichant des comportements qui frisent la méconnaissance des textes règlementant le fonctionnement interne des institutions qu’ils sont appelés à piloter.
Pour cela, ne peuvent être aux commandes de ce pays aux urgences multiples et complexes, que des hommes et des femmes compétents et vertébrés, pour utiliser un terme de chez nous, qui n’ont plus rien à apprendre une fois portés aux charges étatiques, comme nous l’ont démontré certains anciens et actuels dirigeants, mais ceux à pouvoir agir promptement et efficacement, professionnalisme oblige !

Compétence rime avec vision
Nous aurons beau obtenir, en prélude des prochaines années, des dirigeants répondant à ces profils, c’est-à-dire compétents, éminemment responsables dotés de vertus cardinales dont l’éthique, il nous reste, en ce qui nous concerne, d’être fixés sur un autre élément très important sans lequel toutes ces qualités ne sont qu’une simple vue de l’esprit. Cet élément s’appelle la vision.
Dans l’arène politique, la vision donne le sens et la force. Autrement dit, elle fait d’elles (qualités) des outils d’utilité sociale. «On connaît la puissance, disait Horace, aux coups qu’il frappe».
Par la vision, nous entendons, dans le cas d’espèce, le projet de société. En clair, les hommes et les femmes qui sollicitent des voix doivent, dès à présent, dire comment et dans quel but ils ambitionnent de gouverner demain.
Ils doivent donc brandir leurs différents projets de société pour donner l’occasion à l’électorat de les apprécier, d’en débattre avec eux tout au long du cheminement commun vers les élections.
Loin de nous l’idée de faire injure aux futurs dirigeants. Nous rappelons à leur attentions que c’est grâce aux débats sur leurs projets de société que l’opinion sera capable de trancher et savoir qui, dans les intentions, est du côté de la Plèbe et répond le mieux à ses attentes et à ses aspirations et ceux qui sont venus vendre du vent, comme dans la plupart des cas.
Dans un pays multi-linguistique comme la République Démocratique du Congo, la traduction en langues nationales de leurs projets de société serait aussi un atout majeur de façon à «faire accoucher» l’adhésion populaire.
Ne pas les mettre sur la place publique, les dissimuler pour les brandir ex abrupto, la veille, en mettant son électorat devant un fait accompli, consacrera l’escroquerie électorale, l’indécence politique et le machiavélisme puant.
C’est donc à cette condition seulement que le peuple pourra estimer prendre ses dirigeants pour son destin pendant tout le temps que prendra le mandat qu’ils briguent.
Aussi, bien avant les élections, la population aura su qui a réellement l’ambition de travailler pour les intérêts de la République Démocratique du Congo, pour les intérêts du peuple congolais et non pour ceux qui, de loin, se maquillent au quotidien pour saucissonner l’équilibre national et jeter en pâture sa fibre économique. Cela s’appelle nationalisme.
Sur ce dernier point, il ne faudra vraiment pas que le peuple transige car c’est une question de vie ou de mort; de sa vie ou de sa mort.
Willy Kilapi Iwego
Avocat près la Cour