Jean-Pierre Lacroix, secrétaire général adjoint des Nations Unies aux opérations de paix, a lancé un appel pressant à un «cessez-le-feu immédiat» en République Démocratique du Congo (RDC), alors que les combats entre l’armée congolaise et le groupe rebelle M23 atteignent un paroxysme dans l’Est du pays. «L’offensive du M23, même ralentie, menace de plonger toute la région dans une instabilité durable», a-t-il déclaré lors d’une interview exclusive à China Central Television, soulignant le risque d’une «détérioration grave» si les armes ne se taisent pas.
Depuis des mois, le M23 et son allié, l’Alliance du fleuve Congo (AFC), étendent leur emprise sur les provinces du Nord-Kivu et Sud-Kivu, imposant une administration parallèle. Le refus du groupe armé de participer aux pourparlers de paix à Luanda (Angola) a encore aggravé les tensions. Les affrontements ont entraîné des centaines de victimes civiles et forcé des milliers de déplacés à fuir. Malgré cela, la MONUSCO maintient ses opérations de protection : «Chaque jour, des centaines de milliers de civils sont protégés par nos forces», a rappelé Lacroix.
La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) multiplient les médiations, tandis que le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté la résolution 2773 exigeant un retrait des forces étrangères et un arrêt des hostilités. «La priorité est un cessez-le-feu. Tous les acteurs doivent se mobiliser maintenant», a insisté Lacroix, restant néanmoins optimiste sur une issue pacifique. La MONUSCO se dit prête à surveiller tout accord et à soutenir les négociations.
GOMA : L’ECONOMIE ASPHYXIEE
Dans un autre registre, à Goma, épicentre de la crise, une catastrophe financière sans précédent se superpose au chaos sécuritaire. La fermeture des banques, décidée pour des raisons de sécurité après la prise de la ville par l’AFC/M23 il y a deux mois, a paralysé l’économie locale.
«Trouver de la nourriture est un combat quotidien», a témoigné à Euronews Furaha Pendeza, mère de six enfants, incapable d’accéder à ses économies. Les rues désertes et les commerces fermés illustrent l’ampleur du désastre.
Face au manque de liquidités, des habitants se ruent à Gisenyi, au Rwanda voisin, pour retirer de l’argent. «Les banques ici sont fermées, alors je traverse la frontière pour survivre», explique Eunice Bieka, résidente de Goma. Les institutions financières locales attendent un feu vert de Kinshasa pour rouvrir, laissant la population dans une précarité extrême.
Les témoignages se succèdent pour dépeindre une réalité insoutenable. «Nous travaillons, mais sans argent, tout s’effondre», résume Amani Chirimwami, habitant de Goma. Aline Safari, commerçante, alerte : «Sans banques, nos activités meurent. Nous supplions les autorités d’agir.»
Alors que la MONUSCO tente de contenir la crise sécuritaire, l’effondrement économique de Goma rappelle cruellement le coût humain des conflits prolongés. L’avenir de la région dépendra de la capacité des acteurs locaux et internationaux à conjuguer désescalade militaire et solutions durables pour les civils, premières victimes d’une guerre sans fin.
Francis N.