Après plusieurs mois d’application dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, l’état de siège en République Démocratique du Congo (RDC) pourrait bientôt connaître un assouplissement. Annoncée par le gouvernement, cette évolution survient dans un contexte de guerre incessante et de violences armées alimentées par des groupes comme les ADF et les milices locales, notamment le CODECO et ZAIRE, soutenues par des acteurs extérieurs, dont le Rwanda.
Une mission d’évaluation sur le terrain
La nouvelle a été communiquée par Jacquemin Shabani Lukoo Bihango, Vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, lors d’un point de presse co-animé le dimanche 24 novembre avec Patrick Muyaya Katembwe, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement. Le ministre de l’Intérieur revenait d’une mission d’évaluation menée aux côtés de la Première ministre, Judith Suminwa Tuluka, dans les provinces concernées par l’état de siège.
Ce voyage avait pour but d’évaluer la situation sécuritaire sur le terrain et de répondre aux recommandations formulées lors de précédentes évaluations, notamment après une table ronde organisée par le Président de la République en 2023. Selon Jacquemin Shabani, ces provinces sont toujours en zone de guerre, en particulier le Nord-Kivu, où les ADF continuent de semer la terreur. L’objectif de la mission était de fournir une évaluation détaillée qui permettra de proposer des ajustements à la gestion de l’état de siège.
Des mesures d’allègement en préparation
Un assouplissement des mesures pourrait intervenir dans les jours à venir, suite à un rapport détaillé que la Première ministre soumettra au Président de la République. Ce dernier prendra ensuite les décisions nécessaires pour alléger les restrictions, en tenant compte des réalités spécifiques de chaque province et territoire touché par l’état de siège.
« Une réunion sera bientôt convoquée à Kinshasa pour compiler les informations nécessaires », a précisé le ministre de l’Intérieur. « Cela aboutira à un rapport détaillé que la Première ministre transmettra au Président, qui décidera des ajustements à apporter selon les provinces concernées. »
La question de la sécurité et des « kuluna »
Lors du briefing, Jacquemin Shabani a également abordé d’autres préoccupations sécuritaires, notamment la lutte contre les bandes criminelles appelées « kuluna ». Le ministre a souligné que son cabinet et la police nationale sont engagés dans une série d’opérations quotidiennes pour lutter contre ces groupes de bandits, via des bouclages et des arrestations. Un programme d’associations avec les populations locales sera mis en place pour encourager la participation citoyenne dans la sécurisation des quartiers et villages.
Par ailleurs, le ministre de l’Intérieur a évoqué la mise en place de numéros verts pour faciliter les échanges entre la population et la police en cas d’urgence. Ces numéros, qui seront largement diffusés, permettront une meilleure réactivité face aux crises sécuritaires.
L’état de siège et la révision constitutionnelle : des sujets distincts
S’il est question d’éventuelles réformes, Jacquemin Shabani a tenu à préciser que l’évaluation de l’état de siège n’a aucun lien direct avec les discussions autour d’une révision constitutionnelle. La révision de la Constitution, qui inclut des changements dans le système électoral et la décentralisation, est un sujet indépendant de la situation sécuritaire actuelle. « Il est déconseillé de gérer la nation sur la base de spéculations », a affirmé le ministre, précisant que les avancées sécuritaires dans l’Ituri et le Nord-Kivu témoignent des efforts du gouvernement pour sécuriser les populations et rétablir une vie constitutionnelle normale dans ces zones.
En conclusion, si l’état de siège a permis des progrès dans la lutte contre les groupes armés, la situation reste fragile et le gouvernement se prépare à ajuster ses stratégies pour mieux répondre aux besoins des populations et renforcer la stabilité dans l’est du pays.
Tighana MASIALA