Extension du bloc des BRICS : les Etats-Unis ne voient pas de «rivaux géopolitiques»

Les Etats-Unis ont minimisé jeudi l’annonce de l’expansion annoncée à 11 membres du bloc des pays émergents dits Brics, affirmant qu’ils continueraient à collaborer avec leurs partenaires à travers le monde.
Les Etats-Unis jouent l’indifférence après l’annonce, lors du 15e sommet des BRICS qui s’est achevé jeudi en Afrique du Sud, de l’arrivée de six nouveaux pays membres au sein du groupement. Le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine, et l’Afrique du Sud seront rejoints, par l’Iran, l’Argentine, l’Ethiopie, l’Arabie saoudite, l’Egypte, les Emirats arabes unis dès janvier 2024. On trouve donc dans cette liste des pays surveillés par les Etats-Unis. Ainsi, l’Iran, soumis à des sanctions financières en raison de son programme nucléaire militaire, pourrait retrouver via les BRICS des débouchés pour sa production pétrolière et gazière. Ce qui ne semble guère inquiéter Washington.
«Les Etats-Unis réaffirment leur conviction que les pays sont libres de choisir leurs partenaires et les groupements auxquels ils s’associent», a déclaré un porte-parole du département d’Etat. «Nous continuerons de travailler avec nos partenaires et alliés sous des formes bilatérales, régionales, et multilatérales afin de renforcer notre prospérité partagée et de maintenir la paix et la sécurité mondiales ».
Juste après cette annonce, les Etats-Unis ont déjà pu affirmer ne pas voir dans les BRICS de futurs «rivaux géopolitiques».
Washington tourné vers le sommet du G20
Le conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden, Jake Sullivan, a évoqué le sommet du G20 ainsi que le soutien à l’Ukraine lors d’une réunion à la Maison Blanche jeudi avec ses homologues allemand, britannique, français, et italien. Les puissances occidentales souhaitent des «résultats forts » à New Delhi qui «démontreront le rôle du G20 en tant que forum principal de coopération économique, menant un programme positif et ambitieux pour les pays émergents et en voie de développement», a déclaré la Maison Blanche dans un communiqué.
Cette indifférence contraste avec l’enthousiasme des pays qui s’apprêtent à rejoindre les BRICS et de ceux qui vont les accueillir. Le président chinois Xi Jinping a ainsi salué «un élargissement historique». Poids lourd économique du bloc, Pékin était favorable à cette expansion. «Le monde est en train de connaître une transformation», a commenté le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, affirmant que les Brics s’ouvriront encore à d’autres membres à l’avenir, évoquant notamment l’Angola et le Mozambique.
Téhéran a salué «un succès stratégique pour la politique étrangère» du pays. Le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a évoqué «un moment fort » pour la nation africaine tandis que l’Egypte s’est dite «impatiente (…) de faire entendre la voix des pays du Sud ». Le président émirati Mohammed ben Zayed s’est félicité de l’adhésion de son pays qui « respecte la vision des dirigeants des BRICS». Enfin, plus nuancé, le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal bin Farhan, a dit «apprécier l’invitation » mais attendre encore des précisions sur «la nature de l’adhésion». Une entrée du pays pétrolier irait bien au-delà du symbole. Le prince héritier Mohammed ben Salman, le premier exportateur mondial de pétrole, a ces dernières années multiplié les prises de distance à l’égard des Etats-Unis, mettant à mal une relation historique.

Rapprochement avec Pékin et Moscou… ou partenariat commercial avec les Etats-Unis
Peu d’informations ont filtré sur les discussions autour du choix stratégique des nouveaux entrants. Les tractations ont été menées à huis clos lors d’une session plénière et de rencontres bilatérales. Selon les spécialistes, l’Inde restait méfiante vis-à-vis des ambitions de son rival régional chinois. Et le Brésil craignait que son influence ne soit diluée dans un groupe élargi. «Les différents pays n’avaient pas la même idée de l’expansion au départ », a expliqué Li Kexin de la délégation chinoise, devant la presse en marge du sommet. «Les discussions ont été assez intenses et ne se sont pas déroulées sans problèmes», a déclaré le ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, lors d’une conférence de presse distincte.
Alliage hétéroclite, les BRICS ont en commun leur revendication d’un équilibre mondial plus inclusif, en particulier au regard de l’influence des Etats-Unis et de l’Union européenne. Selon les observateurs, les membres du groupe marchent sur une bande étroite entre proximité avec Pékin et Moscou, et risque d’éloignement d’un partenaire commercial majeur comme les Etats-Unis.
Avec latribune.fr