De retour le week-end d’un séjour de travail de 48 heures auprès de son homologue du Congo/Brazzaville, Denis Sassou Nguesso, le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, s’est montré inflexible face à l’appui vraisemblable du Rwanda aux rebelles du M23. A Kinshasa, le Président de la République est prêt à déployer tous les moyens nécessaires pour mettre fin à l’aventure militaire du M23. Si, entre-temps, Kinshasa ne ferme pas la porte à une solution diplomatique, Félix Tshisekedi a tenu à préciser que son attitude n’est pas le signe d’une quelconque faiblesse. Bien au contraire. « Le fait de vouloir la paix, la fraternité et la solidarité n’est pas une faiblesse», a soutenu Félix Tshisekedi, rappelant sans détours que « cela ne doit pas constituer une occasion pour des voisins de venir nous provoquer».
Sur les collines du Nord-Kivu, aux encablures de la frontière avec le Rwanda, de violents combats ont opposé les Forces armées de la RDC (FARDC) aux rebelles du M23. Selon le porte-parole du gouverneur-militaire de la province du Nord-Kivu, « le bilan du côté FARDC est de deux militaires tués et cinq blessés ».
Se refusant à citer nommément le Rwanda – son appui aux rebelles du M23 étant un secret de polichinelle – le général de brigade Sylvain Ekenge Bomusa note, dans une communication officielle des FARDC, que «l’usage des canons à longue portée témoigne du soutien que le M23 bénéficie de son allié naturel», en l’occurrence le Rwanda.
Pendant ce temps, à Kinshasa, le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, est allé le week-end à la rencontre à Oyo du président Denis Sassou Nguesso. Peu avant son retour dimanche, le président de la République a répondu aux questions de la presse, dénonçant d’un ton ferme l’influence négative du Rwanda dans l’instabilité de la partie Est de la RDC.
«Aucun doute » sur la main noire du Rwanda
Le Président Félix Tshisekedi a affirmé dimanche n’avoir «aucun doute» sur le soutien du Rwanda à une rébellion venue «agresser» son pays, tout en répétant son souhait d’entretenir des relations apaisées avec ses voisins. La nouvelle crise congolo-rwandaise, provoquée par la résurgence dans l’Est de la RDC de l’ancienne rébellion tutsi du M23 (Mouvement du 23 mars), était au menu de discussions ce week-end entre M. Tshisekedi et son homologue et voisin congolais Denis Sassou Nguesso dans le fief de celui-ci à Oyo, à quelque 400 km au nord de Brazzaville.
Kinshasa accuse le Rwanda de soutenir le M23, que de violents combats ont opposé fin mai à l’armée de RDC. Kigali dément, mais en représailles, Kinshasa a suspendu les vols sur son territoire de la compagnie RwandAir et convoqué l’ambassadeur du Rwanda pour lui notifier une «mise en garde sévère».
Le président Tshisekedi n’avait pas encore évoqué publiquement cette crise.
«J’ai toujours soutenu qu’il fallait plutôt construire des ponts que construire des murs», a déclaré Félix Tshisekedi peu avant de quitter Oyo. «Malheureusement, aujourd’hui nous en sommes là où nous sommes», a-t-il regretté.
«Le fait de vouloir la paix, la fraternité et la solidarité n’est pas une faiblesse», a-t-il soutenu. «Cela ne doit pas constituer une occasion pour des voisins de venir nous provoquer ».
«J’espère que le Rwanda a retenu cette leçon parce que, aujourd’hui, c’est clair, il n’y a pas de doute, le Rwanda a soutenu le M23 pour venir agresser la RDC », a poursuivi Félix Tshisekedi.
Le Président de la République a rappelé que ces rebelles avaient été vaincus, «totalement défaits», en 2013 par l’armée congolaise et «leur arsenal confisqué».
«Si aujourd’hui ils ont repris du poil de la bête, ça veut dire qu’ils sont partis de quelque part, (ont été) armés par quelque part», a-t-il conclu.
Le président Sassou Nguesso s’est, de son côté, déclaré «confiant» quant à la résolution de cette crise. «Je pense que nous allons rapidement surmonter ces difficultés et ramener la paix à travers le dialogue», a-t-il déclaré.
A Kigali, on tente cependant de se dédouaner. Dans un entretien exclusif avec la VOA (La Voix de l’Amérique), l’ambassadeur du Rwanda en RDC, Vincent Karega, a reconnu que les relations entre Kinshasa et Kigali sont «turbulentes», jugeant «infondées» les allégations selon lesquelles Kigali soutient les rebelles du M23 qui opèrent dans l’Est de la RDC.
Vers la création d’une force régionale de l’EAC
Alors que le Conseil de sécurité des Nations Unies a apporté aux pourparlers de Nairobi (Kenya), engagé sous la médiation du président Uhuru Kenyatta, les chefs d’Etats-majors des forces de défense de la Communauté des États d’Afrique de l’Est (EAC), réunis les 6 et 7 juin 2022 à Goma (province du Nord-Kivu) ont levé l’option de créer incessamment une force régionale chargée d’éradiquer les forces négatives dans l’Est de la RDC. Cette force régionale sera chargée de contenir, vaincre et éradiquer les forces négatives qui écument la partie Est de la RDC.
Dans un communiqué final de cette réunion, le général de bridage Sylvain Ekenge Bomusa a rappelé que cette réunion, convoquée par le général d’armée Célestin Mbala Munsense, chef d’Etat-major général des FARDC, avait pour but «le passage en revue de la situation sécuritaire dans la partie Est de la République Démocratique du Congo et l’examen du rapport des travaux des experts réunis dernièrement à Goma, du 4 au 6 juin 2022».
Cette réunion faisait suite au dernier conclave des chefs d’État de l’EAC sur la RDC, tenu en avril dernier à Nairobi, au Kenya.
Selon le général Ekenge, les recommandations issues de cette réunion de Goma seront «consolidées lors de prochaines assises des experts et des chefs des forces des défenses, qui auront lieu du 15 au 19 juin 2022 à Nairobi au Kenya; avant leur validation par les chefs d’État de la communauté d’Afrique de l’Est».
Cette réunion de Goma a été présidée par le chef des forces de défense du Kenya, le général Robert Kibocthi.
Francis M.