Gouvernement et Parlement en campagne dès le 19 novembre : bientôt un vide dans l’animation institutionnelle !

La République Démocratique du Congo (RDC) se trouve face à une situation délicate alors que ministres, députés nationaux et sénateurs se lancent dans la campagne électorale dès le 19 novembre 2023. Cette mobilisation politique laisse un vide au niveau de l’animation des institutions, amputées de leurs animateurs habituels. La question qui se pose alors est la suivante : qui va assurer la gestion des affaires de l’État pendant cette période cruciale ? Voici les possibles simulations.
Le Parlement congolais (Assemblée nationale et Sénat) vit désormais ses derniers jours. La troisième législature de la Troisième République ferme ses portes le 19 novembre prochain, inaugurant de fait le lancement de la campagne électorale qui pourtant n’a pas attendu cette échéance. Et pour ne pas être en reste, les principaux animateurs des institutions, dont le gouvernement et leurs appendices des entreprises du Portefeuille de l’Etat se sont depuis belle lurette lancés à corps perdu dans la course aux suffrages dans «leurs fiefs» respectifs. Notables autoproclamés de différents circonscriptions électorales dans les 26 provinces dont la plupart résident dans la capitale sont en instance de déserter celle-ci au moins jusqu’à la date supposée des élections fixée au 20 décembre prochain. D’où la question : qui restera diriger encore le pays, en l’absence de ceux qui sont sensés en assurer la gouvernance ?
Les dispositions de l’article 10 de la loi électorale n° 22-029 du 29 juin 2022 sont formelles : À l’exception des membres du gouvernement en fonction, tous les mandataires des entreprises publiques qui auront exprimé leur volonté de briguer un mandat électif sont réputés démissionnaires dès la date de la confirmation de leur candidature auprès de la centrale électorale. Pour la plupart membres du «parti présidentiel», l’UDPS, il est de notoriété publique que dans leur quasi-totalité, ils ont formé le projet de briguer des sièges à l’Assemblée nationale dans le dessein maintes fois exprimé d’offrir à leur champion, le chef de l’Etat sortant, «une majorité confortable» dans l’Assemblée nationale qui sera issue des législatives du 20 décembre 2023. Plus d’un mois pourtant après la publication des listes définitives des candidats aux législatives nationales et provinciales, il ressort qu’aucun des concernés n’a rendu le tablier, continuant à «gérer» les entreprises publiques hors du cadre légal.

MINISTRES ET VICE-MINISTRES NON CONCERNÉS (MUYAYA)
Une disposition qui ne s’applique pas aux membres du gouvernement, qui auront toute latitude de battre campagne tout en assurant la conduite des affaires publiques. Ceci a été confirmé par le ministre de la Communication Patrick Muyaya lors du briefing de presse tenu le 2 novembre 2023 dans les installations de la radiotélévision nationale.
Selon le jeune ministre, les membres de l’Exécutif national seront en mesure de ménager leur emploi de temps entre leur campagne et les affaires d’Etat. Ceci comptant bien entendu pour les ministres-candidats se présentant dans les quatre circonscriptions électorales que compte la ville-province de Kinshasa, sans que l’on sache dans quelle mesure ceux qui auront fait le déplacement de leurs «fiefs» en provinces seront connectés aux réalités de leurs ministères respectifs.
A titre d’illustration, le premier ministre Sama Lukonde lui-même brigue un siège de député dans la circonscription de Kasenga (Haut-Katanga); le ministre des Affaires étrangères Christophe Lutundula à Katakokombe; Jean-Lucien Busa à Budjala (Tshuapa); Julien Paluku de l’Industrie à Beni; Muhindo Nzangi à Butembo (Nord-Kivu); Eve Bazaiba (Environnement) à Basoko (Tshopo); Jean-Pierre Lihau (Fonction Publique) à Lisala; Nicolas Kazadi (Finances) à Miabi (Kasaï Oriental); Aimé Boji (Budget) à Bukavu, etc. La liste n’est pas exhaustive.
Il est important de relever que certains de ces candidats briguent d’un mandat (législatives nationale et provinciale) dans plus d’une circonscription électorale selon des affinités connues d’eux seuls.

USAGE ABUSIF DES MOYENS DE L’ETAT
Le vide institutionnel qui pointe à l’horizon risque en plus de s’accentuer avec les immanquables déplacements du Président de la République qui a promis de sillonner les 26 provinces à la quête d’un second mandat auprès des électeurs.
Si le chef de l’Etat n’est pas explicitement concerné par sa mise en congé, la loi disposant que «le président sortant reste en fonction jusqu’à la prise en fonction de son successeur élu», il n’en est pas de même des membres du Gouvernement qui bénéficient de la modification apportée à la loi électorale de 2006 qui exigeait que les membres des Exécutifs aux niveaux national et provincial ainsi que les mandataires publics se démettent le temps de la campagne électorale.
La vraie raison étant que les uns et les autres ne battent campagne avec les moyens de l’Etat, prenant un avantage manifeste sur les candidats de l’Opposition, et faussant par le fait même l’équité dans la compétition.

Simulations possibles
A tout prendre, la campagne électorale est un moment crucial pour la démocratie, où les représentants politiques cherchent à convaincre les citoyens de leur vision et de leurs projets pour l’avenir du pays. Cependant, cette mobilisation peut également poser des défis en termes de continuité de la gouvernance et de gestion des affaires publiques.
La gestion de la République Démocratique du Congo pendant la campagne électorale nécessite une approche réfléchie et stratégique.
Voici quelques points à considérer pour assurer une transition fluide et efficace pendant cette période :

Nomination de Gouvernement intérimaire. Il est essentiel de nommer un gouvernement intérimaire ou une équipe de gestion transitoire pour assurer la continuité des affaires courantes. Cette équipe devrait être composée de membres compétents et expérimentés capables de prendre des décisions éclairées et de maintenir la stabilité politique et économique du pays.

Renforcement des institutions administratives. Les institutions administratives et les organes gouvernementaux doivent être renforcés pour assurer une gestion efficace pendant la période électorale. Des mesures doivent être prises pour garantir que les services publics essentiels continuent de fonctionner sans interruption.

Collaboration entre les acteurs politiques. Il est crucial que les acteurs politiques collaborent pour garantir la stabilité et la sécurité pendant la campagne électorale. Un dialogue ouvert et constructif entre les différents partis politiques est nécessaire pour éviter toute perturbation majeure dans la gouvernance du pays.

Engagement de la Société civile et des Organisations internationales. La Société civile et les Organisations internationales peuvent jouer un rôle crucial en surveillant la gestion transitoire, en promouvant la transparence et en veillant à ce que les principes démocratiques soient respectés pendant la campagne électorale.
En conclusion, la gestion de la République Démocratique du Congo pendant la campagne électorale nécessite une approche équilibrée, axée sur la continuité, la stabilité et la transparence. Il est impératif que les acteurs politiques, les institutions administratives et la Société civile travaillent ensemble pour assurer une transition fluide et une gouvernance responsable pendant cette période cruciale qui ouvre la quatrième mandature.

Econews