Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a rencontré mercredi 21 décembre son homologue américain à Washington, avant de prononcer un discours devant le Congrès. Joe Biden lui a promis d’aider l’Ukraine «aussi longtemps qu’il le faudra».
Dès le début de l’agression russe, le 24 février, les États-Unis avaient proposé à Zelensky d’organiser sa fuite de Kiev pour lui offrir l’asile outre-Atlantique. Presque dix mois plus tard, le scénario est bien différent : s’érigeant en emblème incontestable de la résistance de son pays, l’ancien humoriste a été accueilli en héros aux États-Unis».
Quittant pour la première fois son pays depuis le début de l’invasion russe, M. Zelensky est arrivé dans la matinée de mercredi à Washington, avant d’être reçu à 14 heures (heure locale) à la Maison-Blanche par Joe et Jill Biden. Les discussions à huis clos entre les deux chefs d’État ont été largement consacrées à l’aide américaine, militaire et humanitaire..
Accueilli par une ovation des membres de la Chambre des représentants et du Sénat, le président ukrainien, vêtu de sa traditionnelle tenue kaki, en anglais et avec la plus grande solennité, a dit: «Contrairement aux prédictions les plus funestes, l’Ukraine n’est pas tombée. L’Ukraine est vivante et combative».
«Votre argent n’est pas de la charité» mais un moyen de défendre «la démocratie et la sécurité dans le monde», a déclaré le président ukrainien mercredi dans son adresse solennelle aux parlementaires américains. Le président Joe Biden a assuré le dirigeant du pays assiégé que les Etats-Unis soutiendraient l’Ukraine «aussi longtemps qu’il le faudra».
Une assemblée comble, des applaudissements debout, des acclamations. Le président Zelensky a fait forte impression au Congrès des Etats-Unis mercredi, pour sa première sortie d’Ukraine en 300 jours de guerre. Venu chercher le soutien financier et militaire des Etats-Unis pour repousser l’envahisseur russe, il a été le héros du jour à la Maison-Blanche, où le président Biden lui a promis des missiles Patriot, puis au Congrès, devant lequel il a prononcé une adresse solennelle.
A Washington, Volodymyr Zelensky est apparu en sweat-shirt kaki, sans cravate, s’exprimant dans un anglais maladroit et ému. L’opération de communication a été conçue conjointement avec la Maison-Blanche pour remobiliser l’opinion américaine et renforcer les élus qui veulent financer la résistance ukrainienne – les démocrates et une partie de l’opposition. A en juger par l’enthousiasme des élus, l’objectif a été atteint.
«L’Ukraine ne se rendra jamais »
Mercredi soir devant les députés, les sénateurs et la vice-présidente Kamala Harris, le chef d’Etat européen a rappelé le courage de la résistance ukrainienne. En dépit d’un rapport de force défavorable en termes d’artillerie, de munitions et de missiles, «nos forces de défenses tiennent bon», «l’Ukraine tient ses lignes et ne se rendra jamais», a-t-il dit.
Le moral de son peuple est solide, même si l’attaquant russe s’en prend aux infrastructures vitales : «Nous célébrerons Noël même si nous n’avons pas d’électricité ; la lumière sera dans nos cœurs», a promis Volodymyr Zelensky.
Mais le peuple ukrainien, qui «dépend tellement de vous», a besoin d’être encore aidé. La guerre en Ukraine est à un tournant et «votre soutien est crucial » pour négocier ce tournant et gagner, a-t-il déclaré – assurant, sous un tonnerre d’applaudissements, que les soldats ukrainiens seraient parfaitement capables d’opérer des tanks américains.
Le président Joe Biden lui a promis, quelques heures plus tôt, l’envoi d’armes supplémentaires pour près de 2 milliards de dollars, dont une batterie de missiles Patriot pour la défense anti-aérienne. «ous ne serez jamais seuls», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse commune, car «nous resterons à vos côtés aussi longtemps qu’il le faudra». Joe Biden a toutefois redit ne pas vouloir livrer d’armes de longue portée à Kiev : «Donner à l’Ukraine des équipements fondamentalement différents de ce qui est déjà expédié risquerait de diviser l’Otan, l’Union européenne et le reste du monde», a-t-il jugé.
Le Congrès doit se prononcer d’ici à vendredi sur une rallonge militaire et économique de 45 milliards de dollars d’aide à l’Ukraine, mais une partie des députés conservateurs traînent des pieds. Le premier d’entre eux est le leader de l’opposition à la Chambre, Kevin McCarthy, qui ne figurait pas dans le comité d’accueil du président Zelensky, contrairement au leader de l’opposition au Sénat, Mitch McConnell.
«Votre argent n’est pas de la charité »
Pour convaincre les hésitants et les isolationnistes, VolodymyrZelensky en a appelé au président Franklin Delano Roosevelt, qui avait prophétisé la «victoire absolue» du peuple américain grâce à sa droiture spirituelle face à la barbarie nazie. «Ce combat définira dans quel monde vivront nos enfants et nos petits-enfants, et ensuite leurs enfants et leurs petits-enfants», a-t-il prédit.
Selon lui, «cette bataille ne peut être gelée ou repoussée» et il serait vain de se croire protégé par un océan. Si l’Ukraine était abandonnée à elle-même, a-t-il signalé, «ce sera juste une question de temps avant qu’ils n’attaquent vos autres alliés». Les pays baltes et une partie de la Pologne appartenaient en effet à l’empire russe, comme l’Ukraine, dont Moscou nie la souveraineté pour cette raison. «Votre argent n’est pas de la charité», car il sert «pour la défense de la démocratie et de la sécurité dans le monde», a aussi déclaré VolodymyrZelensky.
«Contre la tyrannie »
Il a remis un drapeau ukrainien à Nancy Pelosi, le leader de la majorité à la Chambre des représentants, qui lui a, à son tour, offert un drapeau américain ayant flotté au-dessus du Capitole. Cette adresse solennelle «fera partie de votre héritage», a-t-elle dit mercredi soir aux parlementaires, faisant un parallèle avec le discours au Congrès de Winston Churchill, en 1941, pour appeler l’Amérique à se mobiliser «contre la tyrannie».
La démocrate a confié sa fierté, parce que son propre père siégeait ce jour-là. A nouveau, il ne s’agit pas seulement de défendre «les cœurs et les maisons », mais aussi «la liberté et la démocratie dans le monde», a assuré la flamboyante militante de la démocratie, 82 ans, qui cédera dans quelques jours le leadership de son camp à la Chambre.
Avec Les Echos (France)