Guterres prend Kinshasa à contre-pied : «retrait accéléré» de la Monusco dans un désordre sécuritaire

Selon le patron des Nations Unies, Antonio Guterres, le départ des troupes onusiennes, déployées depuis une vingtaine d’années en République Démocratique du Congo, est imminent. Les Nations Unies laissent cependant un pays qu’elles n’ont pas pu pacifier, malgré les milliards de dollars américains injectés dans la mission onusienne. Certes Kinshasa continue à poser le problème de retrait de la Monusco, mais à New York, Antonio Guterres a décidé d’accélérer le processus prenant les autorités congolaises presqu’à contre-pied.
Une vingtaine d’années après son déploiement en terre congolaise, les troupes des Nations Unies sont en phase de départ. Depuis son siège de New York, l’ONU considère avoir rempli sa tâche, promettant de se désengager en République Démocratique du Congo.
Le secrétaire général des Nations Unies, le Portugais Antonio Guterres, a annoncé dans un rapport rendu public, le jeudi 10 août 2023, que la Mission de l’ONU pour la stabilisation en RDC (Monusco) entrait «dans sa phase finale», malgré une situation «en forte détérioration».
Dans ce document de 15 pages adressé au Conseil de sécurité de l’ONU, le secrétaire général Antonio Guterres dresse un bilan désastreux de la situation humanitaire et politique dans le pays et expose dans le même temps un plan de «retrait accéléré et responsable» de la Monusco, après près de 25 ans de présence continue.

Une situation humanitaire détériorée
Son évaluation sur les douze derniers mois est sans appel : «les tensions régionales se sont encore aggravées»; «la situation humanitaire s’est considérablement détériorée»; «des centaines de milliers de civils ont été déplacés de force»; et «le nombre d’actes de violence sexuelle» contre des enfants «a plus que doublé entre 2021 et 2022». «Dans l’Est du pays, dans les deux provinces les plus affectées par les violences, 28% de la population du Nord-Kivu et 39% de la population de l’Ituri est déplacée – soit environ quatre millions de personnes», poursuit le rapport.
Au cœur de ces conflits : la résurgence de la rébellion du M23 (Mouvement du 23 mars) qui «s’est emparé de larges pans» de territoire et où les rebelles ont «mis en place des administrations parallèles» et procèdent «à des arrestations arbitraires et à des exécutions extrajudiciaires».

Le Rwanda totalement blanchi
Conformément aux souhaits affichés du gouvernement congolais, l’ONU réaffirme dans ce rapport sa volonté d’assurer «un retrait accéléré et responsable de la mission», mais met en garde qu’un départ prématuré «aurait des conséquences pour les civils qui comptent sur la mission pour assurer leur protection».
En septembre 2022, en visite à New York pour l’assemblée générale des Nations Unies, le président congolais Félix Tshisekedi déclarait dans une interview accordée à France 24 qu’au-delà de l’élection présidentielle de décembre 2023 – où il est candidat à sa propre réélection – «je crois qu’il n’y aura plus de raison que la Monusco reste».
Le rapport du secrétaire général ne fait en revanche pas mention de la présence de troupes de l’armée rwandaise aux côtés du M23 sur le sol congolais, contrairement aux derniers rapports du groupe d’experts de l’ONU pour la RDC.
Ces rapports ont conduit de nombreux pays, dont ceux de l’Union européenne, à condamner le Rwanda pour son implication dans ce conflit.
En 2023, le Rwanda est le troisième pays contributeur de troupes aux missions des Nations Unies. La Monusco «demeure l’une des cibles du mécontentement et de la frustration des populations qui lui reprochent de faire preuve de passivité», précise le secrétaire général Guterres.
Terrain de crispation et de discours populistes en RDC, le départ définitif de la mission de l’ONU est au cœur des débats sur l’avenir du pays depuis plusieurs années. Conformément aux souhaits affichés du gouvernement congolais, l’ONU réaffirme dans ce rapport sa volonté d’assurer «un retrait accéléré et responsable de la mission», mais met en garde qu’un départ prématuré «aurait des conséquences pour les civils qui comptent sur la mission pour assurer leur protection».

Econews avec AFP