Identification de la population, forages et lampadaires… : ces «pièges» légués à la PM Suminwa

La séance plénière destinée à l’audition du Programme du gouvernement et l’investiture de l’équipe de la première ministre Judith Suminwa n’aurait pas dérogé à l’ennui occasionné par la cérémonie somme toute protocolaire dans une assemblée presque entièrement acquise à la majorité présidentielle. Elle a été néanmoins marquée par les interventions de quelques élus de l’opposition restés dans leur rôle de dénonciation d’un programme à contre-courant. Le député Ensemble pour la République Christian Mwando dénoncé le caractère déséquilibré du Programme du gouvernement Suminwa tandis que la députée Jeannette Kavira a mis en garde la cheffe du gouvernement contre les manœuvres pernicieuses et déstabilisatrices dont elle ferait l’objet de la part du parti présidentiel dont elle est pourtant issue.

« Ne laissez pas l’UDPS vous noyer. Soyez stricte (…) Vos ministres vont tenter de vous faire échouer. Alors, travaillez deux, trois fois plus dur pour vous épargner leur mépris. Mais si vous vous sentez écrasée, démissionnez !», a lancé d’entrée de jeu la députée Jeannette Kavira Mapera à l’adresse de la Première ministre.

Intervenant dans la suite de la présentation du Programme du gouvernement, l’élue de Beni n’y est pas allée par le dos de la cuillère du haut de la tribune de l’Assemblée nationale qui n’était certes plus habituée aux discours mettant en cause le comportement de certaines autorités politiques, dont les membres de l’UDPS placés dans les hautes instances étatiques. Sous la présidence Mboso, l’hémicycle n’était plus qu’une chambre d’enregistrement où toute critique du pouvoir était bannie.

LA JURISPRUDENCE MABUNDA ET LE ROLE NEFASTE DES CONSEILLERS PRINCIPAUX

«Ne vous laissez pas rouler dans le moule du parti politique (l’UDPS, ndlr). Je reste convaincue que le président de la République vous apportera son soutien». Car, a-t-elle prévenu, «si vous échouez, ce sera encore l’histoire des femmes prétendument incapables de gérer des affaires d’Etat», faisant une allusion ouverte à la jurisprudence Jeanine Mabunda.

Selon elle, l’ancienne présidente de l’Assemblée nationale sous le régime de la coalition FCC-CACH avait en effet été la victime expiatoire des machinations de l’UDPS jusqu’à l’éclatement d’une alliance qui, de toute façon, n’avait aucune chance objective de s’étaler dans la durée.

Jeannette Kavira a particulièrement attiré l’attention de la Première ministre sur le rôle qu’elle a jugé néfaste des conseillers principaux du chef de l’Etat qui se sont ouvertement mis au-dessus des ministres de la République : «N’allez pas vous compromettre. Vous verrez que certains de vos ministres feront traiter leurs actions à la présidence de la République. Le temps de vous réveiller, les crédits seront partis, envolés ! », a-t-elle martelé dans une salle pétrifiée de surprise.

LES «DOUTES» DE CHRISTIAN MWANDO

Les propos sans complaisance de la députée Jeannette Kavira restaient dans la foulée de l’intervention de Christian Mwando, chef du groupe parlementaire d’Ensemble pour la République de Moïse Katumbi.

L’élu de Moba (Tanganyika), tout en qualifiant le programme du gouvernement d’un «chapelet de bonnes intentions» a par ailleurs exprimé sa surprise de constater que le programme gouvernemental avait inscrit parmi ses premières priorités la création d’emplois (plus de 6 millions en cinq ans), sans définir avec la clarté requise le type et la nature des projets porteurs de cette ambition dans un pays en guerre où «la sécurité est une priorité absolue» a-t-il estimé. Dans ce contexte, il a émis un doute sur la volonté du gouvernement de doubler les crédits à allouer à la sécurité et à la défense.

Bien évidemment, l’opposant ne pouvait passer sous silence les scandales à répétition qui jettent de l’ombre sur la gouvernance de Félix Tshisekedi depuis sa prise de fonction en janvier 2019. Le dernier en date est celui de la surfacturation des contrats dits des forages et des lampadaires étant précédé des détournements de fonds publics en toute impunité.

L’amélioration des services sociaux de base n’a pas non plus échappé à l’analyse de Christian Mwando, qui a exprimé sa surprise devant l’optimisme de la Première ministre qui semble ignorer que les grands groupes internationaux d’investisseurs ne se précipiteraient pas dans un une région de l’Afrique où règne une insécurité permanente.

MWIN M. F.