Dans une interview exclusive au magazine Jeune Afrique, Joseph Kabila Kabange, ancien président de la République, a annoncé son retour au pays par la «partie orientale», en pleine zone sous influence rebelle. Une déclaration qui a électrisé Kinshasa, où le pouvoir de Félix Tshisekedi voit dans ce choix une provocation calculée. Rentrant après un an d’exil et six ans de silence, Kabila justifie sa décision par «le péril en la demeure» et «la déliquescence généralisée» du pays. Un timing explosif, alors que les consultations pour un «Gouvernement d’union nationale» n’ont pas à la hauteur des attentes. Entre «contribuer à la recherche de solutions » et soupçons d’alliance avec l’AFC/M23, ce retour risque de redessiner l’échiquier politique congolais.
L’ancien chef d’Etat Joseph Kabila a officialisé son retour en République Démocratique du Congo (RDC) via la «partie orientale » du pays, selon une interview exclusive accordée au magazine Jeune Afrique. Une annonce qui a provoqué un tollé à Kinshasa, où le pouvoir de Félix Tshisekedi voit dans cette démarche une provocation délibérée, alimentant les spéculations sur les liens entre Kabila et la coalition rebelle AFC/M23.
Joseph Kabila, en exil depuis fin 2023, a choisi de rentrer par une zone sous contrôle rebelle, probablement Goma, bastion de l’AFC/M23. Une décision perçue comme un signal fort par les observateurs.
«J’ai décidé de commencer par la partie orientale, car il y a péril en la demeure », a-t-il déclaré, évoquant une «dégradation sécuritaire» et un «pourrissement généralisé des institutions».
Après six ans de silence et une année loin du pays, l’ex-chef d’État justifie son retour par la nécessité de «contribuer à la recherche de solutions», précisant avoir consulté d’anciens dirigeants régionaux et internationaux.
À Kinshasa, la nouvelle a suscité des réactions immédiates. Dans les couloirs de la Présidence de la République, on dénonce une «manœuvre de déstabilisation», rappelant que l’AFC/M23 est officiellement considérée comme un groupe terroriste.
«Rentrer par une zone occupée par des rebelles, c’est avouer son affiliation », accuse un proche du Président Tshisekedi.
Les partisans de Kabila, eux, y voient un geste «patriotique », soulignant l’échec du pouvoir actuel à endiguer les crises.
La symbolique de Goma, ville stratégique de l’Est en proie à des conflits récurrents, n’échappe à personne. «Ce retour est un calcul politique audacieux. Kabila cherche à s’imposer comme un médiateur incontournable, alors que les consultations nationales de Tshisekedi ont échoué », analyse un diplomate européen sous couvert d’anonymat.
Le timing est crucial. L’annonce intervient alors que les «consultations nationales» lancées par le Président Tshisekedi pour former un «Gouvernement d’union nationale» n’ont produit que des résultats dérisoires. La majorité présidentielle, fragilisée, redoute désormais que Kabila ne capitalise sur cette impasse pour rallier une opposition divisée. «Son retour va polariser encore plus le pays. C’est un coup de poker qui pourrait enflammer l’Est », met en garde un analyste politiques.
QUELLES IMPLICATIONS REGIONALES ?
Pour sa part, Joseph Kabila affirme avoir coordonné son retour avec des « chefs d’État de la région », sans divulguer de noms. Plusieurs sources évoquent des contacts discrets avec le Rwanda et l’Ouganda, pays souvent accusés de soutenir les rebelles du M23. Ces soupçons alimentent les craintes d’une internationalisation du conflit.
Si Joseph Kabila se présente en sauveur, son retour risque d’exacerber les tensions. L’Est de la RDC, déjà en proie à des violences, pourrait devenir le théâtre d’une lutte d’influence entre ses partisans et les forces loyalistes. Sur le plan diplomatique, la communauté internationale, jusqu’ici silencieuse, devra trancher : cautionner une médiation controversée de Kabila ou soutenir le pouvoir en place à Kinshasa.
Une chose est sûre : l’espace politique congolais vient de basculer. Entre calculs de l’ancien régime et défis du présent, la RDC s’apprête à vivre un chapitre imprévisible de son histoire. Le retour annoncé de Joseph Kabila a l’effet d’un séisme politique de forte amplitude.
Econews