Katumbi à Kisangani dans la peau d’opposant de Tshisekedi

Moïse Katumbi, chairman du parti politique Ensemble pour la République, travaille désormais sa stature d’un leader national. C’est loin de son fief du Grand Katanga qu’il s’est proposé de lancer son parti. C’est Kisangani, chef-lieu de la province de la Tshopo, qui a été choisi pour servir de point de départ d’un grand travail d’implantation d’Ensemble pour la République. Lundi, à son arrivée dans la ville, Katumbi a réussi une entrée triomphale, déjouant tous les pronostics. Il se positionne en un sérieux prétendant au trône présidentiel lors de la présidentielle de 2023. Quitter l’Union sacrée de la nation n’est pas encore dans son agenda. Toujours est-il que c’est dans la peau d’un opposant au Chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi, que Moïse Katumbi s’est adressé lundi à la population de Kisangani, avant de mettre le cap mardi sur la province de Bas-Uélé. Que retenir de cette démonstration de force ? Le message est bien simple : dans le jeu électoral de 2023, il ne faudra pas négliger Moïse Katumbi.

De la sortie du parti «Ensemble pour la République» à Kisangani, la leçon à tirer est que Moïse Katumbi, son président, a pris la posture d’opposant au Président de la République, Félix-Antoine Tshi-sekedi Tshilombo. Au lieu de déclarer son départ de l’Union sacrée de la nation, Katumbi fait durer le suspense en affirmant son appartenance à la grande coalition créant par le Chef de l’Etat, au lendemain de son divorce d’avec le Front commun pour le Congo (FCC) de Joseph Kabila.

D’abord la démonstration des forces. C’est une foule nombreuse à perte de vue qui s’était rendue à l’aéroport de Bangboka jusqu’à l’historique et mythique place de la Poste de Kisangani pour communier avec le leader d’Ensemble pour le changement. C’est là que le président d’Ensemble a pratiquement scellé un nouveau pacte avec la population de la Tshopo.

Katumbi était très à l’aise. Il se sentait chez lui. Dans son adresse en swahili, le gouverneur honoraire du Grand Katanga a enfilé son manteau d’opposant. Ce n’est pas un propagandiste de la coalition au pouvoir qui était à Kisangani. Il a invité instamment les autorités à supprimer la taxe « RAM» qui appauvrit les Congolais de toutes les classes sociales. Ironisant, Katumbi a déclaré : «J’ai mis du crédit pour appeler ma femme, mais RAM a tout pris. Depuis que je suis ici, je n’ai pas pu l’appeler au téléphone ». La foule acquise à sa cause a adhéré à cette demande.

Opposant malgré lui

Ayant un pied dans l’Union sacrée de la nation et un autre en dehors de cette coalition, il faut puiser dans son discours pour résumer la pensée de Katumbi.

«Je suis à l’Union sacrée. Je suis avec eux, mais je ne vais pas cautionner les bêtises », a-t-il déclaré à voix audible.

Cautionner des bêtises comme la taxe RAM est une exigence propre aux opposants au régime.

Dans sa peau d’opposant habité par l’option de postuler en 2023, Katumbi ne manque pas d’atouts. Il ne compte pas non plus partager le bilan de l’Union sacrée. S’il n’a pas quitté officiellement l’Union sacrée, c’est parce que ses partisans, semble-t-il dire, ont refusé de fragiliser la coalition. Ils ont également refusé de commettre la même erreur que pour le G7 qui avait quitté très tôt le navire. Cette fois-ci, ils vont demeurer longtemps au sein de la coalition.

Rappelant cet épisode du G7, Katumbi a averti qu’en cas de bêtises, il prendra ses responsabilités comme à l’époque des «faux penalties» qui ont scellé, à l’époque, sa rupture avec Joseph Kabila. Tous se rappellent que le divorce avec Joseph Kabila avait commencé à cette occasion.

A Kisangani, c’est un Katumbi qui a tiré sur Tshisekedi, tout en restant avec lui. Un exercice qu’il a répété à Buta, dans la province du Bas-Uélé, deuxième étape de sa tournée dans les provinces démembrées de la province Orientale.

Si tous les ministres d’Ensemble pour la République n’ont pas fait le déplacement de Kisangani, l’un d’entre eux, Chérubin Okende, ministre des Transports et Voies de communication, était dans la capitale boyomaise, vouant sa loyauté au chairman d’Ensemble pour la République.

Sa présence à Kisangani, s’est-il défendu, est une question de loyauté vis-à-vis de sa formation politique. «Ce qu’il faut retenir ce que, aucun texte dans la constitution interdit à un ministre de faire un acte de loyauté vis-à-vis de son parti politique», a-t-il affirmé. Et de poursuivre : «Ce qui est prohibé dans la constitution, c’est exercer un mandat électif outre que quand on est membre du gouvernement ou avoir la responsabilité de gestion du parti politique. Mais ici, c’est dans le cadre du lancement de notre parti à Kisangani ».

Fort de son succès, Moïse Katumbi se charge désormais de l’implantation de son parti. Il promet de ratisser large pour faire passer son discours. Son pari : redonner confiance aux Congolais en leur proposant un nouveau modèle de gouvernance. Pour ce travail de quadrillage du territoire national, il a confié la tâche à son directeur de cabinet, Olivier Kamitatu. A qui d’autre pouvait-il se confier ?

Econews