La piste de Nairobi ayant fait flop : Kampala, nouvel épicentre des négociations pour la paix dans l’Est de la RDC 

Après le récent passage du Président Félix Tshisekedi en Ouganda, une nouvelle délégation congolaise, conduite cette fois par le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, est en direction de Kampala pour poursuivre les discussions diplomatiques entamées avec les autorités ougandaises. La nouvelle a été annoncée par le journaliste Steve Wembi sur le réseau social X, signalant des entretiens programmés entre Kamerhe et les responsables ougandais. Bien que l’agenda précis de cette visite n’ait pas été rendu public, l’éventualité d’une rencontre avec le président ougandais Yoweri Museveni est fortement pressentie.

À la suite de la visite éclair du Président de la République, Félix Tshisekedi, en Ouganda, où il a tenu des discussions à huis clos avec son homologue ougandais Yoweri Museveni, une nouvelle délégation congolaise est annoncée à Kampala, capitale de l’Ouganda. Cette fois, c’est le président de l’Assemblée nationale de la RDC, Vital Kamerhe, qui se rend en terre ougandaise, accompagné d’une délégation parlementaire. Cette mission fait déjà couler beaucoup d’encre et soulève des interrogations au sein de la sphère politique et diplomatique de la région.

Sur la plateforme X (anciennement Twitter), le journaliste Steve Wembi, connu pour sa proximité avec les milieux de l’EAC (Communauté de l’Afrique de l’Est), a annoncé que la délégation de Kamerhe tiendra des entretiens directs avec des responsables ougandais. Cependant, les détails précis de cette visite restent entourés d’un certain mystère. Les commentateurs politiques et analystes régionaux se demandent si cette rencontre pourrait inclure un entretien avec le président Museveni lui-même, figure incontournable de la sous-région. En effet, le rôle central que joue Museveni dans les affaires de la région rend difficilement envisageable une visite de haut niveau à Kampala sans un échange direct avec lui.

Des négociations diplomatiques en coulisses

Cette visite, quoiqu’officielle, laisse planer de nombreuses zones d’ombre. Plusieurs observateurs se questionnent sur les objectifs réels de cette mission de Kamerhe. Le président de l’Assemblée nationale aurait-il pour mission d’obtenir des assurances que Tshisekedi n’a pas pu obtenir lors de son déplacement en Ouganda ? Y a-t-il des enjeux stratégiques ou sécuritaires que Kinshasa pourrait être prête à négocier pour bénéficier du soutien de Kampala dans la pacification de l’Est de la RDC, région en proie à de multiples violences depuis plusieurs décennies ?

Les experts en géopolitique rappellent que la RDC est engagée depuis plusieurs mois dans un processus de paix complexe pour l’Est du pays. Ce processus implique de nombreux acteurs et capitales africaines, avec des médiations qui se déplacent régulièrement en fonction des alliances et des intérêts stratégiques de chacun. Alors que Nairobi avait été initialement désignée comme l’épicentre de ces négociations, notamment en raison de sa neutralité relative dans les conflits impliquant la RDC, le manque de soutien ferme de Kinshasa a rapidement mis à mal cette initiative. Désormais, les regards se tournent vers deux nouvelles capitales : Luanda, en Angola, et Kampala, en Ouganda.

Réactivation de l’axe Kampala – Luanda 

Dans cette nouvelle dynamique diplomatique, l’Angola et l’Ouganda semblent jouer des rôles cruciaux. Le président angolais João Lourenço, médiateur reconnu sur le continent, a déjà entrepris plusieurs démarches pour encourager un dialogue constructif entre les acteurs régionaux. En parallèle, Museveni, avec sa longue expérience à la tête de l’Ouganda et son influence dans la sous-région, détient des clés importantes pour la stabilisation de l’Est congolais.

En effet, certains groupes armés opérant en RDC entretiennent des liens étroits avec des réseaux transfrontaliers en Ouganda, rendant essentielle l’implication de Kampala dans toute solution de paix.

En outre, l’Ouganda a des intérêts économiques et sécuritaires significatifs dans la région, notamment dans l’exploitation des ressources naturelles de l’Est de la RDC, mais aussi en termes de sécurisation de ses frontières. Ainsi, pour Museveni, garantir la stabilité de l’Est congolais est autant un impératif de sécurité intérieure qu’une opportunité de renforcer la coopération régionale.

Kamerhe : un messager de confiance ?

La personnalité de Vital Kamerhe pourrait elle aussi jouer un rôle important dans cette mission. Ancien allié de Félix Tshisekedi, puis président de l’Assemblée nationale, Kamerhe est connu pour ses talents de négociateur et sa capacité à bâtir des ponts entre différents acteurs politiques. Il bénéficie d’une certaine crédibilité, tant au sein du paysage politique congolais que sur la scène internationale. Sa présence à Kampala pourrait ainsi faciliter des échanges plus francs et, potentiellement, aboutir à des avancées concrètes.

Cependant, certaines voix s’élèvent pour s’interroger sur les implications de cette démarche. Dans quelle mesure Vital Kamerhe a-t-il été mandaté pour négocier des points restés en suspens entre Tshisekedi et Museveni ? Est-il possible que des garanties supplémentaires soient recherchées, et si oui, lesquelles ? L’Ouganda souhaiterait-il des engagements précis de la part de la RDC avant de s’impliquer plus activement dans les efforts de stabilisation régionale? Autant de questions qui demeurent sans réponse pour le moment.

La situation dans l’Est de la RDC demeure extrêmement volatile, avec des groupes armés qui continuent d’exercer une violence intense sur les populations civiles. La perspective d’un processus de paix durable exige la mobilisation et l’engagement de toutes les parties prenantes, tant au niveau national que régional. Une entente entre la RDC et ses voisins immédiats, en particulier l’Ouganda et l’Angola, pourrait donc s’avérer décisive.

La mission de Vital Kamerhe à Kampala, bien que mystérieuse dans ses objectifs précis, symbolise une volonté claire de la RDC de réengager ses partenaires de la sous-région pour tenter de mettre fin aux violences. Le contexte actuel montre que, dans cette quête de stabilité, la RDC ne peut plus faire cavalier seul. Les alliances diplomatiques, construites et renforcées au fil de négociations parfois longues et difficiles, seront sans doute le socle d’un avenir plus apaisé pour les populations de l’Est.

Hugo Tamusa