Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo a présenté son Programme d’Actions pour la période 2024-2028, un plan quinquennal ambitieux visant à poser les jalons d’une RDC émergente, avec une économie plus diversifiée et compétitive. D’un coût total estimé à 277.066 milliards de francs congolais (92,9 milliards USD), ce programme s’inscrit dans la continuité de la vision politique du Président Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, articulée autour de ses 6 engagements majeurs, tout en proposant des avancées significatives par rapport aux programmes précédents.
UN PROGRAMME STRUCTURE AUTOUR DE 6 PILIERS STRATEGIQUES
Le Programme d’Actions du Gouvernement s’articule autour de 6 piliers stratégiques complémentaires et synergiques, couvrant l’ensemble des dimensions du développement de manière équilibrée : (I) créer plus d’emplois et protéger le pouvoir d’achat; (II) protéger le territoire et sécuriser les personnes; (III) aménager le territoire pour une connectivité maximale, (IV) garantir l’accès aux services de base; (V) renforcer l’efficacité des services publics; et (VI) assurer une gestion durable de l’environnement.
Chaque pilier est assorti d’objectifs clairs et mesurables, ainsi que d’indicateurs de performance permettant un suivi-évaluation rigoureux des progrès accomplis.
Une ambition accrue en termes de création d’emplois et de diversification économique. Le Programme d’Actions 2024-2028 se distingue par son ambition accrue en termes de création d’emplois, avec 6,4 millions d’emplois visés sur la période, contre 1 million dans le programme précédent. Il met l’accent sur la transformation structurelle et la diversification de l’économie, avec des objectifs chiffrés ambitieux pour les secteurs de l’agriculture, de l’industrie et des services. Le programme accorde également une place importante aux enjeux de sécurité, de connectivité, de développement du capital humain et de gestion durable de l’environnement, reflétant une approche plus holistique du développement.
Un effort sans précédent de désenclavement et de développement territorial équilibré. Pour promouvoir un développement territorial équilibré et réduire les inégalités entre les provinces, le Programme d’Actions 2024-2028 prévoit un effort massif de désenclavement, avec la réhabilitation de 10.000 km de routes agricoles par an et la construction de 3.750 km de routes nationales prioritaires, qui bénéficiera en priorité aux provinces les plus isolées. Il met également l’accent sur le développement des chaînes de valeur agricoles et la création de pôles agro-industriels dans toutes les provinces. Le renforcement de la décentralisation, avec un transfert accru des compétences et des ressources aux provinces et aux ETD, ainsi que la mise en place de la Caisse Nationale de Péréquation, permettront de corriger les déséquilibres de ressources entre les provinces et de promouvoir un développement plus équitable.
Une approche participative et transparente pour une appropriation par toutes les forces vives de la Nation. Conscient que la réussite du Programme d’Actions repose sur l’adhésion et l’appropriation de toutes les forces vives de la Nation, le Gouvernement mettra en place plusieurs mécanismes pour assurer une participation active de la société civile, des partenaires sociaux et des populations dans le suivi et l’évaluation de sa mise en œuvre. Des consultations régulières seront organisées à tous les niveaux, une plateforme numérique interactive permettra aux citoyens de suivre l’avancement des projets et de donner leur feedback, et les organisations de la société civile et les partenaires sociaux seront impliqués dans les instances de pilotage et de suivi-évaluation. Le Gouvernement s’engage à rendre compte régulièrement des progrès accomplis et à ajuster au besoin le Programme d’Actions sur la base des remontées des acteurs.
Un cadrage macroéconomique et budgétaire ambitieux mais réaliste. Malgré un contexte difficile, le Gouvernement vise un taux de croissance annuel moyen de 9,8% sur la période, tiré par les secteurs primaire, secondaire et tertiaire. Le taux d’investissement devra passer de 12,7% du PIB en 2019-2022 à 27% en 2024-2028, avec un effort particulier sur l’investissement public. Les recettes de l’État devraient passer de 16% du PIB en 2024 à 18% en 2028, grâce à une mobilisation accrue des recettes internes et à des financements innovants, notamment les partenariats public-privé. Les dépenses publiques augmenteraient de 21,5% du PIB en 2024 à 22,5% en 2028, avec une priorité aux dépenses en capital, tout en maintenant le déficit budgétaire dans des limites soutenables.
Un programme fiable, mais des défis de mise en œuvre à relever collectivement. Le Programme d’Actions du Gouvernement 2024-2028 apparaît comme un document stratégique solide et cohérent, aligné avec les engagements du Président de la République. Sa fiabilité est renforcée par la définition d’objectifs clairs et mesurables, l’identification de réformes structurelles et d’investissements prioritaires, la prise en compte des contraintes budgétaires, l’accent mis sur le rôle moteur du secteur privé, l’intégration des enjeux de gouvernance et de développement durable, l’attention portée aux questions de paix et de sécurité, et le dispositif robuste de pilotage et de suivi-évaluation prévu.
Cependant, la réussite du programme dépendra de la capacité collective de la Nation à surmonter plusieurs contraintes majeures, telles que l’instabilité sécuritaire, la faiblesse des ressources internes, la fragilité du secteur privé national ou encore les faiblesses de la gouvernance. Le Gouvernement devra faire preuve d’un leadership politique fort, d’une agilité dans la mise en œuvre et d’une capacité à mobiliser l’adhésion de toutes les forces vives et l’appui de la communauté internationale. La fiabilité du programme dépendra in fine de la mobilisation effective des ressources financières prévues, du renforcement des capacités de l’administration publique, de la coordination efficace de l’action gouvernementale, de l’engagement continu des partenaires, de l’appropriation par les populations, et de la stabilisation durable de la situation sécuritaire.
En conclusion, le Programme d’Actions du Gouvernement 2024-2028 offre une feuille de route ambitieuse, cohérente et réaliste pour impulser une dynamique de transformation structurelle, inclusive et durable de la RDC. Sa réussite dépendra de la capacité de toute la Nation à se rassembler autour de cette vision et à persévérer dans sa mise en œuvre collective, déterminée et pérenne. C’est ainsi que la RDC pourra libérer son immense potentiel et offrir à sa population les fruits d’un développement équitable et partagé, gage d’un avenir meilleur pour tous.
Jerry Bossa
Économiste-Fiscaliste