L’art de jeter l’argent par les fenêtres

Des conteneurs (216) qui se couvrent de rouille dans le port de Dar es-Salaam; l’Inspection générale des finances qui interroge sur l’affectation de plus de 500 mille dollars US alloués au concert dit de la réconciliation des musiciens de l’orchestre Wenge Musica originel le 30 juin; la Banque africaine de développement (BAD) qui fronce les sourcils sur les dilapidations des fonds alloués à la lutte contre le Covid-19 (142 millions de dollars US)… En termes de casseroles traînées, ou de cadavres dans les placards, le gouvernement des Warriors ne pouvait faire mieux.
Les 216 conteneurs immobilisés dans le district d’Ubungo, une extension du port tanzanien de Dar-es-Salaam, font l’objet d’une correspondance adressée au gouvernorat du Lualaba (sic !) par le consul général de Tanzanie en RDC qui prévient : la cargaison entreposée depuis plus de deux ans n’ayant jamais été réclamée par ses propriétaires congolais, elle devrait faire bientôt l’objet d’une vente aux enchères afin de désengorger le port et couvrir les frais faramineux d’entreposage. Mais, pourrait-on se demander, d’où diantre vient cette désinvolture du gouvernement dans la gestion des deniers publics d’un État qui ne fait pas la course en tête des plus fortunées des nations africaines ?
L’on se rappelle qu’au cours du procès, dit de 100 jours, au premier semestre 2020, l’entrepreneur libanais Sammih Jamal, l’un des coaccusés, poursuivi conjointement avec Vital Kamerhe pour le détournement de quelque 57 millions de dollars US de fonds destinés à la construction de maisons préfabriquées pour l’armée, s’était «tué» à répéter que la charge du dédouanement et de l’acheminement des conteneurs revenait à la partie gouvernementale. Argument réfuté par les avocats de l’Etat avec à leur tête un certain… Dieudonné Kabula.
Dans ce jeu de ping-pong tropical, c’est finalement l’Etat qui trinque. Perdant toute crédibilité face aux partenaires extérieurs devenus plus que méfiants, dont certains menacent déjà d’ester en justice contre la RDC, à l’instar de l’entreprise turque Karmod qui se retrouve avec sur les bras 1000 maisons préfabriquées sur les 3000 commandées par l’entreprise de Sammih Jamal. Comme quoi en RDC, entre le discours lénifiant d’une gouvernance irréprochable et l’art de jeter l’argent par les fenêtres, le fossé est inexistant.

Econews