Le Chef de l’Etat, Félix Tshisekedi, l’a promis en 2022 lors d’un passage dans la cité de Nkamba (province du Kongo Central), lieu saint de l’église Kimbanguiste. Il a finalement matérialisé sa promesse, aux termes de l’ordonnance présidentielle du 30 mars 2023 qui inscrit, désormais, la date du 6 avril dans la liste des jours fériés légaux en République Démocratique du Congo. Ainsi, le 6 avril de chaque année, la RDC célèbrera le « combat de Simon Kimbangu et la conscience africaine ».
Dans les milieux des Kimbanguistes, c’est la liesse populaire. Enfin, se disent-ils, la RDC a honoré l’un de ses vaillants hommes qui a balisé la voie de l’indépendance. En honorant le combat de Simon Kimbangu, Kinshasa envoie aussi un message à toute l’Afrique pour l’éveil de l’homme noir, combat qu’a livré Simon Kimbangu pendant son apostolat.
Si l’église Kimbanguiste applaudit de deux mains la décision du Chef de l’Etat, la descendance du prophète Kimbangu n’est pas non plus restée indifférente. L’un des petits fils du prophète, en l’occurrence Christophe Kisolokele Tusimbana, a salué la décision du Chef de l’Etat qui reconnaît non seulement le combat de son grand père, mais rétablit aussi son nom dans l’imaginaire collectif congolais.
«Nous sommes dans la joie de recevoir ce cadeau du Président de la République et nous sommes très émus car c’est le résultat d’un combat qu’a mené Simon Kimbangu. d’autres ont aussi mené le même combat pour accorder l’indépendance économique, psychologique des peuples africains. Kwame Nkrumah, Léopold Sedar Senghor, Patrice-Emery Lumumba et d’autres leaders sont des récipiendaires de Simon Kimbangu pour les avoir inspirés», a dit Christophe Kisolokele, dans une déclaration à la presse.
En reconnaissant le combat de Simon Kimbangu, Christophe Kisolokele, qui dirige l’aile Monkoto de l’église Kimba-nguiste, appelle, par conséquent, l’Etat congolais à réformer le système éducatif congolais pour aider les Congolais à s’approprier les idéaux de Kimbangu.
«Notre problème, c’est le problème de l’éducation, on doit réformer le système éducatif. Je pense qu’aujourd’hui la réforme de l’éducation est importante. Actuellement, tout le programme est calqué sur le modèle belge. Simon Kimbangu a combattu le système belge. C’est normal pour les anciens colonisateurs que son histoire ne soit pas enseignée aux filles et fils de son pays, mais avec cette reconnaissance, nous venons de franchir un pas et la prochaine étape pour nous sera de créer nos propres manuels scolaires afin d’écrire et réécrire l’histoire de ce pays », note-t-il. Et d’ajouter : «On dit que le peuple qui n’a pas d’histoire est un peuple qui disparaît. Je remercie ardemment ceux qui se sont impliqués et ont concouru à cette réussite, nos frères et sœurs qui ont passé des nuits à l’esplanade du palais du peuple, tous ceux qui ont perdu leurs vies dans la lutte contre la balkanisation de ce pays, à Kwamouth, dans le plateau de Bateke et partout dans l’arrière-pays ».
Pour Christophe Kisolokele, cette reconnaissance nationale du combat de Simon Kimbangu balise aussi la voie pour l’éveil de toute l’Afrique. «Ce combat n’est pas encore terminé. Il y a l’Occident où, aujourd’hui on parle de néocolonialisme, c’est-à-dire nous devons lutter contre la corruption, contre les antivaleurs pour qu’on soit réellement indépendant ».
Simon Kimbangu, né le 12 septembre 1887 à Nkamba dans l’actuel Kongo Central et mort le 12 octobre 1951 dans la ville d’Elisabethville, est considéré par ses fidèles comme un «envoyé spirituel». Il devient prédicateur dans les années 1920 et fonde en 1921 à Nkamba un mouvement religieux qui donnera naissance au kimbanguisme. Arrêté et jugé, il meurt après une longue détention d’une trentaine d’années. Son action a généré l’émergence de l’Eglise kimbanguiste qui perdure et rend visible également un mouvement de nature plus politique contre le pouvoir colonial, qui a pris ensuite d’autres formes.
En 2021, environ 10 % des croyants congolais se réclament de l’Eglise Kimbanguiste. À l’époque contemporaine, cette église s’institutionnalise. Elle s’est établie dans plusieurs pays. À la mort de Simon Kimbangu, c’est son fils Joseph Diangienda qui prend la tête de l’Eglise jusqu’à sa mort survenue le 8 juillet 1992, avant d’être remplacé par son frère Paul-Salomon Dialungana Kiangani (1992-2001), puis par son petit-fils Simon Kimbangu Kiangani. Depuis lors, l’Eglise Kimbanguiste est divisée en deux ailes, l’une qui détient tous les attributs de l’Eglise siège au Centre d’accueil kimbanguiste dans la commune de Kasa-Vubu, et l’autre, appelée «aile Monkoto», a établi son quartier général sur l’avenue Monkoto, dans la commune de Ngiri-Ngiri.
Francis N.