Les pires inondations jamais enregistrées en Afrique du Sud ont fait plus de 300 morts, selon un nouveau bilan mercredi soir, les fortes pluies sur la côte est ayant dévasté des milliers de maisons, routes et ponts à Durban, grand port africain et épicentre de la catastrophe. Les plus importantes précipitations enregistrées depuis plus de 60 ans dans la région ont laissé derrière elles un paysage de désolation.
L’Afrique du Sud est frappée par les pures inondations de son histoire après de violentes pluies qui ont duré plusieurs jours dans la province du KwaZulu-Natal. Le bilan provisoire publié par les autorités locales était de 259 morts à travers la province avant de s’alourdisse à 306 morts le mercredi soir. Les plus importantes précipitations enregistrées depuis plus de 60 ans dans cette province ont laissé derrière elles un paysage désolant.
Le président sud-africain Cyril Ramaphosa a passé la journée dans la région avec plusieurs ministres. Il est allé à la rencontre des familles endeuillées. Il n’a pas pu aller partout tant les routes et les ponts ont été pulvérisés par les eaux, laissant des failles béantes au milieu des axes routiers. «Notre peuple est blessé. C’est une catastrophe aux proportions énormes», a-t-il déclaré.
Une météo plus clémente a permis à la ville de Durban et ses alentours de commencer à souffler.
C’est la dernière nuit de patrouille pour les brigades citoyennes qui ont gardé l’entrée de la voie rapide qui borde l’océan indien. La route devrait rouvrir, mais elle était fermée après avoir passé plusieurs jours sous les eaux.
Des conteneurs ont flotté ci et là avant de s’échouer sur la route. Le président Cyril Ramaphosa a d’ailleurs survolé ces zones industrielles où les conteneurs ont été éparpillés par le courant comme du bois mort sur la plage. Une image impressionnante qu’il a prise en photo.
Trevor, un habitant de la région, s’évertue à garder le sourire, malgré tous ses malheurs, aucune vie n’a été perdue dans sa famille, et ce n’est pas passé loin : «un glissement de terrain a failli emporter ma maison», s’exclame-t-il.
Lundi soir, les habitants étaient à l’intérieur de leurs lorsqu’ils ont entendu un gros bruit. La plupart d’entre eux ont ouvert leurs portes pour jeter un œil quand ils ont constaté la cour disparaitre sous les eaux.
«C’est la première fois que ça arrivait et c’est effrayant. On a eu de fortes pluies dans le passé, mais pas comme celles-ci », explique Trevor.
Comme beaucoup de Sud-Africains, Trevor n’a pas d’assurance. Toutes les réparations devront être payées de sa poche. Les dégâts dans toute la province du KwaZulu-Natal sont considérables explique Shamlin, un autre habitant qui préside un groupe de surveillance citoyen dans une commune du littoral. « Des maisons ont été emportées, des conducteurs ont été emportés, des voitures ont été bloquées dans la boue, il y a eu des glissements de terrain. Et on n’est qu’au deuxième jour. Plus ils vont nettoyer, plus on risque de constater les dégâts et découvrir des corps », déplore-t-il.
Durban l’épicentre de la tempête
La région de Durban a été l’épicentre de la tempête. Des records de précipitations ont été enregistrés à plusieurs endroits. Des zones industrielles ont été dévastées, on a vu des containers éparpillés, une raffinerie sous les eaux et pas loin une usine Toyota également inondée. Un nouveau coup dur pour l’économie de la région déjà durement touchée par les pillages lors des émeutes de juillet 2021.
Beaucoup de routes restent impraticables : il y a des trous béants, de la boue, des arbres qui sont tombés. Il est donc difficile pour les autorités de se rendre sur les lieux. Les secouristes parlent d’un véritable «cauchemar». L’armée a été mobilisée pour apporter un soutien aérien dans les recherches et évacuer les rescapés.
Des milliers de maisons ont été détruites. Au moins 140 écoles ont été touchées, selon les autorités locales. De nombreux foyers à Durban sont plongés dans le noir. Et n’ont pas accès à l’eau et à l’électricité. Les liaisons ferroviaires ont été suspendues et les habitants appelés à éviter tout déplacement.
Les prévisions ont mis en garde contre des pluies persistantes et des risques d’inondations localisées dans les prochains jours. La région a déjà connu des destructions massives en juillet lors d’une vague sans précédent d’émeutes et de pillages.
Ces inondations rappellent celles de 2019 qui avaient fait 85 morts durant le weekend de Pâques. Pâques, c’est dimanche prochain et de fortes précipitations sont encore annoncées. L’histoire semble se répéter.
Prédiction d’un ralentissement de la croissance en 2022
Le malheur ne venant jamais seul, la Banque mondiale prévoit un ralentissement de la croissance pour 2022 en Afrique subsa-harienne, où de nombreux pays, à peine remis du choc économique du Covid-19, sont confrontés aux conséquences de la guerre en Ukraine. Et l’Afrique du Sud ne sera pas épargnée.
Dans un rapport semestriel sur les perspectives macroéconomiques du continent, publié mercredi 13 avril, l’institution prévoit «une croissance de 3,6 % pour 2022, en baisse par rapport aux 4% enregistrés en 2021».
«Ce ralentissement s’inscrit dans un contexte régional marqué par la persistance de nouveaux variants du Covid-19, l’inflation globale, la perturbation des chaînes d’approvisionnement et les chocs climatiques. La montée des cours mondiaux des matières premières, qui s’est accélérée depuis le début du conflit entre la Russie et l’Ukraine, vient s’ajouter aux autres défis économiques de la région », détaille le texte.
«Principaux exportateurs mondiaux de denrées alimentaires, la Russie – qui est aussi le plus grand exportateur d’engrais au monde – et l’Ukraine, représentent une part importante des importations de blé, de maïs et d’huile de graines, et celles-ci pourraient s’interrompre en cas de poursuite du conflit », précise la Banque mondiale.
L’étude relève aussi que la reprise économique post-pandémie est inégale dans la région. Elle restera « lente » dans les trois plus grandes économies du continent, l’Angola, le Nigeria et l’Afrique du Sud. Si les deux premières citées devraient tout de même bénéficier de la hausse des cours du pétrole, l’Afrique du Sud fait toujours face à des problèmes structurels, notamment des pénuries d’électricité.
T. Masiala