Le Nord-Kivu sous le péril Wazalendo : incident armé à la «Petite barrière» de Goma

Jeudi 29 août, un incident armé a été rapporté à Goma, à la frontière entre la République Démocratique du Congo (RDC) et le Rwanda, plus précisément à la « Petite barrière ». Cet événement, impliquant les Wazalendo, des patriotes congolais combattant aux côtés des Forces armées de la RDC (FARDC), met en lumière la délicate situation sécuritaire dans la région, déjà agitée par les actions du groupe armé M23 soutenu par l’Armée rwandaise (AFC/RDF). L’incident survenu jeudi témoigne de la tension palpable à la frontière. Bien que les affrontements n’aient pas dégénéré en un conflit armé généralisé, cet événement est une illustration préoccupante des frictions qui existent entre les deux nations. Loin d’être un simple affrontement local, cet incident met en évidence la vulnérabilité de la région, où les dynamiques politiques et militaires peuvent basculer rapidement.

L’incident a eu lieu jeudi dernier à la «Petite barrière», l’une des voies d’accès séparant  Goma et sa ville voisine de Gisenyi (district de Rubavu) au Rwanda. Des sources recoupées indiquent qu’un jeune homme armé présenté comme un Muzalendo aurait ouvert le feu en direction du Rwanda. Rejoint par ses camarades, ils ont   dû battre en retraite à la suite du déploiement d’une unité de l’armée rwandaise le long de cette partie de la frontière. Faute de toute information officielle des autorités congolaises, le mobile de l’action du Muzalendo n’est pas connu.

A la suite de l’incident, le trafic entre les deux villes a été perturbé pendant quelques heures. En début d’après-midi, la situation était revenue à la normale. Car en dépit de l’état de guerre entre le Rwanda et la République Démocratique du Congo, la frontière reste ouverte à l’initiative de la RDC entre 6 et 15 heures.

Un intense commerce transfrontalier y est observé quotidiennement, impliquant les commerçants locaux des deux villes. Des matériaux de construction et des produits vivriers transitent régulièrement par la «Petite» et la «Grande» barrière.

GOMA, UNE VILLE SURMILITARISÉE

L’incident vécu à Goma ce jeudi matin est le dernier en date et il s’inscrit dans une longue énumération d’agressions et de crimes perpétrés au quotidien dans le chef-lieu du Nord-Kivu. Il ne se passe pas de jour sans que des corps sans vie ne soient découverts, que des familles entières dénoncent des cambriolages sanglants qui, généralement, débouchent rarement sur des arrestations et des procès.

Plus d’une fois, les organisations de la société civile imputent la situation inquiétante dans la ville de Goma à une sur-militarisation due à la présence des militaires de l’armée régulière  revenus  du front ou s’apprêtant à y monter mais laissés en divagation, mais surtout aux Wazalendo, ces «jeunes patriotes » dont certains sont issus de groupes armés jadis en guerre contre le gouvernement de Kinshasa.

Ils sont désormais des supplétifs des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) dans leur lutte contre l’agression rwandaise sous le couvert de la rébellion du M23. En raison de leur connaissance du terrain, les Wazalendo ont joué et continuent à jouer un rôle significatif  aux côtés des FARDC parvenues à contenir  l’avancée de la coalition M23/RDF vers les villes de Sake  et de Goma, faisant fi de différents cessez-le-feu conclus dans le cadre du Processus de Luanda.

RATIONNALISER LES « RESERVISTES »

Placés sous le commandement (théorique) du général Padiri sous le label de « réservistes », les Wazalendo donnent du fil à retordre aux chefs militaires en raison de la disparité de leur provenance. En effet, ils ne forment pas un corps homogène. Leur allégeance au pouvoir central n’a pas suffi à éteindre leurs divergences originelles.

Dès la mi-avril, le gouverneur militaire du Nord-Kivu (province en état d’urgence) avait ordonné que les Wazalendo et d’autres militaires ne se promènent pas en armes dans la ville de Goma.  La décision faisait suite à la recrudescence de la criminalité non seulement dans Goma, mais aussi dans les camps des déplacés disséminés alentour.

Le cri de la population met régulièrement en cause les Wazalendo qui, mal (ou pas du tout) payés, se servent sur les riverains. Bien plus, il n’est pas certain que leur commandant, le général Padiri, lui-même ancien Mai Mai qui avait rejoint l’armée nationale lors des brassages-mixages dans la foulée du dialogue inter-congolais de 2002-2003 soit en mesure de dénombrer avec efficacité leurs effectifs.

L’incident survenu ce matin de jeudi 29 août à la « Petite Barrière » de Goma interpelle au plus haut point. Il commande en priorité que le gouvernement réalise enfin la dangerosité de ce corps disparate qui, laissé à ses errements risque de poser demain une autre équation autrement plus nocive que celle posée par les appétits d’un Paul Kagamé qui, de toute manière, s’achemine vers la fin de son régime sanguinaire.

Econews