Après trois années de rapprochement diplomatique et économique, le premier ministre israélien a récemment exprimé publiquement son soutien au Royaume chérifien concernant la marocanité du Sahara. Cette décision, qui a été saluée pour sa clarté et sa clairvoyance, marque une étape significative dans l’approfondissement des relations entre les deux pays.
En réponse à cette avancée historique, le Roi Mohammed VI a adressé une invitation au Premier Ministre Benyamin Netanyahou pour effectuer une visite officielle au Maroc. Cette invitation illustre le raffermissement des liens diplomatiques et ouvre les portes d’une nouvelle ère de coopération économique, sociale et culturelle, offrant des perspectives prometteuses pour l’avenir des relations bilatérales.
Dans cet article, nous examinerons les perspectives et les défis liés à cette évolution des relations entre le Maroc et Israël, tout en mettant en évidence les rendements de ce partenariat stratégique. Nous analyserons également les implications de cette évolution pour la région du Moyen-Orient, notamment en tenant compte des enjeux géopolitiques liées à la question de la marocanité du Sahara.
Les relations entre le Maroc et Israël ont commencé dans les années 1960, mais ont été rompues en 2000 après le déclenchement de la deuxième Intifada palestinienne. Pendant près de deux décennies, les liens officiels ont été suspendus, et les relations étaient marquées par quelques désaccords liés à la question palestinienne, cette dernière représente un double dilemme au positionnement stratégique du Maroc. Le Roi Mohammed VI est Président du Comité Al-Qods et est également garant d’une relation très particulière avec les Marocains de confession juive.
Cependant, en décembre 2020, un tournant majeur a eu lieu lorsque le Maroc a annoncé la rétablissement de ses relations avec Israël, rejoignant ainsi les accords d’Abraham, et dans la foulée, les États-Unis reconnaissaient la souveraineté marocaine sur le Sahara.
Ce rétablissement a ouvert de nouvelles perspectives pour la coopération entre les deux nations dans divers domaines tels que l’économie, la technologie, le tourisme et la sécurité, car nul ne peut nier, l’emplacement d’Israël comme leader mondial dans les domaines de la technologie, de l’innovation et des start-ups, ainsi qu’une réputation bien assise dans le domaine des finances et un renom redoutable en matière de sécurité.
La coopération bilatérale peut stimuler l’économie marocaine en attirant des investissements israéliens et en encourageant des partenariats commerciaux. De plus, les deux pays peuvent bénéficier de l’échange d’expertise dans des secteurs clés tels que l’agriculture, l’eau, l’énergie renouvelable et la cybersécurité.
Cela dit, malgré les opportunités, le retour des relations Maroc-Israël est également confronté à des défis. Certains groupes au Maroc et dans le monde arabe considèrent ce rétablissement des relations comme une trahison de la cause palestinienne. Le gouvernement marocain doit donc faire face à des critiques internes et externes et œuvrer pour sensibiliser à la valeur de cette démarche dans le contexte du respect de ses intérêts nationaux.
Par ailleurs, les décisions prises par les diplomates marocains devront prendre en compte les dynamiques géopolitiques complexes dans la région et au-delà, tout en cherchant à maintenir des relations constructives avec les parties impliquées. Leur capacité à anticiper les répercussions géopolitiques potentielles et à développer des approches stratégiques adaptées seront essentielles pour surmonter les défis qui se présenteront.
Ainsi, la diplomatie stratégique sera au cœur de cette démarche pour naviguer avec succès dans les eaux complexes des intérêts géopolitiques et permettre ainsi une « normalisation » bien fondée et bénéfique pour le Royaume du Maroc, tout en renforçant le canal diplomatique avec Israël, le Maroc peut jouer un rôle de médiateur dans certains conflits régionaux et promouvoir la stabilité dans la région.
Quels sont les bénéfices diplomatiques que le Royaume du Maroc tire de ses relations avec l’État d’Israël et réciproquement, comment l’État d’Israël profite-t-il de ces relations, en mettant l’accent sur leur impact en Afrique ?
Pour Israël, l’économie et la diplomatie sont souvent étroitement liées. Dans le cas du Maroc, depuis le retour des relations avec Israël à la fin de 2020, le secteur privé marocain multiplie les initiatives de rapprochement entre les deux pays. Par exemple, la Chambre de commerce et d’industrie Maroc-Israël reste très active et organise régulièrement des conférences et des rencontres avec des officiels, avec déjà plus une centaine de millions de dollars d’échanges entre les deux pays.
Une autre opportunité de coopération entre les deux pays réside dans leur intérêt commun pour l’Afrique, l’intérêt grandissant d’Israël pour ce continent peut s’expliquer en partie par sa volonté de contrer l’influence de l’Iran, qui propage la doctrine chiite et soutient financièrement des groupes terroristes (dont le polisario), tout en cherchant à exporter des armes en Afrique.
En parallèle, le secteur privé israélien a joué un rôle significatif en misant sur l’Afrique dès les années 1990, augmentant progressivement le pourcentage de ses investissements sur le continent.
Cette dynamique économique renforce les liens entre les deux nations, tout en leur permettant de saisir de nouvelles opportunités de croissance en Afrique et faire face aux contre-courants
Cela dit, après que Tel-Aviv a renoué officiellement avec le continent africain, établissant des relations avec des pays tels que la Guinée, le Rwanda, l’Ethiopie, ainsi que des pays à majorité musulmane comme le Soudan et le Tchad. Actuellement, Israël entretient des relations diplomatiques avec près de quarante pays africains, dont trente-sept en Afrique subsaharienne.
Fort de ce regain de popularité, Israël envisage même de retrouver son statut d’observateur à Addis-Abeba (UA) dans un futur proche.
Le Royaume du Maroc doit bénéficier du réseau et de l’influence d’Israël dans le continent africain, afin de soutenir son positionnement par rapport à la question du Sahara, gagner du terrain par rapport à la pseudo RASD et développer son tissu économique africain en matière d’investissement et d’échange d’expertise.
L’Etat d’Israël reconnait le rôle si important du Royaume dans l’Afrique, être allié du Maroc signifie gagner un vaste terrain africain très prometteur et riche en capital humain, une ouverture logistique sur le marché africain et européen, et finalement, cette relation pourrait potentiellement favoriser le dialogue avec d’autres pays arabes et améliorer les perspectives de règlement de conflits régionaux.
Ce nouveau chapitre des relations entre le Maroc et Israël ouvre une nouvelle ère de coopération et de possibilités. En saisissant ces opportunités avec prudence, le Maroc peut jouer un rôle de premier plan dans la région et contribuer progressivement à la stabilité du Moyen-Orient.
Cependant, il est essentiel de faire face aux défis et de gérer les questions sensibles pour assurer le succès à long terme de cette relation bilatérale. La voie vers une coopération mutuellement bénéfique est exigeante, mais les récompenses pour les deux nations et la région en valent la peine.
Avec Hespress
*Cadre à l’ONDH – Evaluateur des Politiques Publiques