UDPS et USN : sortez Félix Tshisekedi du terrible piège d’engager tout bras de fer judiciaire avec l’Eglise catholique romaine qui ne désavouera jamais son prélat !
Il est de ces initiatives que la Justice ne peut prendre qu’en sollicitant au préalable l’avis de l’autorité établie, quand bien même la Constitution lui reconnaît à l’article 149 son indépendance. Après tout, la Constitution y dispose aussi que « Les arrêts et les jugements ainsi que les ordonnances des Cours et tribunaux sont exécutés au nom du Président de la République ». Au nombre de ces initiatives, celle confiée au PG près la Cour d’appel de Matete d’ouvrir une information judiciaire à charge du Cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa…
INTERDITS DE FRANCHIR LE RUBICON
Par sa lettre du samedi 27 avril 2024 portant les références 1877/D037/2079/PGCCAS/SEC/2024 et dont l’objet est : « Comportement séditieux entraînant faits infractionnels à charge de Monsieur le Cardinal Fridolin AMBONGO », Firmin Mvonde écrit en 4 paragraphes ceci :
1. « Depuis belle lurette, il s’observe dans les comportements de Monseigneur Fridolin AMBONGO, Archevêque Catholique Métropolitain de Kinshasa au moment où le pays fait face à la guerre dans sa partie orientale une constance des propos séditieux tenus lors des points de presse, interviews et autres sermons, de nature à décourager les militaires des forces armées de la République qui combattent au front, mais aussi incitatifs à la maltraitance par les rebelles et autres envahisseurs des populations locales déjà meurtries par autant d’années de déstabilisation ».
2. « Invité à mon office par ma lettre n°1735/D.037/2079/PGCCAS/SEC/2024 du 22 avril 2024 qui fut réceptionnée à son centre de résidence par les services du secrétariat de l’Archidiocèse de Kinshasa pour un échange en date du 25 avril 2024 autour de certains dossiers en instruction à mon office, Monseigneur le Cardinal Fridolin AMBONGO a décliné l’invitation ».
3. « Devant l’évidence de ces comportements qui s’analysent en faits infractionnels envers et contre la Patrie, son peuple et ses dirigeants et qui mettent à mal les lois de la République, je vous ordonne d’ouvrir une information judiciaire à charge du prélat susvisé qui violente délibérément les consciences et semble trouver un plaisir à travers ces faux bruits et autres incitations des populations à la révolte contre les institutions établies et aux attentats contre les vies humaines ».
4. «Agir autrement s’analysera en déni de justice de votre part et votre inactivisme sera considéré un fait de complicité avec les faits répréhensibles évoqués ci-avant ».
AUCUN DES PGR PENDANT LEURS MANDATS N’A OSÉ LE FAIRE…
En attendant d’en savoir plus sur les raisons pour lesquelles le PG Firmin Mvonde n’ouvre pas cette information judiciaire dans son propre office (probablement parce que la résidence du cardinale est du ressort du Parquet de Matete) et, surtout, met sous pression le destinataire concerné par le 4ème paragraphe, il est prévisible que l’auteur bénéficiera du soutien spontané des faucons de la fatshiphère pendant que les colombes – certainement plus nombreuses – vont préférer se taire.
Et pour cause !
En 64 ans d’indépendance du Congo, cette initiative est une première. Le Congo a connu des cardinaux comme Joseph Malula, Frédéric Etsou et Laurent Monsengwo qui en avaient fait voir de toutes les couleurs à Mobutu, à L-D. Kabila et à Joseph Kabila.
Aucun des PGR, pendant leurs mandats, n’a osé faire ce qui est en train de se faire. Ce n’est pas qu’ils en ont manqué l’occasion. Au contraire. Certainement que les prédécesseurs de Félix Tshisekedi leur ont interdit de franchir le Rubicon.
Il y a d’ailleurs des doutes qu’au moment où il renoue avec l’Occident judéo-chrétien (il se rend en Allemagne et en France), le Chef de l’Etat ait donné sa caution à une telle initiative.
La question est alors de savoir si le PG près la Cour de cassation a agi de son propre gré ou s’il y a été forcé.
FÉLIX TSHISEKEDI A LE DEVOIR DE SE DÉSOLIDARISER
A supposer qu’il ait été mis sous pression, il aurait dû démissionner en invoquant la formule consacrée : « Pour des raisons personnelles ».
Et comment !
Imaginons le cas de figure d’un Fridolin Ambongo rentrant de l’étranger et se rendant directement à l’Office du PG pour se faire verbaliser et même se faire arrêter, maintenant que le moratoire sur la peine de mort est levé ! Car, ayant quitté le pays par l’aéroport international de Ndjili le 14 avril 2024, le Cardinal doit être rentré à Kinshasa pour que la convocation ou l’invitation qui lui a été adressée le 25 avril se comprenne. On risque d’avoir une «Marche des Chrétiens » en version dangereuse.
Déjà, au stade où on en est, le PG ne peut plus émettre une convocation. Il doit établir un mandat d’amener. Et puisque les craintes d’une fuite sont évidentes, il aura le choix entre envoyer le Cardinal à la prison centrale de Makala ou le mettre en résidence surveillée. Et, pour finir, le condamner. Question de ne pas créer un précédent qui ferait jurisprudence pour tous les autres Congolais auteurs de la même infraction !
En plus, dans le contexte actuel, c’est toute la technostructure institutionnelle en voie de construction qui risque de s’écrouler.
Félix Tshisekedi a le devoir de se désolidariser de cette initiative politiquement maladroite.
INITIATIVE CONTRE-PRODUCTIVE POUR LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Et cela pour une raison simple : l’événement de son séjour en Allemagne et en France risque de passer au second plan pour les médias occidentaux qui vont imposer la priorité à ce qui deviendra l’affaire Fridolin Ambongo.
On ne parlera effectivement que de l’Est. D’ailleurs, depuis ce dimanche 28 avril 2024, ces médias en font l’info principale pour la RDC. Des informations importantes comme la mise en place des institutions en retard d’installation, la situation sécuritaire à l’Est, les inondations du lac Tanganyika, et même l’affaire Apple disparaîtront des chaînes de télévision et de radiodiffusion tout comme des colonnes des tabloïds. Ceci de un. De deux, les officiels allemands et français lui demanderont de lâcher du lest.
Il est à espérer, dans la foulée, que ni l’UDPS en particulier, ni l’USN en général n’en feront leur cheval de bataille.
Pendant qu’on y est, l’opinion pourrait aussi se demander si à son office le PG près la Cour de cassation a également des dossiers ouverts à charge des éléments du M23 et de l’AFC.
Un dossier comme celui-là doit se régler impérativement en politique et en diplomatie. Pas en procès judiciaire généralement retentissement !
De toutes les façons, pour l’heure, l’évidence à reconnaître unanimement est que cette initiative est simplement contre-productive, en interne et en externe, pour Félix Tshisekedi qui se retrouve, sans peut-être le savoir ni le vouloir, avec une sale épine dans la plante du pied…
Omer Nsongo die Lema (CP)