Comme à chacune des Conférences des Nations Unies sur le changement climatique (COP), et singulièrement après la COP 21 de Paris en 2015, la position des pays africains n’a pas varié d’un pouce. Les émissions de gaz à effet de serre produits par le continent africain dans son ensemble dépassent à peine 4%. Année après année, les Africains pressent les pays gros pollueurs dont les Etats-Unis, la Chine et l’Union européenne à contribuer substantiellement au financement des programmes destinés à préserver les écosystèmes capteurs de carbone tels l’Amazonie ou le bassin du Congo. Et à chaque fois, des engagements mirifiques sont exprimés par les pays industrialisés sans qu’ils ne soient suivis d’effets.
La conférence ministérielle préparatoire de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique se clôture ce mercredi 5 septembre à Kinshasa. Pendant trois jours, environ 20 chefs de gouvernements des cinq continents ont balisé la voie de la COP27 convoquée dans la ville de Charm-el-Cheikh en Egypte, du 7 au 18 novembre 2022. Loin des caméras et les portes du palais du peuple fermées, des sources crédibles rapportent que les discussions coprésidées par la RD Congo et l’Egypte n’ont pas été des plus cordiales.
Les plénipotentiaires africains ont clairement reproché la mauvaise foi manifeste de leurs partenaires occidentaux. Ils ont rappelé la promesse non tenue d’un financement de 100 milliards US faite à l’issue de la conférence de Paris de 2015. Le Secrétaire général des Nations Unies saluait alors l’Accord de Paris qui était un triomphe monumental pour les gens et notre planète. « Il ouvre la voie à des progrès pour éliminer la pauvreté, renforcer la paix et assurer une vie de dignité et d’opportunités pour tous», se félicitait Ban Ki-moon.
Au cours des années qui ont suivi, les engagements internationaux pris par les parties à la convention des Nations Unies avant et pendant la COP 26 à Glasgow en Ecosse sont ignorés sur toute la ligne. Par conséquent, le réchauffement climatique s’accélère, réduisant l’intention maintes fois exprimée de la réduction des émissions de 1,5% à un vœu pieux.
RDC : Changements climatiques et ressources naturelles
La Représentante de la République démocratique du Congo à la Pré-COP27 de Kinshasa est restée dans la droite ligne du discours du Chef de l’Etat à la 77ème Assemblée générale des Nations Unies. Eve Bazaiba a tordu le cou aux détracteurs du lancement par le gouvernement d’appels d’offres en vue de l’exploitation d’une trentaine de blocs pétroliers et gaziers, sous prétexte que certains des sites identifiés empièteraient sur des écosystèmes et des aires protégées.
«Nous avons besoin d’exploiter nos ressources naturelles et trouver du pain à nos enfants», a-t-elle déclaré, « (…) Plusieurs pays africains ont du mal à opérer un choix entre la survie de leurs populations et le contrôle des émissions de gaz à effet de serre, alors que le continent n’est responsable que de 4% des émissions mondiales. Que faire dans ces circonstances ? Exploiter nos ressources et nourrir nos enfants ou les contempler et les laisser mourir de faim ?»
Selon la VPM en charge de l’Environnement et Développement durable, l’heure est venue que les pays pollueurs trouvent dans le rehaussement du prix du carbone forestier l’opportunité d’appuyer l’autofinancement de l’action climatique dans les pays dotés d’importantes ressources forestières. Et s’adressant particulièrement aux délégués des pays industrialisés, elle a lancé : « (…) Nous sommes capables de contribuer aux fonds d’adaptation et d’atténuation et d’aider nos frères des pays les moins avancés qui ne sont pas aussi dotées naturellement que nous pour lutter contre ce phénomène. Ne portez pas le poids du financement de l’action climatique mondial seuls. Faites de vos bassins forestiers tropicaux vos partenaires dans cette lourde responsabilité».
John Kerry tente de rassurer
L’envoyé spécial du président américain Joe Biden a tenté de temporiser. John Kerry a annoncé que les Etats-Unis tiennent disponibles 12 milliards de dollars US pour l’accès aux crédits carbone en faveur des pays qui polluent moins sur une période de cinq ans. Et que 3 milliards seront décaissés en 2022. « Nous travaillons déjà dans un mécanisme de financement pour les rendre disponibles pour ceux qui vont créer des affaires viables respectueuses de l’environnement» a-t-il assuré.
Sans répondre directement à la détermination de la RD Congo à exploiter ses ressources naturelles où qu’elles se trouvent pour son développement économique, John Kerry a laissé entendre qu’il y a possibilité d’établir l’équilibre entre la possibilité de conserver la nature et la création d’emplois en RDC.
Une position ambiguë qui n’établit pas avec clarté les investissements créateurs des emplois supposés, tant l’administration américaine ne semble pas pressée d’investir en RD Congo, pays qu’ils considèrent comme un foyer d’instabilité politique endémique d’une part, et miné par la corruption, d’autre part.
M.M.F.