Le cabinet du Chef de l’Etat serait-il déjà cette cour du roi Pétaud. Après le drame vécu au terme de sa récente tournée dans le Grand Kasaï, le Président de la République a promis de faire le grand ménage dans sa cour. Une onde de choc qui pourrait bien s’étendre jusqu’au Gouvernement. Au QG de l’UDPS, dans la commune de Limete, les « combattants » ne cachent plus leur colère face à ce qu’ils qualifient d’affairisme de l’entourage du Chef de l’Etat. Une fatwa circulerait dans les couloirs contre certains cadres du parti. Dans le cabinet du Chef de l’Etat, la panique gagne les rangs. Le malaise est perceptible. Ça se bouscule dans tous les sens.
Il ne faut pas être devin pour se rendre compte que quelque chose ne tourne pas rond dans la cour du Chef de l’État, Félix Tshisekedi. Des conseillers qui se tirent publiquement à boulets rouges, des fonds publics détournés et des marchés publics attribués alors que la présidence de la République n’a pas vocation de s’occuper de telles affaires.
Ce désordre, en cours à la Présidence de la République, ne peut laisser indifférent le Chef de l’Etat ou la population congolaise.
Prenant leur responsabilité, les Congolais le font savoir, à commencer par des membres de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), le parti présidentiel. Des jeunes ont appelé à la chasse aux conseillers du Président de la République, établissant une liste nominative de ceux qui devraient subir les affres de leur colère. Malheureusement, pour ces appels à la violence, la justice congolaise est restée indifférente.
Le parquet, qui a été prompt à se saisir du cas de Jacky Ndala, coordonnateur de la Ligue des jeunes d’Ensemble pour la République de Moise Katumbi, se montre complaisant envers les membres de l’UDPS qui ont passé des appels à la violence contre des personnalités bien identifiées et proches du Président de la République. Là n’est pas l’objet du jour.
Les conseillers du Chef de l’État qui composent sa cour ainsi que d’autres proches ont offert un spectacle désolant qui n’honore personne ! Aussi curieux que cela puisse paraître, le directeur de cabinet du Chef de l’Etat, Guylain Nyembo, a écrit une lettre au vitriol au ministre des Finances qui a réagi à travers un communiqué en des termes qui ne font l’ombre de doute sur le malaise entre les deux personnalités. Ce qui pouvait être réglé à travers la concertation a été porté sur la place publique.
Plus grave à charge de Guylain Nyembo, il a décidé, selon une lettre qui circule sur les réseaux sociaux, d’attribuer le marché de fourniture des plaques minéralogiques pour des véhicules à une société privée, se substituant à la Direction générale des impôts (DGI) qui en a la prérogative, selon la loi.
En matière de gestion d’un État, il n’est pas question de s’octroyer des prérogatives tant que la loi ne vous désigne pas comme décideur en la matière de manière expresse. Les compétences ne sont-elles pas d’attribution ?
Ce qui a le plus scandalisé tout le monde, le Chef de l’État compris, est la situation chaotique du Grand Kasaï où le Président de la République a constaté de ses yeux que rien n’a été fait dans le sens voulu par lui-même. Le président de la République a été «meurtri» par ce qu’il avait vu dans le Grand Kasaï.
A la manœuvre, les propres conseillers du Chef de l’État associés dans la réalisation des projets financés par le Trésor public. Certains ont été interrogés par les services sur l’utilisation des fonds.
Présent dans la délégation qui a accompagné le Président de la République dans le Grand Kasaï, José Mpanda, ministre de la Recherche scientifique et Innovation technologique, n’a pas fait dans la dentelle, face à la situation désastreuse du Grand Kasaï.
Dimanche devant la presse, réunie à son fief électoral de Mbuji-Mayi, José Mpanda est allé droit au but : «C’est nous qui faisons du mal au Président. Tshisekedi a fait sa part. Mais il y a beaucoup de voleurs ».
Il s’est dit «étonné» de ce qu’il a vu dans le Grand Kasaï : «Tshilejelu : zéro, DAIPN : zéro, Nkuadi : zéro. Ce que je dis là, je l’ai vécu moi-même. J’étais aux côtés du Chef de l’Etat, j’ai entendu les gens en train de parler, qu’on nous a trompé ici. Les gens en train de parler comme dans un tribunal public », a-t-il dit.
Des fonds, pourtant débloqués, ont été détournés, jure José Mpanda. « Qu’on arrête les gens pour qu’ils restituent les fonds détournés. A Kananga sur le site Katende. On a trouvé les matériels en brousse, pourtant les fonds ont été débloqués il y a peu, soit 6 millions USD. A Ngandajika, nous avons vécu les choses étonnantes. Voilà pourquoi les gens ne voulaient pas que le Chef de l’Etat arrive», a-t-il poursuivi.
L’addition est salée
En fait, la cour du président Tshisekedi a apporté la preuve qu’elle est composée en majorité d’affairistes et d’opportunistes. Des gens qui ne sont pas venus aider le Président de la République dans la réalisation de sa vision pour le Congo.
Après trois ans d’exercice du pouvoir, il se constate que les écuries à la Présidence de la République ont accumulé des déchets qu’il faut rapidement nettoyer afin de booster la côte de popularité du Chef de l’État, en chute libre dans l’opinion.
Si personne n’est sacrifié, la crédibilité du Président de la République va se porter au plus mal. D’ailleurs, le Congolais ordinaire attend un signal fort d’un coup de balai qui donnera la mesure des dégâts enregistrés.
Le mal est profond, tous les Congolais le savent. Des solutions superficielles ne feront pas l’affaire du président de la République. Il lui faut des actions fortes de consolidation de son autorité non seulement envers les opposants, mais beaucoup plus dans son entourage. Le président de la République doit sacrifier des fidèles corrompus et incompétents qui écument la cité de l’Unité africaine et le palais de la nation. C’est le prix à payer.
C’est aussi le prélude de ce que pourrait être le prix pour un deuxième mandat qui s’éloigne de plus en plus à cause de l’image que les collaborateurs envoient dans l’opinion : l’image des jouisseurs !
Depuis 2019, les affaires de détournement de fonds publics se sont enchaînées autour du programme présidentiel de « 100 jours », de 15 millions de dollars US destinés aux compagnies pétrolières et disparus dans la nature, ou de la très contestée taxe téléphonique RAM, dont la Commission économique parlementaire n’arrive pas à en trouver trace dans les comptes publics. Tout cela entache fortement l’image de chantre de l’anti-corruption qu’a voulu se forger Félix Tshisekedi à son arrivée à la tête de la RDC. Cela laisse enfin l’étrange impression qu’à la place du changement de système promis par le chef de l’Etat, une nouvelle élite corrompue a pris la place de la précédente, laissant la majorité des Congolais à leur triste sort.
Soupçons de malversation, contrats douteux, conseillers présidentiels tout-puissants…, « la RDC de Tshisekedi toujours rongée par la mal gouvernance », conclut, à sa manière, Christophe Rigaud sur le site d’Afrikarabia.
Econews