Le Président Félix Tshisekedi a procédé à une série de nominations au sein de l’armée congolaise. Christian Tshiwewe sera le nouveau chef d’état-major des FARDC, mais la faiblesse de son parcours militaire interroge.
Le grand ménage continue dans l’armée congolaise. Le remplacement du chef d’état-major, Célestin Mbala, était dans les tuyaux depuis plusieurs mois. Le militaire avait déjà atteint l’âge de la retraite depuis un certain temps, mais surtout, il n’avait plus la confiance de Félix Tshisekedi, qui l’accusait toujours d’entretenir des liens avec l’ancien président Kabila. Mbala avait déjà été mis à l’écart de la gestion de l’état de siège, qui était piloté directement par le chef de la Maison militaire, Franck Ntumba et le ministre de la Défense, Gilbert Kabanda. Les deux adjoints de Mbala, eux aussi soupçonnés de rouler pour Kabila, ont été remplacés par le général-major Jacques Ishali Gonza, chargé des opérations et des renseignements, et par le général major Léon-Richard Kasonga Tshibangu, pourtant en âge d’être en retraite, pour gérer l’administration militaire et la logistique.
La confiance d’abord
Le profil du nouveau patron des FARDC, Christian Tshiwewe, montre clairement que le président Tshisekedi a souhaité privilégier la confiance plutôt que l’expérience. A 54 ans, Christian Tshiwewe dirigeait la Garde républicaine depuis 2 ans et était devenu l’ombre de Félix Tshisekedi, chargé de sa protection et de celle de ses proches. Une proximité qui a joué en la faveur du militaire, tout comme ses origines katangaises.
Mais l’arrivée du nouveau chef d’état-major n’est pas sans créer des remous au sein de l’armée, qui attend toujours «un nouveau souffle pour éradiquer l’indiscipline et redonner le moral aux troupes», explique une source sécuritaire. Chez les sous-officiers, certains s’interrogent sur la faiblesse du parcours militaire de leur nouveau patron «qui n’aurait jamais dû le porter à ce niveau de responsabilités». Christian Tshiwewe a été formé au Soudan en 1999 sous Laurent-Désiré Kabila.
«Il n’a pas de faits d’armes reconnus et a toujours fait carrière dans les grandes villes», nous glisse un militaire.
Une armée apathique
La confiance du chef de l’Etat permettra sans doute au général Christian Tshiwewe d’être mieux inclus dans la chaîne de commandement, contrairement à Célestin Mbala. Mais aura-t-il les coudés franches pour s’imposer face à Franck Ntumba, de la Maison militaire, et au ministre de la Défense qui sont visiblement aux commandes ?
Beaucoup craignent qu’il ne puisse asseoir véritablement son autorité, et donc que la situation ne change pas vraiment sur le terrain. Car ces nouvelles nominations interviennent dans un contexte particulièrement tendu au sein de l’armée. L’état de siège, censé ramener la paix dans l’Est depuis mai 2021, est un échec, et la ville de Bunagana est depuis plus de 100 jours dans les mains des rebelles du M23. L’armée est apathique, sans solution face au conflit, et semble attendre désespérément l’aide des troupes de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC) qui se met péniblement en place.
Un nouveau souffle sur l’armée ?
Pourtant, le président Tshisekedi n’a pas ménagé ses efforts pour tenter de faire le ménage au sein de son armée. Par petites touches successives, il s’est débarrassé de plusieurs officiers supérieurs, comme le général Numbi, ou plus récemment le général Philémon Yav, accusé d’entretenir des relations avec les rebelles du M23 et le Rwanda, ou encore en mettant sur la touche son conseiller en matière de sécurité, François Beya, soupçonné de vouloir renverser le pouvoir. Tour cela sera-t-il suffisant pour réformer l’armée congolaise, dont les militaires eux-mêmes attendent beaucoup?
Pour l’instant, le nouveau souffle tant attendu dans le secteur de la sécurité n’est pas encore arrivé. La corruption, l’affairisme et la collusion avec les groupes armés de certains officiers supérieurs continuent. Félix Tshisekedi tente de trouver les hommes qui lui seront le plus fidèles… et donc redevables. La mission est capitale pour le chef de l’Etat qui souhaite briguer un second mandat en 2023, mais cela permettra-t-il de mettre sur pied une armée disciplinée, efficace et dépolitisée ? Pour l’heure, beaucoup en doute.
Avec Afrikarabia