Le Conseil de sécurité de l’ONU va se réunir ce vendredi à la demande de la Russie sur le sabotage présumé des gazoducs Nord Stream en mer Baltique, ont annoncé la Suède et la présidence française. «La France, en tant que présidente du Conseil de sécurité, nous a informés que la Russie avait demandé une réunion sur les fuites de Nord Stream et que cette réunion était prévue vendredi», a déclaré la ministre suédoise des Affaires étrangères Ann Linde lors d’une conférence de presse. La Suède et le Danemark ont été chargés de donner des informations aux membres du Conseil sur ces fuites survenues dans leurs zones économiques exclusives, a-t-elle précisé. Objet de tous les soupçons après le sabotage présumé des gazoducs, la Russie avait contre-attaqué plus tôt mercredi, en réclamant cette réunion du Conseil de sécurité de l’ONU en pointant les États-Unis.
Tous les regards sont tournés vers la mer Baltique. Il devient de plus en plus clair pour l’Europe que les fuites dans les gazoducs Nord Stream I et Nord Stream II sont dues à un acte de sabotage.
Lundi matin, plusieurs explosions sont enregistrées dans les eaux du Danemark et de la Suède, avant que les fuites ne soient détectées. Cet incident survient alors que l’approvisionnement en gaz est un sujet central entre l’Europe et la Russie, depuis la guerre en Ukraine.
Les trois fuites sont apparues simultanément à 80 m de profondeur : sur Nord Stream II, et à deux endroits différents, sur Nord Stream I. À l’arrêt, les gazoducs contenaient du gaz pour maintenir la pression.
«Ce n’est pas un accident. Plusieurs explosions ont été observées en peu de temps sur plusieurs pipelines», note Mette Frederiksen, Première ministre du Danemark. Magdalena Andersson, la Première ministre de la Suède, est plutôt modérée : «Nous avons nos propres informations, mais nous avons également reçu des informations du Danemark. Et la conclusion de celles-ci est qu’il s’agit d’un acte délibéré. C’est probablement un sabotage ».
Alors que Bruxelles dénonce un sabotage inacceptable, tous les soupçons se dirigent vers la Russie, qui dément être à l’origine de ces fuites. Le Kremlin riposte, et annonce l’ouverture d’une enquête pour acte de terrorisme international. Le conseil de sécurité de l’ONU va se réunir ce vendredi à la demande de la Russie, pour aborder ce sabotage présumé.
«La France, en tant que présidente du Conseil de sécurité, nous a informés que la Russie avait demandé une réunion sur les fuites de Nord Stream et que cette réunion était prévue vendredi », a indiqué Margot Wallström, la ministre suédoise des Affaires étrangères
La Suède et le Danemark ont été chargés de donner des informations aux membres du Conseil sur ces fuites survenues dans leurs zones économiques exclusives, a-t-elle précisé.
Le Danemark a prévenu, il ne sera pas possible de plonger pour inspecter la zone endommagée avant deux semaines, le temps que les intenses bouillonnements diminuent.
Les conséquences de ces fuites sont également écologiques. Selon les estimations, au moins 200 000 tonnes de méthane pourraient se retrouver dans l’atmosphère. Soit l’équivalent des émissions annuelles d’1,4 million de voitures.
Une catastrophe pour le climat?
Si les causes exactes des fuites suspectes sur les gazoducs Nord Stream en mer Baltique demeurent inconnues, les conséquences, à la fois économiques mais également écologiques, peuvent quant à elle déjà se mesurer. À quel point cette « marée blanche » peut-elle être néfaste pour l’environnement et avoir un impact sur le réchauffement climatique? Tentative de réponse.
Selon les experts, les fuites découvertes sur les gazoducs auraient manifestement été causées par un sabotage intentionnel du pipeline.
Moscou soupçonné de sabotage
«On ne peut pas imaginer autrement comment trois tuyaux de gaz peuvent être en même temps victimes d’une fuite », explique Johan Lilliestam, chercheur à l’institut de développement durable de Potsdam, cité par l’AFP.
C’est aussi l’hypothèse privilégiée par les autorités polonaises et danoises. L’armée danoise a partagé des photos et vidéos montrant trois énormes bouillonnements à la surface de l’eau repérés ce mardi. Tous les regards se posent sur Moscou, même si le Kremlin a également condamné l’incident.
Des conséquences potentiellement dramatiques pour le climat
Si ces fuites n’ont eu, pour l’instant du moins, qu’un effet limité sur les prix du gaz (le coût du TTF néerlandais, qui sert de référence, a pris 10%, avant de repartir à la baisse, NDLR), les conséquences pour la planète pourraient être bien plus négatives.
En effet, les fuites vont libérer « plusieurs millions de tonnes d’équivalent CO2 » dans l’atmosphère, affirme à l’AFP Sasha Müller-Kraenner, de l’ONG environnementale allemande DUH. Or, le gaz libéré, du méthane (CH4), générera des «conséquences dramatiques » en matière de réchauffement climatique, a-t-il ajouté.
Interrogé par Libération, Thomas Lauvaux, chercheur au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement, précise qu’une fuite classique sur un pipeline terrestre peut relâcher jusqu’à 6 à 7 millions de mètres cubes en une journée. Dans le cas de Nord Stream, pipeline sous-marin, une toute petite quantité de gaz peut se dissoudre dans l’eau mais la quasi-intégralité s’échappe dans l’atmosphère.
Pas de risque pour la faune et la flore
Or, le méthane est un gaz au pouvoir réchauffant 84 à 87 fois plus puissant que le CO2 sur vingt ans, rappelle au quotidien français Anna-Lena Renaud, de l’association « Les Amis de la Terre ». Et sur un siècle, il l’est encore trente fois plus que le dioxyde de carbone. Reste donc à voir combien de millions de mètres cubes de méthane vont se déverser dans l’atmosphère. D’autant plus que les réparations, difficiles puisque sous-marines, pourraient durer des jours, voire des semaines. Et même si le robinet est coupé, les pipelines doivent contenir un minimum de gaz pour maintenir la pression, rappelle Libé.
Pour la faune et la flore maritimes, en revanche, les conséquences sont limitées. « Le méthane ne se dissout pas non plus dans l’eau, il n’y a donc heureusement rien à craindre », a rassuré le ministère français de l’Environnement à l’AFP.
Econews avec Euronews