Scandale aux Affaires sociales et humanitaires : l’ODEP dénonce la modicité des aides entre 2020 et 2023

Dans un rapport alarmant révélé par l’Observatoire de la Dépense Publique (ODEP), il a été mis au jour le fossé béant entre les sommes allouées aux sinistrés de guerre et les avantages mirobolants accordés aux autorités politiques en fonction. Alors que des millions de personnes déplacées par les conflits espéraient un minimum d’aide pour survivre, seuls des montants dérisoires ont été débloqués sur une période de quatre ans.

Entre 2020 et 2023, sur un montant total de 196 millions de dollars prévus pour les sinistrés, seuls 19 millions de dollars ont effectivement été débloqués, soit à peine 4,5 millions par an. Cette misérable somme se traduit par une aide insignifiante de 0,6 dollars par personne déplacée en quatre ans, soit l’équivalent de 500 francs congolais sur une période de quatre années, ou 150 francs congolais par année.

Face à ces chiffres accablants, l’ODEP n’a pas caché son indignation. « Cela veut dire que chacun des 7 millions de déplacés de guerre n’a reçu que 0,6 dollars d’aide en 4 ans, soit 500 Fc en quatre ans ou 150 francs congolais par an pour vivre pendant toute une année», a déploré l’observatoire. Qualifiant cette situation d’irresponsabilité et de cruauté, l’ODEP soulève des questions essentielles sur la moralité et la compassion des autorités en charge de ces questions cruciales.

Cette révélation met en lumière l’urgence d’une réforme profonde pour garantir que les ressources de l’État soient allouées de manière équitable et judicieuse, en priorisant les besoins des populations les plus vulnérables. Il est impératif que les responsables politiques rendent des comptes et que des mesures concrètes soient prises pour remédier à cette injustice flagrante.

En attendant, cette affaire révèle les priorités moralement discutables de certains acteurs politiques et soulève des questions sur la solidarité et l’empathie au sein de la société. Il est grand temps que des actions concrètes soient entreprises pour garantir que les sinistrés reçoivent l’aide nécessaire pour reconstruire leur vie et retrouver un semblant de dignité.

Voici le communiqué de l’ODEP, signé par le professeur Florimond Muteba, président de son Conseil d’administration.

Econews

Financement de la crise humanitaire dans l’Est de la RDC : 150 FC par année pour chacun des 7 millions des déplacés de guerre

Nous démarrons cette étude par des extraits d’un article intitulé : «RDC : 7 millions de déplacés et crise «sans précédent», selon l’ONU», publié sur le site africanews.com, en date du 13 mars 2024.
L’escalade de la violence dans l’Est de la République Démocratique du Congo a entraîné le déplacement d’au moins 250.000 personnes au cours du mois de mars a déclaré un haut fonctionnaire des Nations Unies, décrivant en mars dernier la situation comme une crise humanitaire sans précédent.
Loin de la capitale du pays, Kinshasa, l’Est du Congo est depuis longtemps envahi par plus de 120 groupes armés qui cherchent à obtenir une part de l’or et des autres ressources de la région tout en perpétrant des massacres. Il en résulte l’une des plus grandes crises humanitaires au monde, avec environ 7 millions de personnes déplacées, dont beaucoup sont hors de portée de l’aide. (Un tel nombre de personnes déplacées en si peu de temps est sans précédent).
Au milieu de l’intensification des combats avec les forces de sécurité, le groupe rebelle M23 – le plus dominant dans la région et qui a des liens avec le Rwanda voisin – a continué à attaquer des villages, forçant de nombreuses personnes à fuir vers Goma, la plus grande ville de la région, dont la population estimée à 2 millions d’habitants est déjà débordée par des ressources inadéquates.
Bien que le M23 ait déclaré viser les forces de sécurité et non les civils, il a assiégé plusieurs communautés, avec environ la moitié de la province du Nord-Kivu sous son contrôle, selon Richard Moncrieff, directeur de la région des Grands Lacs du Crisis Group, laissant de nombreuses personnes prises au piège et hors de portée de l’aide humanitaire.
Que fait le gouvernement congolais pour faire face à cette grave crise humanitaire ?
Réélu sur fond des soupçons d’une vaste fraude électorale pour un second mandat de cinq ans en décembre, le président congolais Félix Tshisekedi a accusé le Rwanda voisin de fournir un soutien militaire aux rebelles. Le Rwanda nie ces accusations, mais les experts de l’ONU ont déclaré qu’il existait des preuves substantielles de la présence de ses forces au Congo.
Les forces de maintien de la paix de la région et de l’ONU ont été invitées à quitter le Congo après que le gouvernement les a accusées de ne pas avoir réussi à résoudre le conflit.
Il faut trouver une solution aux souffrances, aux déplacements, à la perte des moyens de subsistance, à la perte de l’éducation.
Que fait le gouvernement congolais depuis 2021 ?
De 2020 à 2023 le total des prévisions budgétaires en 4 ans pour le secteur des affaires sociales et humanitaires est de 196 millions de dollars. Le taux d’exécution de ce budget est de 37 millions de dollars en 4 ans mis à la disposition du Ministère des affaires sociales et humanitaires, soit à peine 19% des prévisions. Selon les informations mise à notre disposition, les dépenses humanitaires représentent 50% de ce budget, soit en moyenne 19 millions de dollars en 4 ans, en moyenne 4,5 millions par année.
Cela veut dire que chacun des 7 millions des déplacés de guerre n’a reçu que 0,6 dollars d’aide en 4 ans, soit 500 FC en quatre ans ou 150 Francs congolais par an pour vivre pendant toute une année.
A quel genre d’êtres humains avons-nous confié nos vies ? Quel niveau d’irresponsabilité et de cruauté ?
Nous savons tous que la communauté internationale ne comblera jamais un tel déficit. La vie d’un congolais n’a aucune valeur pour un occidental.
Ce scandale est un énorme crime contre l’humanité que nous dénonçons sans complaisance. Pendant ce temps, la corruption et les détournements, le blanchiment des capitaux battent le plein. Le train de vie de l’Etat et surtout celui des institutions atteignent des niveaux en franchissant toutes les lignes rouges, les députés grossement payés.
En considérant la situation de sinistre que traverse 7 millions de nos compatriotes, que fait le gouvernement ?
Sept (7) millions c’est la population de toute une nation et représente la moitié du nombre de la population du Rwanda, presque le nombre de la population du Congo-Brazzaville, trois fois la population du Gabon, deux fois la population de la Province du Kasaï, deux fois la population de la province du Kwilu, etc…
Pour bien comprendre ce que fait notre gouvernement depuis 2021, nous avons analysé les lois des finances 2021, 2022 et 2023.
Mais avant de présenter les résultats de notre analyse, nous avons essayé de faire des prévisions réalistes en besoin d’assistance à ces réfugiés internes en partant du chiffre de 7 millions.
La proposition minimale d’une aide pour la survie nous la situons à 2 dollars par jour soit 14 millions de dollars par jours pour l’ensemble des populations sinistrés soit 220 millions par mois et un total de deux milliards 244 millions de dollars à mobiliser pour une année rien que pour les besoins physiologiques de base. Si nous incluons les infrastructures et les déplacements, nous pouvons arrondir tous les besoins à 3 milliards de dollars par an pour nos compatriotes, «Ce peuple d’abord» en péril et qui meurt tous les jours par manque d’une prise en charge appropriée de notre gouvernement qui prétend disposer d’un budget de 16,8 milliards de dollars.
Pour exemple, comparons la situation financière des dépenses humanitaires à celle d’une institution comme l’Assemblée Nationale :
1°) La situation salariale annuelle : 33.000 $ x 500 députés x 12 mois = 198.000.000$
2°) Frais d’installation annoncés : 400.000$ x 500 députés = 200.000.000$
3°) Vote confiance au gouvernement : 50.000$ x 500 députés = 25.000.000$
Total dépenses partiellement identifiées pour l’année 2024 = 423 millions $
En même temps, il est important de rappeler ici, face à la crise humanitaire, comment évolue la qualité de la gouvernance budgétaire et financière du pays.
Le gouvernement de Sama LUKONDE après avoir déposé en 2023 la loi sur la reddition des comptes 2022 au parlement, le Ministre des finances a présenté ladite loi au Parlement.
Lors du débat en plénière, les intervenants ont déploré les dépassements budgétaires dans toutes les institutions du pays.
L’article 87 de la loi n°11/011 du 13 juillet 2011 relative aux finances publiques dispose que l’examen du projet de loi portant reddition des comptes est un préalable au vote du projet de loi de finances de l’année. Par ailleurs, l’article 82, point 2 de cette loi impose que le projet de loi de reddition des comptes soit accompagné du rapport de la Cour des Comptes. A ce sujet, le speaker de la chambre basse a confirmé que ce rapport et autres documents se rapportant à ce projet de loi ont été bel et bien distribués aux députés nationaux.
Que faut-il retenir du cancer des dépassements budgétaires en 2022 ?
Sept (7) institutions et 22 ministères accusent des taux d’exécution au-delà de 100%. Il s’agit de la Présidence de la République 190%, la primature 132%, l’Assemblée Nationale 145%, le Sénat 184%, le Secrétariat Général du gouvernement 257%, la CENI 145%, la Cour des Comptes 126%, les Affaires Etrangères 401%, Intérieur et Sécurité 183%, Défense et anciens combattants 249%, Economie nationale 100,83%, Finances 182%, Budget 334%, Justice 202%, Relations avec le Parlement 132%, Santé 124%, EPST 107%, ESU 113%, Agriculture 141%, Industrie 334%, Commerce Extérieur 138%, Communication et Médias 130%, Affaires foncières 216%, Environnement 371%, Sports et Loisirs 288%, Intégration régionale 155%, Affaires coutumières 102%, Aménagement du territoire 365%.
En même temps, que les dépassements sont pratiqués ailleurs, les dépenses humanitaires prévues de 2020 à 2023 sont en sous consommation. 19% de toutes les prévisions. Où est la justice distributive ? Où est la solidarité nationale ? Et le slogan «Le peuple d’abord »?
En vain, l’ODEP a réclamé depuis 2019 la réduction du train de vie de l’Etat et la promotion des politiques de justice distributive et de solidarité nationale. Où en sont les réformes réclamées à ces sujets ?
Fait à Kinshasa, le 04 juin 2024
Pour l’Observatoire de la Dépense Publique
Florimond Muteba Tshitenge
Président du Conseil d’administration