Directeur général de l’Agence congolaise de presse (ACP), Bienvenu-Marie Bakumanya, a de grandes ambitions. Nommé à ce poste, après un passage réussi à l’antenne congolaise de l’Agence France presse (AFP), Bakumanya est porteur d’une vision de grandeur pour l’ACP. Il a mis en place un management qui insuffle un vent de renouveau à l’ACP. A l’ACP, la modernité se conjugue au présent. Depuis lors, l’ACP diversifie de partenariat pour étendre sa couverture. Et Bakumanya ne pense d’arrêter en si bon chemin. Il pense déjà à la réouverture de l’antenne de Bruxelles, en Belgique. « Aujourd’hui, on peut dire que l’ACP a retrouvé les voies des standards. Nous avons sensibilisé notre Ambassadeur en Belgique. Il était très réceptif à notre discours. Notre bureau de Bruxelles sera opérationnel sous peu », pense-t-il. Avec la nouvelle «loi Muyaya » sur l’exercice de la liberté de la presse en République Démocratique du Congo, Bienvenu-Marie Bakumanya note que « l’ACP est un instrument central pour réussir la salubrité médiatique en RDC prôné par le chef de l’État ». « Aider l’ACP à se moderniser revient à réussir le pari de la salubrité médiatique », rappelle-t-il. Brillant et talentueux journaliste, Bienvenu-Marie Bakumanya s’est confié au quotidien Le Journal. Interview.
Vous êtes directeur général de l’Agence congolaise de presse, qu’est-ce que cet accord conclu la semaine dernière à Bruxelles avec l’agence Belga, va apporter concrètement à votre média ?
Avec Belga, nous avons voulu remettre les pieds en Europe avec un partenaire historique ayant pignon sur rue. L’ACP est la première agence non-européenne qui a conclu un partenariat avec Belga. Nous avons un retard dans la transition numérique. Ces partenariats que nous concluons ont pour objectif de nous permettre de combler notre retard sans trop attendre. Les expériences de nos partenaires nous seront très utiles. Nos journalistes ont besoin de formation pour l’utilisation des outils des nouvelles technologies. Avec Belga, en plus de l’échange des contenus, il y a ce volet formation qui occupe une place importante.
Avant Bruxelles, vous étiez à Alger en Algérie. Le même type de partenariat a été conclu. Avez-vous le sentiment d’avoir un grand retard à rattraper, un grand trou à combler par rapport aux autres agences ?
Nous avions tenu à signer le premier partenariat sous notre mandat avec une agence africaine. Nous l’avions fait avec Algérie presse service (APS). C’était un vrai soulagement. Prioritairement, avec l’APS, nous allons doter l’ACP d’un fil d’actualité. Cette plateforme va nous permettre d’être présents sur le terrain de la concurrence. Il y a aussi l’Agence marocaine de presse (MAP). On est déjà dans les échanges des contenus depuis quelques mois. L’Afrique plurielle est pour nous une priorité incontournable.
La migration vers le numérique est un défi énorme pour vous ?
Absolument ! Sans le concours financier des autorités de la République démocratique du Congo, nous ne serons pas en mesure de relever le défi de la transition numérique. On retrouve toutes les compétences au sein de notre établissement. Cet atout n’est pas utilisé comme il se doit faute d’une logistique adaptée à l’évolution exponentielle de la technologie. Notre tutelle comprend nos difficultés. Mais, ce n’est pas évident que les autres entités étatiques ont la même compréhension de ce que l’ACP représente pour le pays. Or, si la voix de la RDC peine à être audible, c’est parce que l’agence officielle n’est pas en mesure de se faire entendre. Le choix du Président de la République, Félix Tshisekedi, porté sur notre modeste personne, était un signal fort. Il voulait un technicien, un expérimenté en la matière. Même avec des moyens limités, nous relevons certains défis. La couverture de la visite papale a produit les premiers résultats grâce à une dotation de notre tutelle. Tout le monde, au pays et à l’international, avait apprécié notre couverture.
Au stade actuel, quelles sont les réformes urgentes à mener pour permettre à l’ACP de rejouer son rôle de pourvoyeur numéro un d’informations au pays ?
Lorsqu’on parle de l’ACP, on fait tout de suite référence à l’Agence Zaïre presse. L’AZAP était à la pointe de la technologie. Ce n’est pas le cas avec l’ACP. Il faut doter l’ACP d’un ou plusieurs fils d’actualité. Le préalable est d’avoir un serveur opérationnel adapté. Avec la SCPT, un premier pas vers la bonne direction est franchi. Mais ce n’est pas suffisant. Nous avons ouvert le chantier de la formation en écriture d’agence. Les archives sont aussi un problème à résoudre. Un partenariat est signé avec un opérateur privé. Les archives peuvent nous rapporter des recettes. Nous disposons des pièces rares de l’époque coloniale. Une richesse inestimable!
Il y a aussi un problème de la qualification du personnel, de son rendement et de l’outil de production ?
Le personnel de l’ACP est compétent, qualifié aussi. Mais honnêtement, un rafraîchissement s’impose. Une remise à niveau du personnel rédactionnel est une urgence. Au quotidien, nous y travaillons. Nous organisons aussi des ateliers avec des journalistes expérimentés qui passent à l’ACP. Le matériel est un vrai souci. Par respect et pudeur, je ne donnerai pas l’âge de notre parc informatique.
A quand le retour de la représentation de l’ACP dans les grandes capitales africaines, européennes, asiatiques et américaines ?
Une agence de presse forte est un outil diplomatique de première force. Il appartient aux autorités de jouer leurs partitions sur ce point. Nous avons un plan de déploiement. Nos événements, nos histoires ne sont mieux racontées que par nous-mêmes. Aujourd’hui, on peut dire que l’ACP a retrouvé les voies des standards. Nous avons sensibilisé notre Ambassadeur en Belgique. Il était très réceptif à notre discours. Notre bureau de Bruxelles sera opérationnel sous peu. Pendant notre dernier séjour, nous avons travaillé dans le sens de rouvrir ce bureau sans délai.
L’ACP, sous votre règne, sera un média ouvert à tous les courants sociopolitiques ou il sera aligné comme par le passé – périodes de Mobutu et les Kabila ?
L’ACP est un média. Donc, comme média, tous les courants ont accès à ce service public, sans discrimination. Nous accordons la parole à tout le monde sans distinction. L’État n’a pas de couleur.
Sentez-vous depuis que vous êtes là cet effort d’équilibrer l’information de la part de vos journalistes ?
Absolument ! Nos journalistes sont factuels dans leurs dépêches. Difficile de taxer les journalistes de l’ACP de travailler pour un seul courant. Comme média officiel, normal que les sons de cloches des institutions soient plus présents dans nos productions que ceux des opposants. Vous ne nous verrez pas dans des prises de position partisanes.
La nouvelle loi sur la presse a été ratifiée par l’Assemblée nationale après sa promulgation par le chef de l’État, pouvons-nous dire que ce soit le début de la salubrité médiatique comme l’avait exigé le chef de l’État ?
L’ACP est un instrument central pour réussir la salubrité médiatique en RDC prôné par le chef de l’État. C’est l’ACP qui doit donner le ton. Il n’y a pas d’autres voies à suivre pour réussir ce pari lancé par le président de la République, chef de l’État Félix-Antoine Tshisekedi. L’exemple du vrai professionnalisme doit venir des médias publics, principalement de l’ACP, la pourvoyeuse d’informations, ce grossiste qui a pour mission de servir les autres médias. Aider l’ACP à se moderniser revient à réussir le pari de la salubrité médiatique.
Selon vous, quelles sont les premières mesures à prendre pour assainir le secteur médiatique ?
Il faut appliquer les textes existants moyennant quelques amendements dans les statuts de l’Union nationale de la presse du Congo (UNPC) conformément aux résolutions des États généraux de la presse du Congo.
Etes-vous conscient que dans un cadre bien réglementé, la presse congolaise peut faire passer partout au monde le nouveau narratif?
La presse congolaise regorge des compétences inestimables. Je suis moi-même un pur produit de cette presse. Donc, nous sommes capables de faire mieux, parce que nous connaissons les problèmes de la presse congolaise et les acteurs de la crise actuelle. Il faut prendre la courageuse décision d’écarter les acteurs de la crise. Une presse malade comme la nôtre est comparable à une bombe nucléaire.
Avec le journal.net