Dos au mur, la France confirme son retrait militaire du Mali

L’annonce n’a donc rien d’une surprise. Présente au Mali depuis 2013, l’armée française va quitter le pays africain après la prise de pouvoir de la junte, a annoncé l’Elysée. Le calendrier de retrait reste à préciser. Toutefois, Paris ne quitte pas totalement le Sahel et promet repositionner ses troupes au Niger dans la lutte contre le terrorisme.

C’était attendu, c’est désormais officiel. La France, ses alliés européens dans Takuba et le Canada ont annoncé jeudi un «retrait coordonné» du Mali où l’armée française était arrivée en 2013 pour soutenir le pays face à la menace terroriste. «Une décision courageuse du président François Hollande», dixit Emmanuel Macron.

«En raison des multiples obstructions des autorités de transition maliennes, le Canada et les Etats européens opérant aux côtés de l’opération Barkhane et au sein de la Task Force Takuba estiment que les conditions politiques, opérationnelles et juridiques ne sont plus réunies pour poursuivre efficacement leur engagement militaire actuel dans la lutte contre le terrorisme au Mali et ont donc décidé d’entamer le retrait coordonné du territoire malien de leurs moyens militaires respectifs dédiés à ces opérations», écrivait l’Elysée dans un communiqué.

Au cœur de cette décision, pour laquelle la France a largement consulté ses alliés, l’instabilité dans le pays causé par le choix de la junte de Bamako arrivée au pouvoir après deux coups d’états de na pas organiser d’élections démocratiques. «Nous constatons et regrettons que les autorités maliennes de transition n’aient pas tenu leurs engagements envers la CEDEAO, soutenue par l’Union africaine, d’organiser des élections présidentielles et législatives avant le 27 février 2022. Nous exhortons les autorités maliennes à achever la période de transition et à organiser des élections libres, équitables et crédibles», précisait le communiqué.

Quelques instants plus tard, à l’occasion d’une conférence de presse, Emmanuel Macron a précisé : «Nous ne pouvons pas rester engagés militairement aux côtés d’autorités de fait dont nous ne partageons ni la stratégie ni les objectifs cachés. C’est la situation à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui au Mali. La lutte contre le terrorisme ne peut pas tout justifier, elle ne doit pas, sous prétexte d’être une priorité absolue, se transformer en exercice de conservation indéfinie du pouvoir.» En revanche, le chef de l’Etat «récuse complètement» toute idée de retrait sur un échec. «Que ce serait-il passé en 2013 si la France n’avait pas fait le choix d’intervenir ?» s’interroge-t-il face aux journalistes. Avant de répondre à sa propre interrogation dans la foulée : «Vous auriez eu à coup sûr un effondrement de l’Etat malien.»

La fermeture des dernières bases françaises au Mali prendra de «quatre à six mois», a déclaré Emmanuel Macron. «Pendant ce temps […] nous allons continuer d’assurer les missions de sécurisation de la Minusma», la Mission de l’Onu au Mali, forte de plus de 13.000 Casques bleus, a précisé le président français.

        L’Elysée mentionnait «juin 2022» comme échéance pour la définition du nouveau dispositif au Sahel. Encore 2.500 à 3.000 soldats français resteront dans la région d’ici après le retrait du Mali d’ici 6 mois indique l’État-major.

Des militaires reployés vers le Niger

Si la France quitte le Mali, elle ne délaisse pas pour autant le Sahel, a assuré l’Elysée. Des soldats européens participant au groupement de forces spéciales Takuba «seront repositionnés aux côtés des forces armées nigériennes dans la région frontalière du Mali», a fait savoir jeudi le président Emmanuel Macron après l’annonce du retrait du Mali de la force française Barkhane et de Takuba.

«Jusque-là, l’opération Barkhane et ses moyens héliportés et aériens constituaient en quelque sorte la force de réaction rapide disponible face aux djihadistes, note un officier français. D’un côté, si Barkhane plie bagage, le risque d’une partition violente du pays va s’accroître. De l’autre, si la junte malienne négocie avec les groupes rebelles, elle le fera sur le dos des Occidentaux.»

Un scénario d’autant plus inquiétant que les autorités de Bamako, sous pression des sanctions économiques décidées depuis le putsch par les pays voisins de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et par l’Union européenne, pourraient bien se retrouver rapidement devant une crise sociale majeure.

Econews avec AFP