Affaire Bukanga-Lonzo : pas de visa pour l’avocat français de Matata

«Vous n’y échapperez pas !» On se rappelle encore de cette phrase lancée par l’avocat de la République dans le procès qui a mis en cause Vital Kamerhe, alors directeur de cabinet du Chef de l’Etat, devant le tribunal de grande instance de Kinshasa/Gombe. La suite est connue. Vital Kamerhe a été condamné une lourde peine qui l’écarte définitivement de la vie politique active. En appel, sa peine a été légèrement assouplie, sans les tirer des geôles. On se rappelle encore que Kamerhe, qui a sollicité le concours d’un avocat français pour sa défense, a eu du mal à lui obtenir un visa pour la République Démocratique du Congo. Avec le temps, des révélations ont nettement prouvé qu’une lettre signée par le prof Kolongele Eberande, alors directeur de cabinet ad intérim du Président de la République, avait formellement interdit à l’ambassade de la RDC en France d’accorder un quelconque visa à l’avocat français. Comme Kamerhe, Matata Ponyo Mopon, qui comparait ce lundi 25 octobre devant la Cour constitutionnelle, vient de subir le même sort. Son avocat français, Me Antoine Vey, n’obtiendra pas un visa pour la RDC. Ainsi en ont décidé les autorités congolaises. Autant dire que, dans le procès Matata, la messe est déjà dite. L’ancien Premier ministre, poursuivi dans l’affaire Bukanga-Lonzo, est bel et bien sur les traces de Kamerhe. Il n’y échappera pas. Tous les éléments du puzzle ont été mis en place pour l’achever.

Il ne faut pas être spécialiste en droit pour se rendre compte que la voie que la Cour constitutionnelle veut suivre pour juger l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo Mapon viole la loi-mère. Comment peut-on fouler aux pieds une décision souveraine du Sénat qui a refusé que des poursuites soient engagées contre Matata et prétendre respecter la Constitution ? La Cour constitutionnelle poursuit un objectif, elle tient à l’atteindre par tous les moyens.

Dans ce cas, il est injurieux de parler de l’Etat de droit parce que simplement, il n’existe pas du tout. En rendant public l’extrait de rôle d’une audience dans l’affaire Bukanga-Lonzo et poursuivre Matata, la Cour constitutionnelle apporte la preuve qu’en République Démocratique du Congo, les régimes passent et se ressemblent en matière de respect de la Constitution. Tous font exactement la même chose et surtout de la même manière.

Le procès Bukanga-Lonzo va sonner la fin de l’État de droit parce que ce serait une violation flagrante de la Constitution de laquelle découlent toutes les autres lois de la République. Pire, cette violation sera l’œuvre de la plus haute instance judiciaire du pays. L’issue du procès importe peu. Mais le fait d’avoir pensé tenir un procès en violant la séparation du pouvoir constitutionnellement consacrée, on peut plus parler de l’Etat de droit. Il sera enterré.

Matata sur les traces de Kamerhe

L’ancien Premier ministre, Matata Ponyo Mapon, serait-il sur les traces de Vital Kamerhe, ancien directeur de cabinet du Chef de l’Eta, condamné jusqu’en appel dans le cadre du programme, dit de 100 jours ? De plus en plus, des analystes n’hésitent plus à faire le rapprochement entre le procès Matata, prévu ce lundi 25 octobre 2021 à la Cour constitutionnelle et la condamnation de Kamerhe.

Il y a un indice qui relie les deux affaires. On se rappelle que, pour sa défense, Vital Kamerhe a eu du mal à faire venir son avocat français pour renforcer son équipe de défense. En réalité, depuis Kinshasa, des instructions ont été clairement transmises à la représentation diplomatique de la RDC à Paris pour ne pas délivrer un visa à l’avocat français.

A l’instar de Kamerhe, Matata subi le même sort, car son avocat, Mme Antoine VEY, inscrit au barreau de Paris, n’obtiendra pas de visa pour la RDC. Des sources rapportent que Kinshasa s’est interposé dans cette procédure d’octroi de visa. Me Antoine VEY ne viendra donc plus à Kinshasa. Un handicap que Matata devra supporter lors de sa comparution devant la Cour constitutionnelle. Pour Papy Tamba, analyste politique, qui signe une tribune dans ce sens ne se gêne pas de parler d’un «scandale de plus». (Lire en encadré);

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