La délégation gouvernementale qui vient de séjourner à Kwamouth (province de Mai-Ndombe) est de retour dans la capitale. Ce mercredi, le vice-premier ministre, ministre de l’Intérieur, Daniel Aselo, et les membres de la délégation qu’il conduisait sont allés faire leur rapport au premier ministre. Leurs conclusions ne dégagent aucune avancée dans le conflit intercommunautaire qui oppose depuis début août les Téké et les Yaka. Et pour cause : les ministres n’ont pas pu entrer en contact avec les représentants de la communauté Yaka.
A la sortie de l’entrevue avec le premier ministre Sama Lukonde, le VPM et ministre de l’Intérieur n’a pas caché sa déception : «Nous qui nous sommes rendus à Kwamouth nous n’avons pas trouvé l’occasion de rencontrer nos frères Yaka (…). Il semble qu’ils sont tous dans la forêt… Pour des raisons d’équité, il est bon que la délégation se rende également dans le Kwango, précisément à Kenge, pour essayer de parler avec les responsables provinciaux et les autorités traditionnelles de manière à obtenir leur implication pour que ce que nous sommes en train de connaitre à Kwamouth ne puisse pas prospérer. Il faut que ça s’arrête ».
«Un accent particulier a été mis sur la nécessité d’une sensibilisation soutenue en direction des deux communautés, en même temps que des instructions ont été données aux forces de défense et de sécurité, chargées d’assurer la protection des populations, quelle que soit leur origine», a déclaré Daniel Aselo, ajoutant que le gouvernement ne peut pas accompagner une communauté à pouvoir se gêner de vivre avec une autre sur toute l’étendue du territoire.
Vers l’enlisement
De violents affrontements ont éclaté il y a un mois entre les Téké qui se considèrent comme les originaires de ce territoire, où se compte une forte présence des Yaka venus de longue date de la province du Kwango voisine. Des bribes d’informations reçues par bribes font état d’une mésentente qui serait née de l’occupation des terres agricoles par des fermiers yaka, mais surtout des taxes qu’ils jugent exorbitantes qui leurs seraient réclamées par des chefs de terre téké, sous peine d’être renvoyés dans leur milieu ancestral au Kwango.
La confrontation a déjà fait plus de 30 morts dont une demi-douzaine de militaires et policiers, dont les armes auraient été emportées par les insurgés des deux camps; des villages de l’une et l’autre communautés rasés, toutes les activités sont à l’arrêt.
Bien que l’administrateur du territoire de Kwamouth ait été suspendu lors du séjour de la mission du gouvernement, les dernières nouvelles rapportent la fermeture à la circulation, pendant 48 heures de la route nationale 17 où des barrages sont érigés par des jeunes Yaka ou Téké dont certains sont munis d’armes à feu.
Le précédent de Yumbi
C’est le deuxième conflit intercommunautaire survenu dans la province de Mai-Ndombe, après celui de Yumbi, qui a connu la même violence en décembre 2018 et qui avait opposé les Batende aux Banunu à la veille des élections générales. Le conflit sanglant avait été occasionné par la controverse autour du lieu de l’enterrement d’un chef coutumier Banunu.
Durant trois jours, des attaques sanglantes s’étaient produites dans plusieurs localités de ce territoire situé à 300 kilomètres au nord de Kinshasa. Le bilan avait fait état de 525 morts, selon le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme (BCNUDH), 461 selon le gouvernement. Les deux rapports mettant en exergue l’implication des autorités politico-administratives.
Sur les 80 personnes interpellées, puis jugées en mai 2021 pour crimes contre l’humanité, association de malfaiteurs et incendie volontaire, 67, dont une femme, avaient été condamnés à de lourdes peines qu’ils purgent à la prison militaire de Ndolo, à Kinshasa. D’autres sont en liberté provisoire, soit en fuite. 375 personnes s’étaient constituées parties civiles.
M.M.F.