CENI : Nangaa contre Kadima, la guerre des experts

A la Commission électorale nationale indépendante (CENI), ça tire à balles réelles entre l’ancien président de cette institutions d’appui à la démocratie, Corneille Nangaa, et le bureau actuel que dirige Denis Kadima. Désormais, acteur politique aux commandes d’un parti politique, Corneille Nangaa ne rate pas une occasion pour remettre en cause les méthodes Kadima. Et la goutte qui a fait déborder le vase à sa dernière déclaration sur les ondes de la radio Top Congo Fm où il qualifie la Céni sous Kadima de faire preuve d’« amateurisme ». Une indexation qui a obligé le bureau Kadima de sortir de ses gonds. Et c’est Didi Manara, 2ème vice-président de la CENI, qui s’est chargé de remettre Corneille Nangaa à sa place, allant jusqu’à remettre en cause ses compétences aux élections de 2018. On assiste depuis lors à une guerre d’experts de part et d’autre.

L’opinion nationale assiste, médusée, depuis plusieurs semaines à un chassé-croisé par médias interposés à des déclarations aussi contradictoires que malveillantes autour de l’organisation des élections générales supposément prévues en décembre 2023. Dans une sorte de triangle dont les trois côtés se repoussent, le président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), Denis Kadima, est à couteaux tirés avec son prédécesseur à la tête de la centrale électorale, Corneille Nangaa.

En mode d’invité surprise, Nicolas Kazadi, ministre des Finances, reste dans la danse et démolit systématiquement tous les arguments du premier qui proclame urbi et orbi que depuis octobre 2022, le gouvernement ne respecte plus le Plan de décaissement destiné à préparer les échéances électorales de décembre 2023. Faux, rétorque l’argentier national. Selon Nicolas Kazadi, le gouvernement aurait mis à la disposition de la CENI, fin 2022, pas moins d’un demi-million de dollars.

La pierre de Nangaa dans la mare

On commençait à peine à s’habituer aux bisbilles entre le ministre des Finances et le président de la CENI dans un combat verbal de personnalités de même obédience politique (ils sont tous les deux proches du président de la République tant par leurs origines que leur appartenance politique). Dans un environnement où l’organisation des élections n’en est que plus incertaine, l’accommodation des deux caractères (bien trempés) n’étant plus qu’une question de temps.

Sauf que sur ces entrefaites, Corneille Nangaa, peu après avoir créé son parti politique (Action pour la dignité du Congo et de son peuple ADCP ndlr), est venu en rajouter à la confusion ambiante. Surfant sur la phrase assassine de l’ancien ministre des Affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian, selon laquelle les résultats de la présidentielle de 2018 résultait d’un «arrangement à l’africaine», confortés par la déclaration d’Emmanuel Macron jetant à la figure de Félix Tshisekedi en pleine conférence de presse qu’il était au fait du contexte de élections de 2018, Corneille Nangaa a confirmé ces allégations, quoique en des termes moins crus.

S’exprimant sur un média local, le successeur du pasteur Ngoy Mulunda charge l’animateur principal de la centrale électorale de trois péchés cardinaux.Le premier : la CENI souffrirait des séquelles d’un péché originel résultant de sa «naissance» incestueuse. D’une part, des composantes politiques représentatives en ont été exclues au détriment de membres issus d’un même espace. Le second : l’enrôlement des électeurs se ferait dans la plus pure des anarchies. Le dernier : le processus électoral souffrirait d’une mauvaise planification et d’un profond amateurisme. Le tout reposant sur des «affirmations dangereuses» consistant à faire miroiter à l’opinion un processus électoral dépourvu d’aspérités.

Si, à la suite de la reconnaissance par Corneille Nangaa du caractère arrangé des résultats de la présidentielle de décembre 2018 ayant porté Félix Tshisekedi à la magistrature suprême, quoique en des termes voilés, certains politiques (dont Martin Fayulu, ndlr) menacent de le traduire en justice pour haute trahison, il n’en demeure pas moins que la cacophonie autour de l’organisation des échéances préélectorales et les scrutins proprement dits restent une gageure. Un nœud gordien que difficile à dénouer à moins d’un miracle.

La réplique

Mardi devant la presse, c’est donc Didi Manara, un transfuge du FCC, passé depuis lors dans l’Union sacrée de la nation, par ailleurs 2ème vice-président de la CENI, qui s’est chargé de recadrer Corneille Nangaa.

Et lorsque l’ancien président de la CENI remet en cause les dernières statistiques d’enrôlement de la CENI, Didi Manara réplique : «Dans ces conditions, comment peut-on à ce stade qualifier de faux chiffres si ce n’est pas par mauvaise foi et dans une intention de discréditer le processus électoral en cours et qui, au regard de nombreux observateurs, enregistre des performances inégalables, en terme de délais et nombre d’électeurs enrôlés, en comparaison avec tous les trois derniers cycles électoraux ».

A tout prendre, Didi Manara note que Nangaa a étalé au grand jour sa mauvaise foi. «En somme, l’auteur de la déclaration étale sa mauvaise foi et son intention de nuire au déroulement du processus électoral …», pense-t-il.

Quoi qu’il en soit, le bureau Kadima réitère sa ferme détermination de respecter l’échéance qu’il s’est fixée pour la tenue des élections générales, soit le 20 décembre 2023.

Econews