La COP26 s’est ouverte à Glasgow, en Écosse, le 1er novembre dernier. L’occasion de faire un premier point, à mi-chemin dans les discussions, alors que le sommet pour le climat se conclut le 12 novembre. Manifestations de jeunes écologistes dans les rues de Glasgow, annonces de mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre, ou rivalités entre grandes puissances : que retenir de cette première semaine de la COP26 ?
Depuis son ouverture dimanche 31 octobre 2021 à Glasgow en Écosse, la COP26 a vu les nations participantes prendre quelques nouveaux engagements pour limiter le changement climatique. Mais la conférence a aussi été vivement critiquée pour le manque d’ambition de premières mesures annoncées, voire pour «l’hypocrisie» de dirigeants venus en jets privés discourir sans réelle volonté de s’engager.
On retiendra aussi l’absence de dirigeants chinois, russe ou encore brésilien, et les tensions géopolitiques qui s’invitent dans les discussions sur le réchauffement de la planète.
Des engagements sur le charbon, la déforestation et le méthane
2030 : c’est la date avancée pour la réalisation de la plupart des objectifs avancés lors de ces premiers jours de conférence. Comme pour l’accord trouvé par 190 pays pour ne plus exploiter de centrales à charbon (actuellement 37% de la production d’électricité mondiale avec 8.500 centrales). La Pologne, le Canada, l’Égypte ou encore l’Ukraine ont signé cet engagement, mais pour les pays les plus pauvres la date butoir est 2040. En revanche des pays qui comptent parmi les plus gros consommateurs de charbon refusent de s’engager, comme la Chine, le Japon, l’Australie, l’Inde ou les États-Unis.
Une centaine de pays s’engagent à mettre un terme à la déforestation d’ici 2030. Ces États, dont la Chine, représentent 85% des forêts mondiales qui reculent actuellement au « rythme alarmant » de 27 terrains de football chaque minute, selon la présidence britannique de la COP26. Ce nouveau plan doit mettre fin à l’abattage des arbres à l’échelle industrielle en moins de dix ans, objectif trop lointain pour l’ONG Greenpeace qui y voit un feu vert à « une décennie supplémentaire de déforestation ».
Ce sont aussi une centaine de nations, représentant plus de 40% des émissions mondiales de méthane, qui se sont engagées à réduire drastiquement les émissions de ce puissant gaz à effet de serre d’au moins 30% d’ici 2030 par rapport à 2020. S’il y a parmi eux les pays de l’Union européenne et les États-Unis, de gros pollueurs comme la Chine, la Russie et l’Inde manquent à l’appel. Moins connu que le CO2, le méthane est le deuxième gaz à effet de serre lié à l’activité humaine, principalement issu de l’élevage, des combustibles fossiles et des déchets. Surtout, s’il subsiste moins longtemps dans l’atmosphère, son effet de réchauffement est bien supérieur que celui du dioxyde de carbone, jusqu’à plus de 80 fois.
Par ailleurs au moins 19 pays ont annoncé jeudi 4 novembre 2021 s’engager à mettre un terme d’ici la fin de l’année 2022 au financement à l’étranger de projets d’énergies fossiles sans techniques de capture de carbone, parmi lesquels de grands investisseurs comme les États-Unis et le Canada. Les nations du G20 se sont récemment accordées pour cesser de soutenir les projets de centrales au charbon à l’étranger. La France n’a pas rejoint cet engagement. Elle veut pouvoir continuer à financer des projets pétroliers et gaziers au-delà de 2023 (jusqu’en 2025 pour le pétrole et 2035 pour le gaz). Ce nouveau plan, annoncé à l’initiative de Londres, inclut pour la première fois gaz et pétrole, et promet de réorienter cet argent vers des énergies renouvelables. Selon l’Agence Internationale de l’Énergie, pour pouvoir préserver l’objectif de +1,5°C, il faudrait immédiatement cesser tout financement de nouveaux projets dans les énergies fossiles.
Un autre engagement mémorable est celui d’un seul État. L’Inde s’est fixée comme objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2070, a annoncé lundi 1er novembre à Glasgow le Premier ministre indien. « D’ici 2070, l’Inde atteindra l’objectif de zéro émission nette » de carbone, a dit dans un discours Narendra Modi. L’Inde est aujourd’hui le quatrième émetteur au monde de gaz à effet de serre.
La COP26 déjà très critiquée
Accusant les grands de ce monde de lancer des promesses creuses, des milliers jeunes sont descendus dans les rues de Glasgow vendredi 5 novembre pour pousser les gouvernements à agir, à la fin de cette première semaine de conférence. Un mouvement inspiré par la jeune militante suédoise Greta Thunberg qui qualifie cette COP « d’échec ». «Assez d’hypocrisie» a lâché de son côté le président du Mexique Andres Manuel Lopez Obrador, qui compare le sommet sur le climat au Forum économique mondial de Davos. Le dirigeant classé à gauche estime que Glasgow réunit les pays les plus puissants du monde « augmentant leur production de pétrole, en même temps qu’ils tiennent ces sommets pour la protection de l’environnement ».
Les trajets en jets privés de nombreux dirigeants vers Glasgow ont aussi fait l’objet de sévères critiques. Bruxelles a tenté de justifier jeudi 4 novembre le recours à des avions privés par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui a pourtant promu à la COP26 des moyens de transport moins polluants. Dans ses fonctions, « les relations avec (…) les chefs d’État et de gouvernement sont très importantes et réclament un peu plus que de simples contacts par Zoom », ce qui implique l’utilisation d’avions affrétés spécialement, a ainsi déclaré le porte-parole de l’exécutif européen, Eric Mamer.
Après avoir appelé à des efforts contre le réchauffement climatique à la COP26 à Glasgow, le Premier ministre britannique Boris Johnson avait lui aussi été épinglé en début de semaine pour son choix de rentrer à Londres en avion, moyen de transport bien plus polluant que le train.
Les critiques portent aussi sur des questions de logistique et d’organisation de la COP26 elle-même. Plusieurs ONG ont dénoncé mercredi 3 novembre les restrictions d’accès imposées. Des milliers d’experts ne peuvent assister aux négociations. «C’est un désastre de voir la société civile ne pas pouvoir accéder à des réunions cruciales et beaucoup de ses représentants ne même pas pouvoir entrer sur le site de la COP », a déclaré à l’AFP Mohamed Adow, du think tank Power Shift Africa.
Des tensions géopolitiques s’invitent à la conférence
Peu avant de quitter Glasgow dans la soirée du mardi 2 novembre 2021, le président américain Joe Biden s’en est vivement pris à son homologue chinois Xi Jinping, estimant qu’il avait commis «une grave erreur» en ne venant pas en Écosse et que la Chine ne pouvait « prétendre à un quelconque leadership » en « tournant le dos » à la crise climatique. À Pékin, le porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin, a qualifié ces propos de « creux ». Les pays en développement et émergents, dont la Chine, font face à des «problèmes pratiques » pour atteindre des «objectifs ambitieux», a fait valoir M. Wang, arguant notamment d’un «manque de technologies» adaptées.
Xi Jinping s’est contenté d’un message écrit, posté sur le site internet de la conférence, aucune intervention par visioconférence ou message vidéo n’étant prévue pour les chefs d’État et de gouvernement qui n’ont pas fait le déplacement.
«Il a des problèmes climatiques très, très graves et il ne se montre pas disposé à faire quoi que ce soit », a lancé Joe Biden à propos de Xi Jinping. « C’est la même chose pour Vladimir Poutine », a poursuivi le dirigeant américain, le président russe n’ayant pas non plus fait le déplacement. Moscou a également rejeté ces critiques : «Nous ne sommes pas d’accord», a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
Les actions de la Russie contre le réchauffement climatique «sont cohérentes, réfléchies et sérieuses », a-t-il ajouté.
Econews avec France Inter