Elections 2023 : le calme qui précède la tempête

Si l’on omet, par une inopportune inadvertance, les événements tragiques de Goma (Nord-Kivu) au cours desquels une cinquantaine de civils ont été délibérément massacrés, le 30 août 2023, par des forces de l’ordre, ou encore la polémique née de la destruction à Kinshasa d’une partie de la propriété de l’ancien chef de l’Etat Joseph Kabila, force est de constater que l’actualité politique courante affiche une relative léthargie. C’est peut-être un calme trompeur qui augure d’une période fortement agitée avant les élections générales du 20 décembre 2023.
Mis à part les messages de soutien à la candidature et la réélection du chef de l’Etat actuel à l’issue de la présidentielle du 20 décembre qui inondent les réseaux sociaux, un silence angoissant plane sur le microcosme politique. Tout laisse penser, dans le chef des leaders des partis politiques, à une posture d’attente des décisions ultimes de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) à laquelle revient le pouvoir d’avaliser les candidatures à l’élection présidentielle.
La date de dépôt des candidatures à la magistrature suprême est fixée, à la suite de l’appel de l’électorat du 2 septembre au 9 septembre prochain, les candidats ayant la latitude de compléter leurs dossiers jusqu’au 8 octobre. C’est peu dire que dans les états-majors politiques, c’est déjà la veillée d’armes. Ce qui expliquerait le calme ambiant et une sérénité trompeuse.
Le seul qui occupe le terrain est Moïse Katumbi. Le président d’Ensemble pour la république est de retour dans son fief de Kashobwe après une tournée qui l’a conduit à Manono, Bukama, Malemba-Nkulu, Kongolo et Kabalo, territoires du Haut-Lomami et du Tanganyika dans l’ex-Katanga démembré.
Même si, devant les foules mobilisées venues l’écouter, le Chairman s’est défendu d’être en campagne électorale, il n’en reste pas moins qu’après ses déboires du mois de mai où il a été empêché de se rendre dans la province du Kongo central au lendemain de la manifestation du 20 mai organisé conjointement avec trois autres candidats à la présidentielle (Matata Ponyo, Delly Sesanga et Martin Fayulu) pour protester contre la vie chère, il se devait de réapparaitre loin des tumultes kinois et faire la démonstration de sa popularité dans les contrées rurales où le discours politique n’arrive que par intermittence.
A un peu plus de trois mois de la tenue des élections, dont la présidentielle, l’UDPS ne semble pas s’être déjà jeté dans la bataille. La stratégie du parti consiste à laisser les nombreux partis et regroupements politiques satellites monter au créneau et à proclamer à haute et intelligible voie leur soutien à Félix Tshisekedi dont le second mandat serait chose acquise.
Quoique le congrès extraordinaire de l’UDPS tenu les 25 et 26 août ait formellement entériné la candidature de Tshisekedi, le parti présidentiel fit faussement profil bas, retranché derrière une multitude d’alliés qui n’hésitent pas à distribuer des coups à une opposition de plus en plus inaudible.
Une chose est certaine. Le calme observé ces derniers temps sur le champ politique congolais ne devrait tromper personne : il préfigure la déflagration qui suivra immanquablement la publication de la liste officielle des candidats retenus par la CENI à concourir à la présidentielle.
L’opinion est suspendue aux suites de la publication de ladite liste pour plusieurs raison. Parmi les prétendants, l’ancien premier ministre Matata Ponyo est sous le coup de poursuites judiciaires dans des «affaires» sans cesse requalifiées, faisant planer le risque d’une disqualification programmée de longue date dans les officines pro-Tshisekedi.
Moïse Katumbi, l’un des candidats les plus en vue est insidieusement présenté comme étranger et encourt de ce fait le risque d’être recalé par une CENI aux ordres.
Les trois mois qui courent avant les élections sont entourées de surprises. Au mieux, il se profile un schéma (improbable) d’un atterrissage en douceur et au pire, les ennemis de la République s’emploieront à susciter une situation qui amènerait à un report des élections. Une éventualité que certains milieux de l’UDPS entretiennent en sourdine.

M.M.F.