La Liberté d’expression en RDC : un précieux droit mis en péril

La République Démocratique du Congo (RDC), une nation riche en ressources naturelles et culturelles, est aux prises avec de profonds défis, dont celui crucial de la liberté d’expression. Malgré quelques avancées démocratiques notables récemment, ce droit fondamental reste sous une constante menace dans le pays.

En prévision des élections de décembre 2023, les tensions montent crescendo entre les opposants politiques et les partisans du pouvoir en place. Les rues résonnent des voix des acteurs politiques revendiquant diverses causes, témoignant ainsi de la vitalité démocratique. Cependant, cette dynamique démocratique est ébranlée par la répression des manifestations publiques et la réduction des espaces de parole et d’opinion.

L’un des principaux obstacles à la liberté d’expression en RDC réside dans les restrictions légales et réglementaires. Des lois ambiguës sur la diffamation et la sécurité nationale sont souvent utilisées pour museler les voix dissidentes, notamment celles des journalistes, des défenseurs des droits de l’homme et des opposants politiques. Les arrestations arbitraires, les détentions prolongées sans procès et les actes d’intimidation sont monnaie courante, dissuadant toute critique envers le gouvernement ou les puissants.

De surcroît, la violence à l’encontre des opposants politiques, des journalistes et des médias demeure un problème persistant en RDC. Ces acteurs sont régulièrement menacés, agressés, arrêtés voire assassinés pour avoir simplement exercé leur métier ou exprimé leurs opinions. Ces attaques et répressions visent à intimider et à réduire au silence ceux qui osent dénoncer les abus de pouvoir, la corruption ou les violations des droits de l’homme.

Les autorités ciblent spécifiquement les artistes, les journalistes, les membres de l’opposition politique et les analystes politiques.

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L’arrestation des opposants politiques au pouvoir en place, notamment les membres de « Ensemble pour la République » de Moïse Katumbi, ceux du FCC de Joseph Kabila, de l’Ecidé de Martin Fayulu, de l’Envol de Delly Sessanga et ceux de Franc Diongo, témoigne d’une escalade des tensions politiques dans le pays.

Le 1er mai, des agents du renseignement ont arrêté Lens Omelonga, membre du parti politique d’opposition Envol, qu’ils ont accusé d’avoir retweeté un post critiquant la fondation de la première dame. Le 30 octobre, Lens Omelonga a été condamné à sept mois de prison pour diffamation. Il a été libéré le 2 décembre.

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Le 30 mai, des agents du renseignement militaire ont arrêté Salomon Kalonda, bras droit de l’un des principaux chefs de l’opposition, Moïse Katumbi, sur le tarmac de l’aéroport de N’djili à Kinshasa. Il est accusé d’être en contact avec le groupe armé M23 et ses soutiens rwandais.

Le 17 juin, des agents des services de renseignement ont arrêté des mobilisateurs et cadres du Front Commun pour le Congo fidèles à l’ancien président Joseph Kabila, dont Constantin Kasereka, Joseph Said Kambere et Fidèle Banza. Ils ont été interrogés sur les « soutiens de Joseph Kabila au M23 » et ses relations avec le Rwanda. Détenu pendant deux semaines, ils ont été libérés le 3 juillet.
Le 20 juin, des membres de la Garde républicaine, une unité militaire chargée de protéger le président, ont arrêté le membre de l’opposition et candidat à l’élection présidentielle Franck Diongo à Kinshasa, l’accusant de détention illégale d’arme. Il a été détenu au quartier général des renseignements militaires puis transféré à la prison militaire de Ndolo le 8 juillet après avoir été entendu par un tribunal militaire. Il a été libéré sans inculpation le 15 juillet.

Chérubin Okende, 61 ans, membre du parlement et porte-parole du parti politique de Moïse Katumbi, a été retrouvé mort, blessé par balles, dans sa voiture à Kinshasa le 13 juillet. Le gouvernement congolais a procédé à deux arrestations (le chauffeur de Chérubin Okende, libéré après trois mois de détention, et son garde du corps, toujours détenu) a dénoncé un «assassinat » et a mis en place une commission d’enquête. Des experts médico-légaux de la MONUSCO, des officiers de police des Nations Unies ainsi que des experts sud-africains et belges ont fourni leur aide à la commission. Toutefois, les circonstances du meurtre de Chérubin Okende ne sont toujours pas connues.
Le 12 août, trois mobilisateurs et cadres du FCC de Joseph Kabila (Armand Kanda, Joseph Said Kambere et Bertin Ngimbi) ont été arrêtés. Relâchés après 17 jours de détention, ils étaient accusés de diffamation et propagation des faux bruits.

Le 30 août, les troupes gouvernementales ont abattu au moins 57 personnes et en ont blessé de nombreuses autres à Goma lors d’une opération visant à faire appliquer une interdiction de manifester. Une secte mystico-religieuse appelée Foi naturelle judaïque et messianique vers les nations avait organisé une manifestation pour appeler la MONUSCO et la force régionale de la Communauté de l’Afrique de l’Est (East African Community, EAC) à quitter le pays, mais les autorités avaient interdit le rassemblement.

La répression gouvernementale a également eu des répercussions sur la couverture médiatique des partis d’opposition, des journalistes ayant fait l’objet de menaces ou d’agressions physiques lorsqu’ils couvraient des événements politiques.

Lors des manifestations de l’opposition, des journalistes, notamment Patient Ligodi, dont les images d’agressions ont fait le tour du monde, ont été victimes d’attaques par des éléments des services de sécurité.

L’arrestation, le 8 septembre 2023, du journaliste le plus suivi du pays, Stanis Bujakira – directeur adjoint du média en ligne congolais Actualite.cd, reporter pour Jeune Afrique et l’agence de presse internationale Reuters – alors qu’il attendait de prendre un vol à l’aéroport international de N’djili, à Kinshasa. Toujours en détention et son procès est en cours. Il fait face à plusieurs chefs d’accusation, y compris « falsification et usage de faux » ainsi que « propagation de faux bruits ».

Face à ces attaques et agressions, plusieurs membres de l’opposition et des journalistes ont choisi d’aller vivre à l’étranger craignant pour leur vie.
La communauté internationale doit maintenir la pression sur le gouvernement congolais pour qu’il respecte ses engagements en matière de droits de l’homme et de libertés fondamentales. Les sanctions ciblées, les déclarations publiques et le soutien aux organisations de la société civile peuvent jouer un rôle crucial pour accroître la responsabilité et promouvoir le changement.

En conclusion, malgré quelques avancées, la liberté d’expression reste un défi majeur en République Démocratique du Congo. Pour progresser vers une société plus ouverte, inclusive et démocratique, il est impératif de protéger et de promouvoir ce droit fondamental pour tous les citoyens congolais.

Econews